LA ZONE -

Reporter du dimanche / tempête dans un verre d’eau

Le 16/02/2008
par Omega-17
[illustration] « Faut que je prenne des notes tout de suite, pas moyen que je laisse passer ça. »
C’est ce que je me suis dit immédiatement après avoir trouvé mon but dans la vie. Cinq minutes plus tôt, je m’emmerdais comme un rat mort en essayant de remplir une tasse de whisky au maximum sans que ça déborde et d’un coup, j’entends Chazal qui annonce avec tout le sérieux dont elle est capable :
« Inquiétude en haut lieu : Le sous-marin nucléaire français ‘L’intrépide’ n’a plus signalé sa position depuis maintenant une quinzaine d’heures, selon les sources de l’Etat-major de la Marine Nationale. Un évènement qui ne manque pas d’alimenter les rumeurs de toutes sortes puisqu’il effectuait des exercices de manœuvre au large des Bahamas, au cœur du célèbre ‘Triangle des Bermudes’. Nos envoyés spéciaux… »

Première réaction mentale : « On peut écarter d’entrée l’hypothèse du vol, personne ne détournerait du matériel français. Ca fait quatorze heures qu’il a coulé ton berlingot, ma vieille. »

C’est vrai, j’ai toujours été un petit con cynique et ça m’a souvent desservi dans mes rapports avec les gens ; fort de ce constat, j’ai décidé de ne pas changer. Décision elle-même très conne et relativement cynique, ce qui me fait dire que j’arrive à très bien faire coïncider ma nature et mes actes. Quoiqu’il en soit, ma vie a changé en regardant le vingt heures, ce jour-là. Et je suis devenu absolument fou, j’en suis à peu près convaincu. On me l’aurait prédit, je ne l’aurais évidemment pas cru : je peux croire n’importe qui à condition qu’il soit plus charismatique que moi. En conséquence je ne crois en rien ni personne. Il est donc également à noter que ‘prétentieux’ se greffe naturellement aux précédents qualificatifs de ‘con’ et de ‘cynique’.
De remarquables qualités que je dois à mon père, tristement décédé il y a deux mois, le jour où j’avais entrepris de m’inscrire dans un club de badminton en plus, je m’en rappelle parfaitement. C’était plutôt marrant d’ailleurs parce que le responsable était en train de me demander quel était mon niveau quand j’ai appris sa mort par téléphone. A la fin du coup de fil, il s’est passé quelque chose de grand, ça venait d’une autre dimension : le survêt déguisé en type m’a demandé « Alors ? » et là, tout en fulgurance, je me suis entendu répliquer « Ouais, c’est bon ». Parachèvement de cet instant magique, je l’ai vu inscrire sur sa feuille quadrillée en face de mon nom : ‘Bon niveau de base’. Quand vous avez vécu des moments comme celui-là, vous pouvez crever tranquille.
Pourtant j’étais toujours là, bien campé sur mes deux pieds. Et heureusement, parce que casser sa pipe au moment où on décroche six millions net après droits de succession, franchement, ça m’aurait foutu les boules. Ouais, l’immobilier basque avait bien rapporté apparemment. Mon père, lui, n’avait jamais fait de badminton et finalement, j’ai pensé que ce n’était pas très important. Aujourd’hui, je dois être le seul con-cynique-prétentieux ‘vénal’ ( rajout à la liste, de par le fait ) du quartier à payer un abonnement annuel au club sans avoir jamais touché une raquette. Et je m’en branle royalement.
C’est dans ce contexte que Claire et son brushing ou thermobrossage de folie entrent en jeu. Faut dire que depuis que j’avais pulvérisé tous les records d’ingratitude en gagnant le jackpot sans même me pointer à l’enterrement et en appelant le notaire toutes les vingt-quatre heures pour savoir si ‘ça avançait ou quoi, bordel’, je m’étais servi de l’argent uniquement dans des conneries. Là-dessus, je ne peux pas prétendre le contraire : une dizaine de costards à deux milles euros pièce quand on reste en calebar toute la journée, ça ne sert à rien. La Lamborghini quand on n’a pas le permis c’est différent parce que le soir, j’aime bien descendre au garage pour fumer côté conducteur. Par contre, acheter un loft à Lyon pour être plus près de Gerland, c’est complètement abruti : il pleut un jour sur trois et le challenge sportif local, maintenant, c’est de se qualifier pour l’Intertoto.
Si ‘L’intrépide’ ne l’avait pas été autant, je serais sûrement en train de choisir un balai à chiottes plaqué or dans un magasin haut standing en ce moment, tellement je ne savais plus quoi faire de tout ce blé. Dès la fin du reportage qui démontrait, si c’était encore nécessaire, le ridicule d’être français, j’avais compris deux choses :
- Que Ulysse Gosset s’était étouffé avec sa barbe parce que ce n’était pas lui en direct de Miami.
- Et que j’allais utiliser mon fric pour voyager à travers le monde.
A cet instant précis, j’ai décidé que ça allait être mon occupation première, ma charge envers l’humanité : j’allais choisir une destination par mois - n’importe laquelle pourvu qu’il s’y passe quelque chose -, m’y rendre une semaine, jouer au reporter du dimanche en écrivant mes impressions et revenir à ma vie de branleur jusqu’au mois suivant. C’était lumineux.
Par contre, ça me faisait de la peine pour Ulysse : je l’aimais bien, moi.
De toute manière, le reportage avait déjà opéré chez moi le déclic irrémédiable : la folie totale m’avait atteint de plein fouet et je peux vous dire que c’est une drôle d’impression, je ne sais pas, j’essaye de vous trouver une comparaison qui vous siérait, bon, disons : comme si vous étiez téléporté brutalement de votre salon à un stand de tir avec quinze types en face de vous qui viennent d’épauler leurs FAMAS. Mais vous savez qu’aucun fusil n’est chargé. Alors que tous les autres le croient.
En gros.

