On a donc deux textes. C'est bien. Mélangeons-les donc : [Nous errions dans les plaines, sans repères, et alors que le temps passait les nuages vinrent jusqu'à emplir l'éther, gros et sombres, ils nous contemplaient et nous ne les regardions pas ; ils passaient haut dessus nos têtes lassent, nous ne bougions plus, quelle différence ? Alors ils crevèrent, et nous étions toujours aussi sombre, mais maintenant nous étions trempés.] . C'est mieux. On peut aussi tenter une modification plus basique, à simple base de coupes. [J'étais dans le mouvement, et j'étais perdu, et il a plut et j'ai été mouillé.] .
Il y a aussi la reproduction qui est possible : on fait entrer un texte dans l'autre, et on récupère les enfants, que voici : [Les nuages inondaient les champs rustiques], [Mon désarroi trouvait reflet dans l'étendue des champs desséchés] , et [Le soleil nous écrasait du poids de ses rayons] . On peut essayer de continuer en croisant les mômes, dans une sorte d'orgie pédophile, d'où naissent deux enfants qui, comme on pouvait s'y attendre, sont complètement dégénérés : [Les champs lumineux étaient inondés de tristesse.] , [Sans trop savoir, je pleuvais et mouillais les genêts.] . Arrêtons-là la consanguinité ; introduisons un peu de nouveauté.
["Je disais alors à mon ami le conservateur Whistler : [ "Il m'apparaît désormais que les gravures sur la coque du vieux chalutier sont le fruit d'une action intelligente." ]. ] . Nous avons là deux textes imbriqués. Juste pour rigoler, on peut inverser les imbrications : [Les gravures sur la coque du vieux chalutier, racontant que [j'en parlais à mon ami le conservateur Whistler], étaient probablement le résultat d'une action intelligente.] . Cool. Par là, on peut alors réussir à faire en sorte que chaque imbrication imbrique la précédente. Du genre : ["Je parlais alors à Whistler [des symboles sur le chalutier, résultant probablement d'une force intelligente, racontant que [je disais à mon vieil ami que j'avais découvert que [ces gravures, figurant [ce que je racontais au conservateur à propos [de la coque du bateau, sur lequel on voyait clairement que [je lui disais que [etc...] ] ] ] ] ] ]. ] . Voila qui est parfaitement crétin.
Maintenant, vous demandez-vous, comment fonctionnent donc les quelques méthodes de création que nous avons vu avec les textes imbriqués ? Eh bien, ça fonctionne comme pour les autres, si ce n'est que chaque imbrication est pareillement modifiée. Voyons ça en exemple, en mélangeant le tout premier texte de cet article (celui qui relate l'épopée des types mouillés) avec celui du mec qui raconte ses conneries à Whistler. On a alors : [Lors de notre promenade sous le crachin britannique, j'entretenais Whistler de mes découvertes au sujet [des gravures champêtres de la coque du chalutier, fruits probable d'une trop grande humidité]. ] . Chaque partie a été modifiée, pas de jaloux, l'égalité règne, c'est la magie du communisme. Oui, car il est bon que chaque partie d'un texte vive en bonne intelligence avec les autres, sinon on obtient des textes nationaux-socialistes qui balancent des affirmations sans rien derrière, des anarchistes aux arguments qui se donnent allègrement les uns les autres des coups de couteau dans le dos, voir des putains de textes hippies où on se fait carrément chier.
Introduisons une nouvelle notion : celle de dimension. Une dimension représente une thématique récurrente du texte, souvent amenée à varier. Par exemple, dans [Nous avons été nous promener dans les champs. Il a plut et nous avons tous été mouillés.] , la météo et la promenade sont deux dimensions du texte. On peut regrouper ces dimensions en groupe : le groupe (noté entre crochets) {météo, promenade, champs} comporte trois dimensions, dont les variations permettent entièrement de décrire le texte : en effet, celui-ci dépend quasi-uniquement de la promenade, des champs et de la pluie. Effectuons maintenant une permutation dans ce groupe, changeons l'ordre des dimensions : que devient le texte si on a {promenade, champs, météo} ? Quelque chose du genre : [Nous étions les champs, au dessus de nous souvent passaient des nuages. Des gens parmi nous se promenaient et nous écrasaient.] . On peut également, et c'est bien plus utile, choisir une dimension et ne modifier que celle là, en laissant les autres en place : on a alors en agissant sur la météo transformer la pluie qui mouille en soleil qui brûle, en bruine qui enrhume ou en tornade qui détruit votre maison. On peut aussi faire une substitution, en remplaçant une dimension par une autre, par exemple "météo" par "sports d'hiver", ce qui donne alors [Nous avons été nous promener dans les champs. Il a été joué au curling et nous avons tous été balayés.] .
