LA ZONE -

Le rire malsain

Le 11/12/2025
par Mathieu Sylvestre
[illustration] L'humour peut--il être un outil de vérité ?
Georges était dans le silence, jusqu’à ce qu’il use de l’humour. Un beau jour au collège François Mitterrand, son sac s’était comme à l’accoutumée chargé de déchets en tout genre dès le moment où il l’avait laissé seul, quel goinfre, il fallait toujours le surveiller celui là. Mais ce beau jour au collège, il avait prit une importante décision. Il avait passé la nuit à lire des vieux livres d’humour qu’il avait trouvé chez ses grands parents, comme il ne trouvait pas le sommeil, et avait lui même quelques idées en tête. Il aperçut pas très loin de là un groupe de gens de sa classe qu’il ne connaissait pas trop, mais ils avaient le mérite d’être aimables, alors il les désigna pour sa première tentative. Avec ardeur il échauffa son verbe dans son esprit, puis il approcha les gens, dévoila le contenu de son sac et parla :
«Regardez ça, j’ai laissé mon sac sans surveillance et je l’ai retrouvé chargé de la caverne d’Alibaba ! De quoi faire jalouser sans nul doute toute la cargaison du port de commerce, j’ai ici mouchoirs, chewing-gum et bâtonnets de sucette à profusion ! »
    Il avait parlé, et son esprit s’apaisa quelque peu, un léger sentiment de soulagement naquit en lui. L’ironie a ce pouvoir étrange qui permet de sortir les mots bien plus facilement. On se distancie de nos émotions, on en distancie le destinataire, et tout devient plus fluide, plus légitime à raconter. Car la plainte est honteuse, elle montre la faiblesse, et le sarcasme est plus noble, car rire de ses tragédies, c’est être accompli même dans la souffrance.

    Raphaël ne sut que répondre, cet étrange personnage qui venait de déclamer une blague gênante à propos du contenu de poubelle présent dans son sac, devant ses amis et lui, l’avait mis profondément mal à l’aise. Il ne le connaissait pas vraiment, car il ne l’avait jamais beaucoup entendu parler, alors le voir déclamer une phrase aussi aléatoire à ce moment le perturba tout à fait. Il prit le parti de prendre son comportement pour des tentatives de sociabilisation de mauvais goût, le temps d’en savoir plus, et lui rendit un sourire qui se voulait mi-compatissant, mi-agacé. Son opinion se renforça deux jours plus tard quand Georges revint trempé de la tête au pied, en plein soleil. Là encore, il déclama nonchalamment :
« J’ai commencé à économiser du temps en me lavant à la fois le corps et les vêtements dans la rivière sur le chemin de l’école ! »
    Il souriait en disant ça, et Raphaël se prit à souffler du nez, ce gars était vraiment un comique. Raphaël ne pouvait pas comprendre car il n’était pas assez ouvert pour savoir qu’un sourire ne signifie pas toujours la plénitude. Pour Georges, à force de les tourner à la dérision, ses problèmes avaient tourné dérisoires. Bien que le rire lui ai permis de parler, il l’a empêché de s’exprimer.

    Georges rencontra Raphaël alors que celui-là était étendu par terre au pied de l’escalier après un douloureux roulé-boulé spectaculaire. En voyant l’autre, il se remit à sourire, et dit :
« Je crois bien que je suis… tombé sous ton charme ! »
    Raphaël se mit à rire de bon cœur, il s’était attaché aux petites blagues de Georges, ça pimentait un peu sa vie de collégien ennuyeuse. Georges continuait d’espérer l’aide de Raphaël, mais son cœur était de plus en plus contraint sous le poids d’une nouvelle douleur qu’il ne s’expliquait pas. Le rire lui permit de parler, mais lui interdit d’être. Georges était dans le vrai, jusqu’à ce qu’il use de l’humour.

= commentaires =

Lapinchien

lien tw yt
Pute : 151
à mort
    le 10/12/2025 à 18:39:16
J'aime bien l'intention du texte mais l'humour à deux balles déployé n'est pas à la hauteur de la dédramatisation du harcèlement.

Par exemple, avec son sac rempli d'ordures, il aurait pu dire : Oh, putain, con, j'ai croisé Rachida Dati en venant à l'école et elle m'a déversé le contenu d'une benne dans mon sac...