Un vol pour Nassau ne s’improvise pas, principalement un mercredi à vingt heures trente lorsque le passager potentiel est à moitié bourré, tout fier d’avoir enfin un cap à appliquer à son existence et qu’il s’aperçoit soudainement qu’une valise serait un achat judicieux afin de mener à bien une telle entreprise. A ma connaissance, personne ne vendait d’artefacts de ce type à une heure aussi indue, alors à Lyon, vous pensez bien.
En revanche, j’avais tout le reste : un ordinateur portable qui allait souffrir mes observations du cru une fois sur place, des chemises hawaïennes genre Raoul Duke et Docteur Gonzo, un passeport presque lisible et la tête de sconse petit format qui l’accompagnait, les lunettes de soleil Police pour crier Roxanne évidemment, le bob en jean pour un look beauf total et le Canon numérique pour immortaliser mes pièces à conviction et autres crabes de terre susceptibles de me renseigner pendant mon enquête. Autant dire que j’avais la panoplie complète du mec qui allait se faire goinfrer son portefeuille dès le premier jour. « Pas grave, du fric j’en ai plein ».
Une rapide consultation du net m’apprit que j’allais devoir attendre deux jours avant de pouvoir enrichir les escrocs bahaméens et de faire connaissance avec la faune du coin, ce qui me plongea dans une profonde tristesse puisque j’allais encore avoir toutes les difficultés imaginables à combler cet espace-temps. Je l’ai donc divisé en quatre segments de douze heures chacun, répartis comme suit :
- Lire sur la Toile le témoignage d’une famille qui avait osé rallier l’archipel en voilier.
- Composer des numéros de téléphone au hasard pour parler de mon projet.
- Lancer du papier en boule dans la gouttière de l’immeuble d’en face.
- Et plier mes chaussettes sport sous forme de losange dans ma nouvelle valise.
Je dois dire que ce fut éprouvant, surtout à cause du boudin peu flexible qui est au bout mais enfin, j’y parvins. Je dis adieu à chaque objet du salon, ce qui sembla les toucher sans les émouvoir plus que de raison. Mon briquet lampe-torche fut le plus expressif de tous : il alla jusqu’à m’éblouir d’un halo bleuté qui m’accompagna vers la porte d’entrée, m’auréolant ainsi à la manière d’un dieu aquatique. Un signe de tête et je m’engageai dans le corridor : ma sortie fut humble et discrète.
Le taxi se propulsa à vitesse correcte vers la zone aérienne acceptable la plus proche - Charles-De-Gaulle car les hôtesses ont le teint fade sur les vols intérieurs -, son propriétaire m’épargna les considérations météorologiques mais perturba ma symbiose environnementale par des questions concernant ma destination. Je lui ai expliqué en détail ce qui m’amenait à prendre un avion pour Mogadiscio, les enfants, la famine, les épidémies, mon rôle capital de pousseur de brancards dans tout ce merdier et autres stupidités. Il fut ravi et me ficha la paix sur les derniers cent mètres. En sortant, je lui ai quand même dit que c’était faux et j’ai vu de la méchanceté dans son regard, un demi-millier de kilomètres l’avait rendu agressif. « C’est bon, je vais la sortir tout seul du coffre, ma Samsonite, vous énervez pas… »
Susceptible, ce taxidermiste.
L’accueil a été chaleureux, à mon arrivée : les portes automatiques du hall honorèrent ma présence en devenant manuelles. Après un bref regard de reconnaissance, je pénétrai dans l’enceinte, notai l’escale prévue à La Havane et engageai la conversation avec un Times posé négligemment sur un banc de la salle de transit. S’exprimant dans un anglais irréprochable, je ne saisis que peu de choses de son monologue pourtant très développé mais néanmoins entrecoupé de parenthèses commerciales hors de propos. Désemparé par son excentrisme, l’appel des voyageurs au micro me sauva de ce mauvais pas.
Les cacahuètes étaient trop salées, la vodka minimaliste, l’atmosphère tiède, les chariots trop larges et les couloirs trop étroits : même en Business, pas moyen d’être considéré avec déférence. ( ‘chiant’, à l’inventaire ). Je suis allé vomir sans me faire repérer dans la cafetière du personnel de vol pour marquer mon insatisfaction. La lecture de mes instructions confidentielles de mission, incarnées par la marche à suivre en cas d’amerrissage forcé, m’arracha un sourire de contentement : il y aurait de l’action avant même Cuba. Ma boîte de cure-dents était passée sans encombre au contrôle pré-embarquement et je profitai de cette aubaine pour arracher quelques morceaux de moquette à l’aide de ceux-ci autour de mon siège, le C-08. Mon voisin de gauche, au-delà de la rivière sacrée, finit par remarquer mon petit manège et appela du secours : je fis mine de me gratter le bras avec la pointe en bois mais il témoigna de façon circonstanciée, cet enculé. On me confisqua l’étui et les armes de destruction massive. Dès que nous fûmes de nouveau seuls, je sortis violemment celui que je camouflais encore malicieusement dans ma bouche et l’agitai sous le nez du sinistre délateur. Il secoua la tête d’un air de mépris et changea de place : ma victoire était incontestable.
A mon hublot, il y eu une moyenne de huit nuages à la minute pendant la première heure. Par la suite, j’ignore ce qu’il se passa, trop occupé que j’étais à guetter l’ouverture des toboggans jaunes. A mi-chemin de La Havane, je décidai d’interroger le pilote sur le moment qu’il allait juger adéquat pour sonner l’heure de la baignade. On m’en interdit fermement et par on, je veux bien sûr évoquer les mêmes bouffons qui m’avaient déjà démuni de mes carreaux d’arbalète miniaturisés. En infériorité numérique, je me repliai stratégiquement dans le but de fomenter un plan secondaire qui me permettrait de communiquer avec le directeur du bâtiment volant. J’ai bien envisagé de contourner l’obstacle par l’extérieur mais l’aile me sembla glissante. J’entrepris donc de dévisser la petite tige métallique bombée qui maintenait le revêtement au sol afin d’y fixer un message écrit que j’allais faire passer sous la porte donnant accès au cockpit, passant de cette manière inaperçu.
J’avais encore trois heures devant moi pour éviter le pire. Ensuite, ce serait trop tard.
Et l’aéroplane pour Nassau n’attendrait pas, lui.

