LA ZONE -

Nevrotica 6

Le 06/07/2003
par Tulia
[illustration] Encore cette fichue boule à l’estomac. Ca commence à devenir un peu trop fréquent en ce moment. A croire que ça m’attaque aussi les neurones, je me sens à nouveau incapable de réfléchir de façon cohérente. C’est le genre de situation où tout peut basculer d’un coup, dans un sens comme dans l’autre et en règle générale, ça fait mal.
Non contente de m’engréner moi-même dans des pensées malsaines et sombres, je ressens toujours ce besoin indescriptible de contre-balancer la douleur morale avec une bonne dose de douleur physique que je m’inflige moi-même. C’est pas vraiment une punition, c’est juste que pendant que je ressens la douleur en surface, j’oublie celle qui me ronge à l’intérieur. C’est beaucoup trop éphémère comme remède mais il faut absolument que je m’abandonne dans l’auto-violence.
Depuis la dernière fois, je me trimballe encore une petite marque au front qui laisse aisément deviner le bord du bureau. Quand on me le fait remarquer, je réponds que je me suis cognée. Sauf que les gens s’imaginent pas que c’est volontaire. Un coup. Deux coups. Trois coups… Chaque fois un peu plus fort jusqu’à ce que la douleur prenne le dessus sur les émotions.
J’ai peur. Je crois savoir pourquoi. C’est comme une intuition persistante dont j’arriverai à me défaire que lorsqu’on m’aura prouvé le contraire. Et pourtant, je le savais… Non seulement je le savais, mais je l’ai cautionné. J’ai donné mon accord et maintenant c’est trop tard. Prise au piège de mes propres mots.
Je veux pas souffrir. Pas encore…
J’ai l’impression que si mes peurs sont confirmées, y a quelque chose qui va crever à l’intérieur de moi. Je sais pas quoi, je sais pas pourquoi mais je m’y prépare. J’ai peur de me désincarner petit à petit pour finir par n’être plus qu’une substance organique vidée de toute conscience.
Pour ce que ça sert la conscience… Je m’en souviens pas mais je sais qu’il fût un temps où je n’en avais pas. Je ne me sentais ni bien, ni mal, je sentais rien du tout, je n’existais pas. Mais aujourd’hui, je me sens vivre. Je sens toute cette mécanique infernale qui s’emballe et cette fichue conscience qui me transmet des électro-chocs de haine, de violence et de souffrance.
Des pulsions destructrices s’animent en moi et je veux hurler à la face du monde à quel point j’abhorre tout ce qui le compose. Je voudrais cracher la moisissure qui en recouvrira chaque élément, détruire les consciences individuelles et annihiler l’inconscient collectif.

Je sais ce que tu es en train de faire. Plus l’heure tourne et plus la certitude prend peu à peu la place du doute. J’ai envie de te haïr pour ça mais je n’y arrive pas, c’est insupportable. J’ai l’impression que je ne pourrais jamais plus te regarder comme avant. Je manque d’air mais ça ne vient pas de la chaleur. Je crois que je vais vomir. En temps normal, je m’effondrerais mais rien à faire. J’arrive encore à garder la tête haute mais pour combien de temps encore ?
Laisse-moi tranquille maintenant, j’ai pas envie de te voir pour le moment. Non ! Tais-toi, sors de ma tête et fous-moi la paix !

Je ferme les yeux et je vois des monstres à figure hideuse qui arrachent de leurs dents des morceaux de viande prélevés directement sur des hommes, des femmes et des enfants attachés et poussant des cris ayant perdu toute humanité. Rêve éveillé probablement. Il faut rouvrir les yeux pour dissiper cette illusion. Mais si je les ferme à nouveau, je vais voir défiler toutes les images traumatisantes qui constituent mes phobies. Des requins à la gueule grande ouverte me fixant de leurs yeux vicieux, des araignées géantes grouillant tout autour de moi, une foule en mouvement paniqué au milieu de laquelle je serais prisonnière, un petit coffre dans lequel je tiendrais à peine en position fœtale où l’on m’aurait enfermée, le hénissement désespéré des chevaux qu’on amène à l’abattoir… Un hurlement de terreur reste coincé au fond de ma gorge. Je transpire et je tremble à la fois. Je sens le goût de ferraille caractéristique du sang dans ma bouche à force de me mordre les joues.