Ou encore, lorsqu'il se justifie que des gamins l'ont poussé dans la rivière : Hey, mec, tu sais quoi, en chemin, j'ai croisé Sarkozy, la chatte à sa mère, la femme fontaine, quoi...

Enfin, voilà, non... en fait, c'est pas mieux.
Nino St Félix

lien
Pute : 39
    le 10/12/2025 à 18:45:47
Oh, c'est dommage, car c'est bien écrit, et touchant. Mais la fin, c'est décousu de fil transparent. Ça tombe à plat comme une crêpe foireuse de la Chandeleur. Pourtant, y'a une voix intéressante, un souffle émotionnel qui me renvoie à ces années maudites (d'ailleurs le con que je vais sacrifier pour la Saint Con en vient tout droit, j'ai hâte).
Je lui mettrais trois quart de sailorfuck pour l'intention, et l'émotion, et le style. Mais ça manque de vivance, de fougue et surtout, de longueur (oui, pour une fois).
A.P

Pute : 57
    le 10/12/2025 à 18:51:43
J'aime bien aussi, c'est con et innocent à la fois. Pas drôle ? Certes, mais comme le sont parfois les gosses. La force d'assumer ses blagues nazes est un vrai super-super pouvoir, je trouve.

" Car la plainte est honteuse, elle montre la faiblesse, et le sarcasme est plus noble, car rire de ses tragédies, c’est être accompli même dans la souffrance." Cette phrase a résonné dans ma tête bien comme il faut sur un échange avec des collègues ce midi.

Le côté optimise du texte me rappel une blague racontée par Jodorowsky :
" Un noël, deux frères reçoivent des cadeaux, l'un d'eux remplace le cadeau de son frère par du crottin de cheval. Le lendemain matin à l'ouverture le premier s'extasie:
- J'ai reçu un train!
Le second:
- Et moi un beau cheval, mais il est parti!"
A.P

Pute : 57
    le 10/12/2025 à 18:52:09
J'ai oublié de dire merci pour ce texte alors euh...


Merci !
Etienne Braud

Pute : 2
    le 10/12/2025 à 19:02:46
oui je trouve qu'il dénonce bien l'inélégance et l'inutilité de l'emploi de l'ironie à profusion. Trop usée: elle perd son impact, son sens, toute sa finesse, parce qu'elle est partout, elle est facile.
Comme si la lucidité contemporaine était nécessairement aigrie. Mais la lucidité n'est pas désabusée et encore moins cynique, comme une fin en soi, elle est plutôt l'outil ou la nécessité qui permet de tirer de la substance d'un objet. Comme de ce rire malsain.
Lapinchien

lien tw yt
Pute : 151
à mort
    le 10/12/2025 à 19:36:48
« Je crois bien que je suis… tombé sous ton charme ! » NON NON NON : "J'ai loupé l'ascenseur social et j'étais pressé..." Ok, pas mieux...
A.B

Pute : 10
    le 10/12/2025 à 19:53:50
Y a-t-il un discours du sujet qui dirait le vrai ? Y a-t-il un registre qui serait plus vrai que les autres?
L'humour noue, dans ce récit, une amitié naissante. Il permet quelque part une mise en échec.
Ça se lit vite. Il pourrait y avoir une suite
KORBUA

Pute : 7
    le 10/12/2025 à 19:56:15
yep.. pas tout compris.. peut-être besoin de relire Bergson.. sorry..
Lapinchien

lien tw yt
Pute : 151
à mort
    le 10/12/2025 à 19:56:17
Une suite ? Je propose un co-branding avec Canteloup alors.
KORBUA

Pute : 7
    le 10/12/2025 à 21:14:07
ah.. Lapinchien.. là je comprends.. et me bidonne.. yep.. pour moi t'as lu Bergson..
Arthus Lapicque

Pute : 37
    le 10/12/2025 à 22:45:06
Une écriture un peu encombrée qui ne colle pas vraiment à son sujet, les phrases lourdes manquent de concision et paradoxalement l'ensemble manque de développement pour rendre le récit plus clair, plus abouti.

Dommage. Ce texte se crashe lamentablement, alors qu'il aurait vraiment pu aller loin sur la même base, beaucoup plus loin même, quitte à sombrer dans quelque chose de vraiment glauque et dérangeant, et susciter le rire ultime, le rire nerveux.

= ajouter un commentaire =

Les commentaires sont réservés aux utilisateurs connectés.