J’en étais à ma douzième vis et je commençais déjà à dégager un bon morceau de tige de cinq/six mètres : il fallait que je passe à l’action rapidement parce que le sinistre délateur ou n’importe quel autre crétin aurait pu donner l’alerte même si je faisais ça furtivement, à quatre pattes sous un siège et en utilisant mon dernier cure-dents qui commençait d’ailleurs à s’émousser. J’arrivais à la phase déterminante où il fallait casser l’extrémité de la tige, je ne pouvais décemment pas ôter la barre sur toute la longueur de l’appareil. Même si l’envie ne me manquait pas. Je me mis à taper du talon par petits à-coups en espérant la faire céder mais je n’obtins en guise de résultat que le retournement agacé du sinistre délateur qui me fixa avec un œil très rond. Là encore, j’optai pour la feinte en imitant celui qui vérifiait la bonne solidité du plancher. Je considérais ma prestation comme étant convaincante dans la mesure où c’était inexact mais cela ne suffit pas : il se leva en ma direction. « Alors là, suspens, mais il va venir pour me dire une ânerie, lui, je le sais déjà... »
Et vlan, j’avais raison, dis donc : « Vous êtes fou ou quoi ? Qu’est-ce que vous cherchez à faire là, je vais appeler le commandant de bord ! ».
Je suis incapable de vous expliquer clairement pourquoi je lui ai répondu : « Vous êtes aussi bête qu’un toboggan, retournez vous asseoir immédiatement ou je vous éjecte par-dessus bord ! Cette tige est primordiale pour moi et vous, vous n’êtes qu’un âne dans un sale toboggan.»
Là, je peux vous dire que ça l’a choqué. Il a reculé doucement en mesurant bien ses pas, moi j’étais prêt à me jeter sur ses mocassins au moindre geste brusque. Mais il est resté calme. Moi aussi d’ailleurs parce que suite à cette deuxième victoire, les voleurs de cure-dents m’ont attaché au mini-frigo de service avec un drap et on est arrivé à La Havane comme ça. Ils ont refixé la barre devant moi pour bien me faire comprendre qu’il n’y aurait pas de toboggan cette fois-ci. J’étais contrarié et puis j’ai dormi en rêvant de L’intrépide et de Nassau.
Concentré sur les sons et les vibrations que je percevais, je gardais les yeux fermés pour surprendre mes adversaires ; j’avais bien saisi qu’ils ne m’aimaient pas à cause du coup de la cafetière et je comptais bien leur échapper. Grâce à l’humidité provoquée en léchant le drap, ma main coulissait mieux dans le nœud et dès que l’hôtesse ouvrit la porte, je bondis en avant vers la lumière. J’ai exécuté une roulade arrière jambes écartées dans le tunnel en accordéon par pure provocation et je suis parvenu dans le hall. Après, facile : je me suis fondu dans le flot humain en faisant semblant de marcher normalement. Je me suis d’ailleurs arrêté pour regarder les publicités sur les panneaux en trigones changeants, pour plus de crédibilité, mais à un moment donné ça m’a vraiment intéressé : une compagnie aérienne proposait des destinations vraiment accessibles financièrement. « Du fric, j’en ai plein et puis je dois trouver le sous-marin ».
Ma correspondance était dans une heure quarante et les sinistres délateurs/voleurs l’ignoraient : ils me chercheraient dehors, pensant que je cavale comme un fou. Alors que non : j’étais à cinquante mètres de la sortie du tunnel où j’avais fait de la GRS, dans un tabac/journaux duty free. J’ai pété en lisant un journal espagnol quand ils sont passés devant en disant n’importe quoi dans leurs talkies-walkies juste pour faire les malinois, de petits bergers belges à poils courts fauves.
Le deuxième vol fut catastrophique : pas de Business, contraint de me mélanger avec les Première Classe, j’étais mal à l’aise. L’un deux allait peut-être s’exprimer dans un dialecte barbare en se frottant le torse, je n’en savais rien. Je gardais mon cure-dents à portée de main. C’était un petit avion avec des ailes d’hélicoptère et un seul ruisseau à l’intérieur. Les gens de l’autre rive ressemblaient moins à de sinistres délateurs. Je me suis éclipsé quelques minutes après le décollage pour dessiner des myriapodes au savon sur la glace des toilettes. J’ai pris une photo avec mon crabe de terre numérique et je suis revenu à ma place, comme si de rien n’était et rien n’était, donc j’étais serein. Ma demande pourtant légitime de visionnage cinématographique fut rejetée. Motif : la brièveté du vol. En conséquence, j’ai effectué un mime de deux minutes au milieu du courant pour divertir les passagers. Une interprétation énergique et toute en allégories des rituels amoureux chez les nénuphars qui eut un succès controversé, mais qui ne l’est pas de nos jours…
Etrange mais les sabots en terre cuite que j’avais troqués contre ma montre à quartz à un revendeur pressé durant l’escale cubaine ne furent pas mouillés pour autant : on ne m’avait pas dupé sur la qualité. Avant que le bimoteur n’accentue sa descente vers Nassau, j’avais déjà réussi à maintenir sept flacons de cocktails d’agrumes de cinq centilitres dans une configuration pyramidale de surélévation délibérée, tour de Babel qui fut rapidement détruite par une manœuvre très orthodoxe de l’iconoclaste pilote. Cela m’était égal en un sens, je me savais capable de faire largement mieux.
Suite à l’atterrissage que je n’applaudis pas, je m’extirpai de cet appareil saugrenu en glissant à l’oreille du pope qui se tenait justement là : « Sur un Paris-Belgrade, j’ai réussi avec douze, alors vous savez… »
Il saisit parfaitement mon allusion et m’adressa un sourire complice auquel je répondis par une flexion du genou droit : j’avais mis tout le monde d’accord et mon statut était respecté, voilà qui était sain.
Je me dirigeai prestement en direction du hall de récupération des valises en marchant uniquement sur les carreaux en diagonale puisque exercer une pression sur deux carrés consécutifs en droite ligne aurait pu me donner mauvaise réputation. Et je tenais à effectuer mes recherches sur ce territoire étranger incognito. Il était environ dix-huit heures, heure locale, quand j’ai sauté à pieds joints sur le tapis déroulant en évitant les sacs qui fonçaient sur moi. J’aperçus ma Samsonite qui déboulait juste derrière un Quechua et un gros Vuitton. C’est grâce à un pas chassé et à une rotation jetée que je pus me saisir de mon bien. De retour sur la terre ferme, personne parmi les autres passagers ne crut bon de me féliciter pour ma prouesse athlétique : des envieux/grincheux, encore…
Je hélai un véhicule de transport tarifé en émergeant à l’extérieur de l’aéroport ; le taux d’humidité était inconcevable : une bite de nègre kilimandjaresque aurait ramolli en moins d’une minute. La reproduction bahaméenne était un mystère de plus dans ces conditions. Décidément, cette contrée ne recelait que ça.
L’indigène au volant de sa Mercedes me conduit au cinq étoiles le plus proche sans poser la moindre question, décevant parce que j’avais une nouvelle histoire à la con très bien construite à lui sortir. Arrivé au Graycliff Deluxe, ma Samsonite fut prise en charge et on me convia à une désaltération de bienvenue. Le bar de l’hôtel était rempli de sinistres délateurs et de bonnes grosses putes locales à qui on avait mis des tailleurs Chanel. Néanmoins, la mentalité me plaisait. Je commandai un grand Wild Turkey pour marquer ma dissociation éthylique : client mais pas pigeon, je ne bois que du bon. Nouvelle devise.
Un coup de Platinium et ma suite était devenue ‘fin prête’. Avant ça, elle était ‘en préparation, Monsieur, veuillez nous excuser pour ce désagrément’. Ce qui n’est pas une qualification correcte pour une chambre. Je suivis le groom qui poussait son chariot doré jusque dans l’ascenseur et je profitai de l’occasion, afin de tester ses capacités à faire autre chose que porter un uniforme absurde, en lui demandant l’origine sémantique anglo-saxonne du terme francophone par déformation ‘liftier’ puisqu’il occupait selon toute apparence ce poste. Le ‘Désolé, je l’ignore Monsieur’ m’outra profondément. La réponse était d’ailleurs d’une simplicité absolue et je fus consterné par son inaptitude. Pris de panique, je frottai frénétiquement ma Platinium sur son crâne mais cela ne changea en rien son discours. Il n’y avait rien à faire : il s’habillerait en rouge toute sa vie. « Ce prototype ne fonctionne pas, mieux vaut ne pas lui adresser la parole, il pourrait m’électrocuter, vil comme il est. »
Ma suite me convînt dès le premier regard mais je sentis que l’incompétent d’ascenseur attendait quelque chose de moi. Je fis donc rapidement demi-tour pour lui serrer la main tout en lui conseillant d’acheter un dictionnaire dans les vingt-quatre heures. Il sembla mécontent et m’adressa un ‘Merci Monsieur et bon séjour’ qui sonnait comme une machine à coudre en refermant la porte. Je sentais bien qu’entre nous, un contentieux resterait figé à tout jamais. Tant pis : quand on fait liftier, on doit au moins savoir que ‘lift’ signifie en anglais ‘bateau-mouche’. Sinon, autant faire reporter du dimanche, c’est plus gratifiant.
Ce voyage depuis Lyon m’avait exténué cependant j’avais décidé d’être en pleine forme. Et je l’étais. Il me fallait à présent transformer cette suite en centre de commandement afin d’être opérationnel pour ma première journée d’investigation, dès le lendemain matin. Je découpai soigneusement un rectangle de dessus de lit d’un format soixante/quarante que je placardai avec du ruban adhésif sur la porte donnant accès à mon repaire. Depuis le couloir, j’observai l’inscription que j’y avais apposée et elle me parut adéquate : « Soyez bref et factuel, triple buse ! »
Le fait que ce message soit signé ‘Général Manivelle’ produisait une intensité dramatique et un sérieux qui me satisfaisaient pleinement. Je suis allé sur la terrasse observer la mer, comme le ferait n’importe quel crétin qui n’a jamais vu d’eau salée. J’ai commandé deux sandwiches au saumon fumé : un pour moi, un pour les mouettes. Ensuite je me suis au travail : j’ai déployé ma carte des Bahamas sur le lit et j’ai commencé à méditer sur la stratégie à mettre en œuvre pour y voir plus clair dans cette histoire. Je compris qu’il me manquait un élément essentiel avant de pouvoir passer à la phase d’approche : un guide des sous-marins. Au room service, ils n’en avaient pas et cette aventure commençait à se corser, c’était peu de le dire.