Ca va trop vite. Mes pensées s’embourbent dans un tourbillon chaotique pendant que mon corps est prisonnier d’une camisole invisible. Je vais bien finir par exploser. Le plus vite possible j’espère parce que je vais plus supporter ça très longtemps.
C’est le moment fatidique. A moi de choisir cette fois si je veux avoir conscience des réalités ou non. Je ne sais pas, j’hésite. Et si j’avais raison depuis le début ? Oui mais si j’avais tort… Je ne sais pas quoi faire. Mon cœur bat à tout rompre. J’ai la tête qui tourne. Je sens des pulsations nerveuses qui s’affolent sous ma peau à différents endroits de mon corps. J’entends subitement cette petite contine : « am stram gram, pik et pik et colegram… », elle résonne lentement de façon à peine perceptible à l’intérieur de ma tête, comme un murmure d’enfant possédé. Cette fois, c’est décidé, il faut que je sache. D’habitude, j’ai toujours des milliards de questions qui se bousculent en même temps dans ma tête. Là, il n’y en a qu’une seule. Juste une, mais la réponse pourrait bouleverser tant de choses. Je tente de faire le vide, je prends une profonde inspiration et je me lance.

= commentaires =

yo²
salut    le 06/07/2003 à 16:15:33
asv ?
draz
    le 06/07/2003 à 18:33:25
heu tu baises?
Freudon
Bravo !    le 07/07/2003 à 23:14:17
Pas d'accord du tout avec le texte de présentation.
C'est un des meilleurs Névrotica et de loin...
Le style, les mots, la cohérence de la lutte intérieure et finalement le saut dans l'inconnu.
MAGNIFIQUE, de la grande Tulia.
Clax
....    le 08/07/2003 à 10:42:55
Bien! mais je reste sur ma fin...
Lapinchien

tw
Pute : 3
à mort
    le 08/07/2003 à 11:56:39
c'est quand même sympa une personne atteinte de trouble obsessionnels compulsifs... surtout pour pas se faire chier à faire la vaisselle.. y a qu'a la persuader que l'un de ses proches va mourir si elle ne se jete pas de suite sur la spontex et le paic citron et qu'elle ne recure 23 fois de suite tous les plats sals... n'empeche çà peut servir à plein d'autres trucs un toqué comme par exemple à aller chercher la baballe... c'est plus marrant qu'un chienchien... ben ouais pasque s'il va pas la chercher ben forcement un de ses proches va mourir... entrainez vous à etre persuasif aupres d'un toqué: vous verrez c'est facile et vous aller progresser rapidement et meme pourquoi pas briguer un jour le poste de conseillé communal !!! toi aussi adopte un toqué c'est trop cool !
    le 08/07/2003 à 12:09:49
J'aime bien le paragraphe "J’ai l’impression" qui est super bizarre, le reste, y a beaucoup d'auto-apitoiement, ce qui est pas illogique mais un peu ressassé maintenant, et puis l'autre problème c'est que dans les autres Nevrotica en général, on se tient à un problème et on l'exploite à fond, là ça part dans plein de directions.
nihil

Pute : 1
void
void    le 08/07/2003 à 12:39:50
C'était nihil au dessus
Tulio
non pas "tuyau"    le 09/07/2003 à 11:23:14
moi je me demande si c'est normal cette marotte de caser le mot ANNIHILER dans chaque texte ici ?
sans doute un private joke entre vous, j'imagine.
ce texte est remarquable et la petite contine fait froid dans le dos, ce qui est bienvenu par 35°
vivement névrotiK7
y'a-t'il un DVD de prévu ?
un coffret collector ?
des bonus, des T-shirts, des cartes postales, des posters, des séances de dédicaces, peut-on toucher les seins de Tulia ?
Arghhh je m'égare... vite un névrotica 500mg
Cep
Bravo!    le 09/07/2003 à 16:59:08
picdr! excellent ton article mon nichon

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