Bon maintenant qu'on a appris plein de choses, on va pouvoir s'amuser. On prend les deux textes de base (celui avec les crétins qui se font mouiller et l'autre avec son putain de chalutier), on rajoute un autre que voici : [C'est fini, la réalité se rétablit, chassant l'enfer paradisiaque, les feux meurent doucement. Derrières les murailles point l'aube, on massacre ceux qui ne sont pas encore mort.] , et c'est parti. Youpi. Joie. Truc.
On commence par simplement mélanger le premier et le dernier : [Aux lueurs de l'aube nous revenons, la pluie fine éteint les brasiers et trempe les corps, les liquides mélangés en ruissellent entre les herbes, l'eau chasse le délire, et nous achevons des corps humides se lovant dans la boue.] . On prend le texte obtenu et on le fait saillir par celui avec Whistler. Voici la progéniture : [Au petit matin, marchant parmi les champs humides d'eau et d'humeur en compagnie de Whistler, je remarquais que [les gravures du chalutier indiquaient bien des moyens d'occire ceux qui encore vivaient]. ] et [Le chalutier navigue sur l'océan infini de corps, la marée éteint les êtres en feu et les thaumaturges racontent à Whistler [comment ils gravent dans les champs les signes des dieux du matin].] . On remarque que le dernier est un peu gol, ça fait partie des bonnes surprises du processus. Et comme dans la vraie vie, c'est avec les retardés qu'on s'amuse le plus. Maintenant, on prend l'handicapé et on le mixe avec l'autre môme, afin d'obtenir [Whistler le thaumaturge menait l'esquif sur l'océan agité des corps mouvants, frémissants, vivants, brûlants, hurlant [des chants de morts, des prières exaltées aux dieux oubliés], aux mains s'agrippant à la vieille coque et y gravant [les symboles de l'eau et du feu, et les signes [de la vie qu'ils avait quitté], craignant de les oublier et de disparaître avec eux]. ] . On remarquera que les sous-textes se sont multipliés. Enfin, c'est pas spécialement grave. Je veux dire, ils ont jamais buté personne, ils sont même plutôt cool, ils apportent juste un peu de profondeur. Bref.
Et maintenant le final, on prend le texte obtenu précédemment, on le mixte avec le premier texte, mais avec la dimension "météo" réglée sur "sècheresse", et finalement on obtient un bon texte communiste, et comme chez tous les bons communistes, on purge. Les élus seront ici les délimitations des sous-textes, c'est à dire tous les crochets intérieurs, qui vont donc comme il se doit être exterminés en tant que classe. Et contemplons lors ce qu'on obtient:
[Et sous la chaleur terrible, la barque du thaumaturge traversait l'océan immense des damnés, le navire fendant la masse entassée des corps brûlants, séchants, hurlant à la mort qui ne voulait pas d'eux, hurlant aux dieux qui les avaient depuis longtemps oubliés, et cherchant sans fin à grimper sur l'embarcation continuant son chemin, impassible, se cloquant leur mains sèches à la coque de métal chauffée au rouge. Et ce qu'elle touchait fondait, et ceux qui la touchaient y laissaient des traces d'ongles, de griffes, de dents comme pour former un ultime message, une trace unique de leur subsistance. ]
Et voila comment avec un minimum de travail obtenir un texte original à partir de trois fragments assez limités en eux-même. A vous de jouer maintenant.
Bien. Alors voici un texte : [Nous avons été nous promener dans les champs. Il a plut et nous avons tous été mouillés.] . Les crochets sont une notation arbitraire qui servira ici ainsi que par la suite à délimiter la portée d'un texte. En voici un autre de texte : [J'étais dans le mouvement, et j'étais perdu, et le long de l'axe du temps je chutais, glissant, m'enfonçant un peu plus loin chaque instant dans l'incompréhension et la lande, sous un soleil qui s'était trompé de latitude, brûlant les genêts et ma peau.]
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Message complémentaire :
J'aurai bien voulu vous souhaiter bonne chance avant que vous ne commenciez la lecture du texte, mais j'étais confronté à un dilemme. Car si, comme moi, avant votre lecture vous allez lire l'éventuel message complémentaire, alors je peux effectivement vous souhaiter bonne chance pour la lecture. Je le fais d'ailleurs. Bonne chance pour la lecture.