« J’irai me renseigner plus tard, j’ai le temps, allons tester le folklore gastronomique de cet établissement douteux. »
Le saumon ne me réussissait pas, les mouettes boudaient et mon estomac appelait à la vengeance suite aux dernières insultes aériennes en matière d’éléments consommables. Direction le restaurant panoramique, douzième étage ; je jubilais : j’allai pouvoir inaugurer ma grille d’évaluation de voyage préparée sur Excel. Je ne vis pas la toque rouge en prenant le cube motorisé : il avait fui sans doute, blessé à mort dans sa fierté de petit canari peint à la main. A l’entrée de la cantine, on m’agressa de façon cavalière : « Bonsoir Monsieur, et bienvenu au Graycliff’s Circle. Malheureusement, j’ai bien peur que vous ne puissiez entrer avec vos sabots, cependant nous allons vous fournir des chaussures de ville, elles sont très confortables. » Encore un sinistre, son irrespect méritait une sanction que je lui administrai sur le champ : « Ecoutez, mon petit vieux, je porte le fruit de l’artisanat cubain et il vous faudrait une centaine de ces plateaux-repas que je vois défiler là-bas pour en acquérir la moitié d’une paire. Ils sont signés Juan-Carlos De La Puña. » Cet abruti m’a cru et s’est confondu en excuses ; je commençais à apprécier la tournure que prenaient les choses.

Ma table était collée à la baie vitrée évidemment, c’était la seule position acceptable. « Sinon autant aller bouffer à la cave. » Quand j’ai rappelé cette évidence au serveur qui voulait me placer en milieu de salle, j’ai discerné chez lui un amusement léger et j’ai trouvé ça admirable parce que ça allait m’éviter de payer trois lascars du centre-ville pour le faire enterrer sous la plage avec trois balles dans le ventre. « Très bien, je vous amène la carte et votre bourbon. » Gentil garçon. Je lui ai préparé un petit pain de la corbeille avec du beurre pour son retour, j’étais sûr que ça le toucherait et puis en fait non. Déçu, j’ai sorti mon HP et ouvert mon fichier ‘Notations/Nassau’ : dans la colonne Hôtel et à la ligne Accueil j’ai mis 13 pour les pouffiasses, pour le Bar 11 à cause du tabouret trop haut et concernant la Chambre 14 parce que j’étais bien orienté et qu’il y avait des chaînes pornos sans Pay-TV. J’ai placé mon curseur sur Restaurant et j’ai profité de l’instant en regardant autour de moi, puissant que j’étais.
Le moment des sentences est arrivé, l’ensablé potentiel les enfilait comme des déclarations de guerre : « Foie gras marbré aux figues et sa farandole de morilles », « Langouste Graycliff avec sa rouille maison et ses croûtons à l’ail », « Mousseline de grits et de plantain à la Caraïbe », « Banquise de tiramisu au nectar de papaye » et autres absurdités d’orateur d’opérette.
Pour chaque nouvelle introduction, j’applaudissais entre deux prises de notes sur l’ordinateur. Fin malinois pure race et meilleur que certains, j’avais préparé ma contre-attaque pour le dernier service : « Note à trois chiffres et sa coupelle d’argent accompagnées de la friandise chocolatée statutaire ». J’allais me plaire ici, c’était certain.

J’attaquai la journée suivante sous les meilleurs auspices avec une douche froide en état d’hyperventilation qui déploya toute ma foi en l’entreprise qui était mienne ; en sortant de ma suite, j’étais monté sur des ressorts et je priai pour ceux qui croiseraient ma route de pèlerin. Il me fallait agir en reporter appliqué et mon premier acte journalistique sensé fut de grimper à un cocotier du parc afin de vérifier si l’expression était surfaite. Et en effet, elle l’était. Ce qui ne réglait pas l’énigme de L’intrépide, d’où ma réorientation vers le noyau central de cette capitale atypique. Depuis la veille, je sentais que ma démence devenait dégénérative et qu’en conséquence, un afflux supplémentaire serait bénéfique. Tout était parti du journal de vingt heures : il me fallait donc un bulletin d’informations rapidement sans quoi cette opération allait tourner au voyage d’agrément. Ce qui n’était pas envisageable. A la terrasse d’un café, la presse écrite bahaméenne fit mon affaire tout en me faisant monter la mayonnaise aux oreilles :
« Worries for lost French submarine. Local authorities ask assistance of US Navy to find its nuclear weapons and environmental organizations rise up against military incompetence. Nowhere, Intrepide’s incident represent another blunder which disservice French government’s credibility.»
Ca ne se passerait pas comme ça, j’étais sur ce dossier, pas moyen qu’on me coupe la marijuana sous la botte. Les pains ronds avec steack-salade-tomate ne me voleraient pas l’exclusivité, j’avais la priorité et ça allait se savoir. Pour la peine, j’ai repris un lait secoué au cointreau : un lyonnais n’abdique jamais.

Je suis rentré au Graycliff en furie, tout en faisant de petits bonds. Le standardiste a tout de suite vu qu’il risquait d’être empalé sur une plante verte de l’entrée s’il ne trouvait pas les bonnes réponses. J’ai demandé l’adresse de l’ambassade américaine et il me l’a donnée sagement, dommage. Dans les faubourgs de Nassau, je suis tombé sur un petit commerce ultranationaliste qui vendait des T-shirts ‘Bush fucks my country, I fuck his’. J’en ai pris trente et je les ai distribués sur le chemin. J’étais à cinquante mètres du but et il m’en restait encore une bonne vingtaine alors j’ai cherché des Ford et des Chrysler garées sur le bas-côté et je les ai étalés sur les pare-brises. J’en ai mis cinq sur moi et avec le dernier, je me suis fait un bandana.
Le vigile sous le drapeau n’a pas bronché quand j’ai escaladé les marches en jouant à la marelle, il savait que le combat serait trop inégal. A l’intérieur, il y avait une femme derrière un bureau, sous un énorme macaron en cuivre ‘In God we trust’ : j’ai pensé que ça devait être l’accueil. Je me suis décalé pour profiter du phénomène d’aspiration et j’ai doublé le cap tel un cyclone antillais en me dirigeant vers les escaliers qui donnaient accès aux locaux administratifs. En passant devant, j’ai dégainé ma carte du club de badminton en disant : « John Moriarty, Intelligence Service. I’ve an appointment with Edward Cane, I’m hurry. » J’étais tellement fier de ce calembour que je n’ai pas vu le second garde qui me sautait dessus par la poupe : j’avais réussi à gravir une demi-douzaine de marches quand même, ils étaient bien emmerdés maintenant.

La cellule de l’ambassade était sommairement équipée. Néanmoins, j’avais vu plusieurs fois ‘Midnight Express’ et ‘Les Evadés’ et ça, les sinistres du Far West l’ignoraient totalement. J’avais seulement besoin d’un taille-pierres et d’une quinzaine d’années pour marcher sur les traces d’Andy Dufresne. Et là, je les aurais bien eus. Mais ces cons n’avaient aucun respect pour le cinéma, ils ont fait venir un avocat français qui est arrivé le lendemain, il était très enthousiaste en plus : « Votre cas est complexe ». Je l’ai viré au bout de cinq minutes, il m’ennuyait. J’ai demandé un juriste espagnol, juste pour les faire chier, des fois qu’ils voudraient espionner nos conversations. Je ne comprenais pas l’espagnol de toute manière et ça non plus, ils ne le savaient pas. En moins de quarante-huit heures, j’avais déjà évité les pièges les plus grossiers qu’ils m’avaient tendus. A mon avis, ça devait les rendre malades et moi, j’étais bien content.
Le troisième jour, on m’a demandé quinze mille cinq cents dollars dans le cadre d’un règlement à l’amiable pour recouvrir la liberté et les caisses de la bannière illuminée : le garde avait porté plainte pour coups et blessures parce que je lui avais mordu le doigt et apparemment, ça s’ajoutait aux délits de tentative d’intrusion dans un lieu officiel sans accréditation et de rébellion envers un fonctionnaire gouvernemental. J’ai répondu que je n’avais jamais été aussi libre qu’aujourd’hui et que s’ils me fournissaient un taille-pierres avec un poster de Madonna, j’allais vite le leur prouver. Ma requête a été ignorée. Auréolé de toute la gloire que cette saillie comportait, je suis rentré dans ma cellule en regrettant la confiscation de mon crabe de terre : la lucarne offrait un angle de vue exceptionnel, j’aurais pu prendre des clichés surprenants.

« L’intérêt d’une cellule se dégrade après quatre-vingt seize heures d’habitat. » Mon constat était sans appel : je contactai ma banque et je virai la somme. Je savais bien que j’allais me faire goinfrer du blé en venant dans ce secteur du monde mais j’avais tenu presque cinq jours tout de même, c’était supérieur de quatre lunes à mes prévisions ; je décidai d’arrêter de me sous-estimer. Vers dix-sept heures trente, je sortis de l’ambassade encadré par deux flics : j’avais marqué les esprits en chantant « On va s’aimer » de Gilbert Montagné chorégraphie incluse pendant toute l’après-midi, ce qui m’avait permis de gagner une demi-heure sur l’horaire décidé par Washington.
Ce pays était toujours aussi humide. 'L’intrépide' avait besoin de moi et on me mettait des perches dans les jantes. Décidément, mes ambitions gênaient en haut lieu, difficile de prétendre le contraire dorénavant. Je devais trouver une planque et partir à la recherche du chalutier immergé et le plus tôt serait le mieux. Plusieurs théories se bousculaient dans ma tête : les américains s’étaient peut-être rendus maîtres du bâtiment français et voulaient se servir des plans pour construire des berlingots perméables en masse pour leurs recherches en matière d’assouplissant ? Ou alors c’était plus grave et dans les coulisses du pouvoir, on cherchait à escroquer les chinois en leur revendant des copies de L’intrépide ? Ou encore plus dramatique : L’intrépide n’avait jamais existé puisque la France n’avait jamais construit de bateaux pour entrer en contact avec les calamars géants des abysses et l’Elysée voulait se débarrasser du problème en montant de toutes pièces une disparition avec la complicité de la Maison Blanche qui n’avait pourtant rien à faire dans cette hypothèse ?
Il fallait partir du principe que tout cela était possible et réduire le champ des investigations au fur et à mesure. J’annulai mon séjour au Graycliff et pris une piaule merdique dans le centre-ville : la discrétion était désormais le seul mot d’ordre. Il n’y avait qu’un français pour contrecarrer le plan fomenté contre L’intrépide ou l’inexistence d’intrépidité : il était lyonnais et à cet instant précis, il fumait un cigarillo, assis en tailleur sur le bitume, à un carrefour de Nassau. Et ça, c’était très mystérieux.

Je me suis levé d’un coup : à force de méditation, j’avais trouvé la faille dans le système, ce qui mettait du plomb dans l’aile à toute cette machination. Pile au moment où une vieille Chevrolet klaxonnait en refusant de m’écraser ; les bahaméens ne savent pas faire ce genre de choses. Une fois debout, j’ai observé mon reflet dans le capot, singé le faciès du poisson-lune à l’adresse du pleutre conducteur et j’ai regagné le trottoir, satisfait d’être parvenu au bout de ma réflexion.
Toute l’attention se portait sur le sous-marin finalement, tout le monde s’inquiétait à son propos, s’excitait pour savoir ce qui avait bien pu se passer à plusieurs centaines de mètres de profondeur pour qu’il ne donne plus de signal et c’était justement là que le bât blessait : L’intrépide n’était plus dans l’eau depuis longtemps. Et avec les tireurs de ficelles, j’étais le seul propriétaire de cette information capitale : ça allait swinger dans les salles de bal.

« Les solutions les plus simples sont souvent les plus stupides. » Jusque-là, j’étais d’accord avec le principe de base. Une solution simple serait une panne de radio, si l’on considérait la problématique de L’intrépide. Solution stupide puisque tout individu clairvoyant sait que les transmissions se font par satellite sur un sous-marin nucléaire et lorsqu’un satellite est déficient, il signale cette déficience en battant de l’aile, comme le ferait n’importe quelle libellule ou autre moucheron, qu’il soit spatial ou non. Et personne n’avait évoqué quoi que ce soit d’approchant jusqu’ici.
Donc rien à voir avec la communication.
Ce pouvait être aussi une voie d’eau qui avait mal tourné suite à une collision avec un minéral, un animal ou un second sous-marin. Non-sens multiples encore une fois puisque les minéraux ne poussent pas dans la mer, que les baleines ne s’accouplent jamais à proximité de Cuba par affinité politique et qu’aucun submersible au pavillon étranger ne naviguerait dans les mêmes eaux qu’un bâtiment français, réputation oblige.
Donc pas d’accident envisageable, d’aucune sorte.
Restaient le sabordage pour cause indéterminée, la mutinerie déjà plus compréhensible, l’enlèvement mais sans rançon officielle ou encore, et c’était bien sur cette hypothèse que toutes mes déductions s’étaient focalisées, une raison plus… transactionnelle.
'L’intrépide' ne pouvait pas être un bâtiment de guerre car si c’était le cas, nous aurions déjà perdu, c’était un fait indiscutable. Sa seule raison d’être était qu’il servait probablement de couverture à un commerce : sinon pourquoi autant d’exercices de manœuvre, pourquoi autant d’allers-retours d’un continent à un autre, pourquoi autant de mystère autour de ses activités… ? Toute la question était de savoir quelle était sa nature et de là, je remonterais jusqu’aux destinataires et donc à la localisation du sous-marin. La drogue et les armes étaient à exclure : plus personne ne se cachait à ce sujet de nos jours, les colombiens et les tchétchènes ne construisaient pas de submersibles, c’était bien la preuve qu’il fallait chercher ailleurs.
L’intrépide était en cale sèche, pas loin d’ici, là où personne ne le chercherait, et déchargeait sa cargaison, comme d’habitude. On entendrait la nouvelle de sa récupération quelques jours plus tard aux infos, on calmerait les foules avec un prétexte technique tel qu’un problème de voilure et tout rentrerait dans l’ordre… jusqu’à la prochaine livraison. Un lyonnais venait de mettre le doigt sur une supercherie qui datait peut-être de plusieurs décennies : ça méritait bien le coup du poisson-lune et un petit pas de breakdance, non ?