Mais si vous ne faites attention au message complémentaire qu'après avoir lu le reste du texte, alors là c'est un peu gênant. Je propose qu'on considère à posteriori que je vous souhaitais tout de même bonne chance avant que vous entamiez votre lecture, même si vous n'étiez pas au courant. Ou alors plutôt que je vous remercie maintenant d'avoir lu jusqu'au bout le texte. Voila.
Ce qui ne fonctionnera pas si vous n'avez pas lu tout le texte mais si, pour une raison ou pour une autre, vous avez tout de même décidé comme ça que ce serait cool d'aller voir la fin. Si vous êtes dans ce cas, je me permets de vous traiter de sinistre abruti, même si je me doute bien que vous allez trouver une excuse misérable pour justifier ce répugnant comportement. Pauvre merde. Andouille garnie. Ta mère la pute fait des stats en enfer. Barbier de la littérature. Barbare je voulais dire. Comme le petit éléphant, pute. TU LE SENS BIEN LE PETIT 2L2PHANT DANS TON CUL SALE PUTE HEIN AVEC SA TROMBE QUI REMUE ET QUI TOURNE ET QUI HURLE ET QUI PLEURE ET QUI HURLE? LA TROMPE SALOPE INFINIE? PROSTITU2E TOPOLOGIQUE § ALLEZ TOUS VOUS PROMENER DANS LES CHAMPS ET FAITES VOUS TREMPEZ LA GÜÜLE PAR LA PLUIE LA PUTE DE SA MËRE GAY6LUSSAC §§§
Bonsoir. Vous me semblez fort sympathique. Lrs grebillrs sont paeticulirermrnt rn avancr crttr annrr.
Bonjour, ce texte m'a rendu intelligent. Y a t'il un numéro à appeler dans ce cas ?
Complètement fou, intense. Fluide, pertinent. Je dis bravo.
Cela dit en relisant certains passages je me demande si c'est pas juste une excuse pour écrire des conneries entre crochets. Ce dont on se fout, d'ailleurs, c'est trop bon pour casser les couilles avec des détails de merde. D'ailleurs le raisonnement tient si on part du principe que c'est l'oeuvre d'un autiste schizophrène qui régit les lois de son monde textuel. Je sais pas si ça veut dire quelque chose mais je le pense sincèrement.
C'est censé être lu.
Pas bourré?
Ahaha. Génial.
Donc, qu'est-ce qu'on doit lire ?
Après avoir lu le commentaire de nihil, je m'attendais à un truc long, alambiqué, et chiant. Après lecture du texte, bah j'ai rien trouvé de tel; au contraire ça coule tout seul, et au final c'est assez drôle (mention spéciale pour la consanguinité, j'ai fait des mouvements frénétiques avec mes bras, et j'ai cassé un truc).
Seul détail, je trouve ça trop court, un peu rapide dans la théorie.
Bref, Hag, va te faire mettre, avec ton putain de texte cool.
J'ai trouvé ça fabuleux et grandiose. Ca faisait longtemps qu'un texte ne m'avait pas autant fait marrer. Excellent et didactique, youhou !
Dans la mesure où j'ai des testicules, on oubliera rapidement le "youhou".
J'ai trouvé ça intéressant. Y a matière à creuser, en définissant mieux les règles de bases et comment s'opèrent les transformations. Parce qu'il y a moyen de faire effectivement une méthode efficace et intéressante, seulement on part vite dans le fumeux dès l'ajout des dimensions : complexe juste pour faire du complexe. C'est de bas étage, ça. N'empêche que ça se lit en effet tout seul.
Mais en même temps, je suis un matheux, informaticien et juriste.
Matière à creuser ? Justement, l'idée a été poussée juste assez loin. Seul un LC sous poudre de cookie aux champignons aurait pu développer ça avec plus de rigueur sans que ça devienne lourdingue.
Saluons donc la performance, clap clap, l'imbrication d'un style en pleine désinvolture matheuse avec des morceaux de poésie qui s'extirpent de la merde modelée.
Le suçage de queue Dourakienne par le truchement de l'emploi de "communiste" est en revanche déplorable. Mange-boules.
Complètement délirant, j'ai adoré, c'est bien drôle et pertinent, ça part d'une très bonne idée, et c'est absolument pas chiant à suivre.