Je suis rentré dans ma nouvelle piaule après être passé au cinéma du coin : on y diffusait un film hongrois sous-titré en français intitulé « Le panier de cèpes », un chef-d’oeuvre du néo-réalisme avec des effets de caméra très fulgurants. L’histoire se passait en Ukraine, je crois. A un moment donné, le personnage central était opposé à un petit vieux qui boitait au cœur d’une joute verbale de haute voltige qui trouva sa relative conclusion dans la saillie terrifiante de l’infirme : « C’est une mauvaise valse, alors arrêtons les arabesques. » Suite à ça, je n’étais plus en état de suivre le reste et j’ai quitté la salle complètement déboussolé en psalmodiant : « Fuyez le cinéma expérimental et ses hordes impies car voilà revenu des Enfers l’outil du Démon qui, dans sa machiavélique entreprise, tente de nous écarter du droit chemin ; croyez en ma parole car je suis le Fils du Cèpe ».
Très atteint par la séance, je pris la saine décision de reporter mon voyage à Long Island au jour suivant. Cette île des Bahamas très étirée en regard de New Providence disposait, selon mes renseignements glanés entre deux stands de manioc sur le marché de la grand-place, de nombreux chantiers navals de taille moyenne camouflés dans le sein de ses criques et était cernée par des failles très profondes. L’endroit semblait correspondre à ce que je recherchais et c’était sans doute là-bas que tout allait se jouer. J’en étais arrivé à cette déduction pace que j’étais maintenant persuadé qu’un évènement de grande ampleur se préparait dans la zone et depuis si longtemps que cela en devenait indécent : tous ces bateaux disparus cargaisons comprises, ces équipages jamais retrouvés, ces avions qui se perdaient sans raison…
En regardant la carte, ça devenait clair.

Un détail était frappant, tout de même, non ?
Quatre îles alignées sur un axe nord-nord-ouest ?
Toutes quatre de formes curieusement allongées ?
D’un intervalle presque identique entre elles ?
Et formant un barrage suspect isolant Cuba de l’Atlantique ?

Un alignement de ce genre peut se produire de façon naturelle évidemment, à ceci près qu’en consultant les cartes des navigateurs du XVIe siècle, on s’aperçoit facilement de leur inexistence. Ces îles étaient artificielles, construites par des mains humaines, des mains franco-américaines pour être plus précis. Tout simplement parce que les américains ne pouvaient pas ignorer ce qui se tramait si près de leurs côtes, ils en étaient et les français aussi. Depuis des décennies, Washington voulait étouffer Cuba dans son propre sang : l’embargo n’était pas suffisant, ils coupaient toutes les voies maritimes venant de l’Europe pour accentuer la chute de La Havane, jusqu’à l’éradication totale. Ce n’était plus un embargo commercial mais un siège, comme au bon vieux temps. Du point de vue américain, il était inutile de s’occuper de l’axe sud : l’influence qu’ils y exerçaient, que ce soit en Amérique Centrale ou envers les pays du Mercosur était suffisante pour bloquer tout ravitaillement en direction du barbu immortel. Par contre, concernant l’Atlantique, il fallait s’assurer que rien ne pourrait lui parvenir. Et comment le faire plus efficacement qu’en barrant physiquement le secteur ?
La France participait au manège sous peine de se voir administrer la même punition exemplaire, les américains ne reculeraient devant aucun chantage pour éliminer leur ennemi mortel et toutes les pressions étaient bonnes pour terminer la construction d’un véritable Mur des Caraïbes.
Ce qui m’amenait à L’intrépide et aux fournitures en métaux lourds qu’il transportait sûrement. Sans parler des spécialistes en génie civil : la fameuse fuite des cerveaux vers l’étranger…
Sauf que cette fois-ci, un lyonnais était sur le dossier. Et un lyonnais, ça réfléchit dans une chambre pourrie, accroupi dans un coin, un cigarillo à la bouche en regardant le plancher et tous les volets fermés. Et ça, ça impose le respect.

Je m’étais donné une semaine par déplacement. J’arrivais au sixième jour et la part la plus complexe du boulot était accomplie. Une quarantaine d’heures pour boucler l’affaire et je reprendrais les airs. Mes temps de loisirs avaient jusque-là été fort limités et j’estimais qu’une pause était nécessaire ; après tout, j’avais bien travaillé et s’inscrire à une bamboula locale pour décompresser était le geste lucide de celui qui connaît ses limites. Je me suis préparé pour le repas-karaoké qui était proposé par un établissement à deux rues de mon hôtel : tant pis pour la discrétion, si les agents du District of Colombia voulaient me tomber dessus, ils n’avaient qu’à essayer. J’avais résolu l’ensemble de l’énigme théorique, c’était acquis, la victoire m’appartenait. Irrémédiablement.
La musique créole allait bon train et je partageais une tablée en compagnie d’un couple d’autrichiens genre ‘Viens enculer ma femme tout à l’heure, histoire que je voie comment tu t’y prends, je te refilerai deux/trois tuyaux’ et d’une célibataire américaine qui semblait avoir fui quelque chose. Quelque chose comme un ex-mari adepte du ceinturon en observant un peu sa gueule de belette contrite. La conversation roulait en anglais scolaire autour des palmiers et de la pertinence d’avoir choisi cette destination pour endiguer la folie quotidienne des professions respectives. L’américaine plaçait un mot par ci, un mot par là, elle ne voulait pas se faire d’amis, juste être loin d’Atlanta et lire du Ken Follett sur la plage sans dragueurs environnementaux. Autant dire que mon naturel enclin à la facilité m’engageait à me rabattre sur une autricherie nocturne, ce soir-là. J’avais le sentiment du devoir quasi-accompli, sorte d’invulnérabilité du gars qui sait où il va. C'est-à-dire à Long Island le lendemain. Pragmatisme lyonnais.
Les viennois commençaient à me gonfler sévèrement et je me suis dirigé vers la scène pour interpréter une chanson de mon cru, fomentée dans ma chambre crade et que j’avais eu l’audace de nommer « Petit berlingot, oh, oh oh ! ». Mort bourré à la piñacolada, c’était le pied complet :

Petit Intrépide, pideuh, pideuh
Tu t’es pris pour l’Atlantide, tideuh, tideuh
A travers les mers, mèreuh, mèreuh
T’as voulu me la faire à l’envers, vereuh, vereuh

Petit berlingot, oh, oh, oh
Tu flottes pas dans l’eau, oh, oh
Mais les pieds par terre, tereuh, tereuh
Je suis un pur reporter, tereuh, tereuh


Etc…

Hans et Petra ont applaudi comme des tarés : j’avais mon ticket depuis deux heures de toute façon. Clara made in Atlanta a trouvé mon jeu de scène aussi consternant que mes paroles, je l’ai bien noté, mais je m’en foutais : j’avais déjà choisi mon option coup de bite. Elle avait qu’à se branler comme une conne avec son verre de Martini, la pauvre petite chose pantelante, ou se trouver un aborigène qui aimait Ken Follett.
Avec Hans, on a refait le monde avec des carafes de cocktails en supplément pendant que Petra m’appliquait son pied sur les couilles comme une sauvage. C’était tellement furtif que les verres tressautaient de temps à autre sur la table. Hilare pour rien et défoncée comme c’était tout à fait permis, elle revendiquait son droit au sexe Rhône-Alpes en climat tropical, la décevoir dans ce contexte revenait à se comporter comme Clara, c'est-à-dire comme un animal en décomposition. Ce que je me refusais à faire puisque j’étais titulaire d’un but dans la vie maintenant.
J’étais prêt à tout : recherches de sous-marins, triolismes à la tyrolienne, attaques d’ambassade, actes de terrorisme aérien, meurtres en série, records du monde successifs de reportages à la con, n’importe quoi. N’importe quoi tant que ça me donnait l‘impression d’être vivant.
Et je l’étais.

« Sept milles bornes pour un sous-marin et une viennoise. J’aurais dû mettre ça en titre, trop tard. »
Elle était pas feignante, la Grosse Petra, elle se battait courageusement mais je moulinais avec un braquet vif et comme pour le silure, il suffit de fatiguer la bête en profitant de ses temps de répit pour ramener au maximum avant le prochain flip. A un moment, j’ai eu envie de lui encastrer le caméscope dans la gueule quand même, à Hans la Bedaine. Ben ouais, il se prenait pour Michael Bay avec ses travellings de folie et ses plans-séquences, perché à moitié nu sur la table de nuit. Et avec les chaussettes s’il vous plaît : ambiance Jubilé du Houblon à Innsbruck un petit matin d’été, il pouvait fumer sous la douche celui-là aussi. Je l’aimais bien mais pour garder une bonne concentration, l’idéal aurait été qu’il aille filmer les plinthes dans le couloir pour un effet de suggestion maximum mais Hans, la suggestion, ça le faisait pas vibrer. C’était un homme de terrain et Petra une femme de terroir si je devais prendre en considération le vocabulaire rustique qu’elle employait, à l’oreille on devinait le niveau de langage sans problème.
Bref, je m’en suis sorti comme un prince avant de dégueuler impérialement sur la moquette. « Tu vois, c’est pour ça que je t’avais dit pas à l’orange, le ti-punch, Hans ! Les agrumes, ça m’attaque le système nerveux. » Ca le dérangeait pas, il a continué son court-métrage en zoomant sur l’île flottante avec grumeaux et puis il a demandé à sa femme de bien écarter ses trous pour fignoler la prise de clôture à l’ancienne. Tout fier, il m’a expliqué que c’était l’occasion de tester son option flou enchaîné. Il voulait me refiler une copie du film en me l’apportant à hôtel le lendemain ‘to remember this great party’, je lui ai dit que je ne voulais pas payer d’excédent de bagage et on s’est quitté bons amis.

L’alcool nuisait à ma folie maintenant, je le sentais parfaitement. « Pour être sereinement timbré, et donc vivant, je dois rester clean. » Le constat était dramatique : j’aimais boire presque autant qu’être fou, il me fallait choisir entre deux enfants, sacrifier l’un pour que l’autre survive. Je pris la décision d’offrir toutes ses chances à celui qui me permettait de donner un sens à ma vie. Facilité encore puisque renier l’alcool en pleine gueule de bois revient à mettre un terme à sa carrière de sauteur à la perche quand on est devenu cul-de-jatte.
Je m’attendais à une pirogue en bois ou en tout cas à quelque chose de plus typique que ce ferry à double pont. New Providence - Long Island, un trajet à vous dégoûter des lagons lapis-lazuli et des bancs de sable. Je me positionnai à la proue en méditant sur les moyens que j’allais pouvoir mettre en œuvre pour résoudre concrètement le mystère de L’intrépide.
J’avais pensé louer des tractopelles et faire creuser toute une équipe à la nuit tombée jusqu’à atteindre les fondations de l’île, prouvant alors l’imposture des îles alignées sur l’axe nord-nord-ouest mais : bruyant, flagrant, illégal.
Il fallait retrouver le submersible, c’était la seule manière. J’avais beau retourner le problème, tous les chemins qu’empruntaient mes stratagèmes mentaux se heurtaient à lui. Il ne pouvait pas être ailleurs, certes il devait être très bien camouflé mais un cylindre de cent dix mètres de long avec presque dix milles tonnes sur la balance pouvait difficilement passer inaperçu dans le coin. A partir du moment où on savait chercher. Qu’il soit au large, débarquant son matériel jusqu’à la côte avec la complicité de petits transports n’était pas vraiment envisageable : une ribambelle de bateaux de pêche et de cargos passaient dans la zone tous les jours. Un pauvre con aurait remarqué un écho sonar de grande taille et n’aurait pas pu s’empêcher d’alerter quelqu’un. Sans compter que 'L’intrépide' aurait dû remonter à la surface à chaque fois pour transborder : non, impossible, trop risqué. Il était à terre, c’était une certitude.

J’ai volé une serpillière qui traînait dans les quartiers du personnel et je me suis mis à astiquer le pont : j’en avais toujours rêvé. Les passagers me jetaient un œil curieux puis reprenaient leur observation du rien maritime. De temps à autre, je m’appuyais sur le manche et je prononçais d’un ton expert : « Ohlà, vu comment c’est parti, on va se prendre un bon grain avant ce soir ». Je me suis fait une quinzaine d’amis en trois-quarts d’heure, inquiets qu’ils étaient. Par la suite, un type est venu me reprendre mon accoudoir philosophique : « Ce n’est pas à vous de faire ça ». Pauvre garçon : s’il savait ce que je venais faire à Long Island, il aurait fermé sa gueule.
En montant à bord, j’avais remarqué un groupe d’autistes divers accompagné par des guides du genre « Les voyages thérapeutiques aux Bahamas sont profitables pour les handicapés mentaux ». Je décidai de m’en prendre un comme assistant de recherche. Une fois isolé, je l’abordai en bon pirate, ma carte du club de badminton à la main : « Pierre Mignon, Services Secrets du Yémen. Il faut retrouver L’intrépide, mon gars, c’est un sous-marin français. Et j’ai besoin de toi, tu as le profil. » Il a commencé à baver sur sa salopette en jean : j’ai pris ça pour un accord tacite. Je l’ai amené jusqu’au pont de débarquement, sachant pertinemment que les types de l’encadrement attendraient que tout le monde soit sorti avant de compter les autistes en quittant le navire.
Une fois sur le quai, je me suis mis à courir en tirant le baveux par le bras qui semblait reconnaissant de l’opportunité que je lui offrais : « Baaabou ! Pata pallé ! ». Ca y est : je recommençais à me marrer, tout n’était pas perdu.

« On va opter pour une traque rapide et efficace : j’ai un avion pour Paris demain à 17h. Je vais devoir faire appel à tes talents de limier. Tu te sens de taille… ? » Il a souri, le regard pétillant. Cette aventure le comblait de joie, c’était visible. « Kignagna, balo balo BALOOO ! », m’affirma-t-il. J’avais choisi le meilleur du lot : les autres chiaient dans leur froc en mettant des claques à tous les êtres humains dans une périphérie de cinq mètres. Celui-là était plus pacifique et surtout coopératif, ce qui était essentiel pour cette mission. Encore une fois, j’avais fait montre de clairvoyance.
Ignorant le littoral, nous nous sommes enfoncés dans la végétation centrale de l’île : en effectuant des cercles concentriques, on finirait bien par tomber dessus. Je baptisai mon assistant ‘Ragondin’, la similitude physique comme comportementale était frappante et puis j’aimais bien cet animal. Au bout d’un kilomètre de marche forcée, il refusa de faire un pas de plus en prétextant : « Fooopikakaaa ! ». Je saisis bien le problème qui le préoccupait et attendis qu’il le résolve de manière autonome ; ce qu’il fit en s’asseyant bêtement à même le sol. Une fois relevé, je le fis prendre la tête de notre cortège pour évaluer l’ampleur des dégâts fécaux et effectivement, je n’avais jamais vu ça : il était parvenu à un phénomène de dispersion très étonnant, presque artistique.
Je repris le contrôle de nos prospections en estimant l’orientation de notre trajectoire au jugé, ce qui allait fatalement nous perdre mais peut-être aussi nous conduire jusqu’au but. Une technique contestable mais qui avait l’avantage de me plaire. De temps à autre, je consultai ma boussole à dix euros ; geste inutile puisque je n’avais pas de points de repère initiaux. Je finis par la jeter dans un plant de fougères tropicales. Palmiers à la con, plantes à la con, insectes à la con et humidité permanente de soixante-dix pour cent : rien sur notre route n’indiquait la proximité d’un chantier, d’un tractage d’une énorme masse de métal. Poser L’intrépide dans ce foutoir sans briser un seul arbre et sans laisser de traces dans son sillage, c’était balèze : ils étaient très forts.

Subitement, je me suis accroupi pour me placer à couvert. Le danger était là. Il fallait que mon déplacement en sa direction soit le plus souple possible, que je me fonde totalement dans la végétation. M’allongeant tel un lynx à l’affût, je slalomais entre les herbes colorées et les troncs d’arbres. Mouvante, la cible ne m’avait pas repéré : j’avançais face au vent léger, mon odeur ne me trahirait pas. Mes appuis étaient flexibles, ma progression sûre. L’objectif se figea : je fis de même, complètement à l’arrêt. Je repris mon avancée quelques secondes plus tard à travers la flore, abaissant mon centre de gravité autant qu’il était nécessaire. Mon osmose avec les éléments était telle que je parvins à réduire la distance qui nous séparait jusqu’à deux mètres.
Sauvagement, je propulsai mes membres postérieurs et fendant l’air, j’agressai ma proie en la saisissant par la nuque. « APPATTTAA BOBOUBOBOOUUU »
Je tenais fermement sa jugulaire et sa carotide dans le creux du coude, resserrant mon étreinte en maintenant mon bras dans cette position à l’aide du second. Ses chances de survie étaient nulles, le cerveau serait asphyxié en moins de deux minutes, les yeux commençaient déjà à montrer des signes de pétéchie. « Vie et mort d’une salopette sale ». Prochain best-seller.

Je l’ai laissé là. Ca pouvait être n’importe qui, finalement. Les experts scientifiques pourraient toujours jouer du spectromètre de masse si ça les éclatait, rien ne me liait à cette île de merde et à Ragondin. A part le hasard et ma folie. Mes vêtements étaient des plus communs, mes empreintes ne correspondraient à rien de connu, je n’étais fiché nulle part, aucun antécédent. Aucun mobile, pas d’armes, personne ne savait que j’étais venu ici, je ne connaissais pas ma victime, j’étais à sept mille quatre cent trente-deux kilomètres de Lyon. « Qu’ils se branlent avec mon ADN sans élément de comparaison… s’il le trouve un jour ».
Invulnérable. Intouchable. Invisible. Inconnu. Irraisonné. Improbable. Intraçable.

Cuba pouvait bien s’enfoncer dans les flots, j’en avais plus rien à foutre. Par contre, je voulais bien récupérer la copie de Hans, j’étais pas contre ‘remember this great party’ finalement.
« Merde, Hans et son putain de film… »
Ca m’avait stoppé dans mon euphorie. Je relativisais immédiatement sur le chemin du retour : « Et alors ? Ca prouve quoi ? Rien du tout. Au pire des cas, j’étais là. Ben ouais, je suis venu en vacances, au Graycliff. Et je me suis amusé avec une autrichienne. Quel rapport avec un autiste putréfié sur l’île d’à côté ? Et puis, de toute manière, Hans n’entendra probablement pas l’info. Et même s’il l’entendait, il ne verra jamais le rapport. Te prends pas la tête, y a aucun rapport de toute manière, ça peut être n’importe qui. Personne ne saura jamais, c’est évident. »
J’ai attendu le prochain ferry en regardant le groupe de Ragondin qui s’affolait depuis deux heures en parlementassions stériles avec les responsables du petit port. Putain, j’avais l’impression d’avoir passé toute l’après-midi dans la fournaise, je m’attendais presque à voir le soir tomber en débouchant hors de la forêt tropicale. Mais non : ça avait duré deux heures en tout, et encore pas tout à fait. Je crevais de soif mais je pouvais contrôler l’impact de la chaleur, calmer les douleurs de mes égratignures multiples par simple concentration. C’était devenu naturel, j’étais en mode de survie automatique. Dans une bulle de protection à toute épreuve. Je me sentais sublimé.
J’ai pris un verre en terrasse, avec un angle de vue direct sur le bateau qui allait me ramener à New Providence mais sûrement pas à la raison.
Je comprenais tous ces homicides maintenant : j’aurais pu faire profiler, je m’étais ouvert l’accès à une dimension qui allait sûrement muter ma perception du monde à vie ; c‘était mon destin, il n’y avait plus aucun doute à ce sujet. J’étais transfiguré et c’était irréversible ; à cette pensée, j’ai commencé à m’aimer sans conditions, à concevoir mon potentiel, ma définition aux yeux d’autrui, mon rôle ici-bas.
Mon état intime et ma fonction existentielle : reporter du dimanche.

= commentaires =

nihil

Pute : 1
void
    le 16/02/2008 à 19:13:59
J'ai pas encore tout lu parce que c'est quand même mastard, mais ça se lit sans problème, et c'est même un régal. j'espère juste que la suite confirmera l'impression que j'ai de la première moitié, parce que c'est super bien. J'adore le personnage complètement abruti, qui rappelle de bons souvenirs de n3rDz, Trisophrenia ou Las Vegas Parano.
Monsieur Maurice
    le 16/02/2008 à 19:31:46
Kignagna, balo balo BALOOO !

Fooopikakaaa !
MonsieurMaurice
    le 16/02/2008 à 19:33:10
J'ai quand même le chic pour, en un coup d'œil , repérer les répliques cinglantes.
Lemon A

Pute : 1
    le 17/02/2008 à 17:02:10
J'ai arrêté à l'apparition de Claire.

Ca commence plutot bien avec un style qu'on sent fluide donc motivant. Et puis en fait c'est pas prenant. Perso basique, anecdotes un peu poussives. j'ai l'impression que ça s'en va dans tout le sens, avec une causticité forcée, moitier gratuite, blague / chute - blague / chute sans construction parallèle d'un univers, d'un contexte, d'une atmosphère, d'une intrigue qui envelopperai et donnerai envie de connaitre le denouement de l'histoire. L'expression et l'humour n'étant par ailleurs pas d'une qualité suffisante pour compenser ce désagrément.
Omega-17

Pute : 0
    le 19/02/2008 à 15:52:43
Ah.
Omega-17

Pute : 0
    le 19/02/2008 à 15:59:48
Je signale par là mon étonnement feint.
Et non l'unité de mesure d'Ampère/heure.

Il fallait que ce soit dit car j'aime la concision presque autant que la sodomie forcée.

commentaire édité par Omega-17 le 2008-2-19 16:2:57
Lol47

Pute : 0
    le 19/02/2008 à 16:28:30
Toujours aussi bien torché, dit Ailleurs.

Ca manque un peu de sodomie.

Dieu te le pardonnera.
Comme dirait l'Autre.
Dourak Smerdiakov

site
Pute : 0
ma non troppo
    le 20/02/2008 à 23:10:00
S'Il le veut, quoiqu'en dise l'Autre.
Alpha Rhum et eau
    le 21/02/2008 à 23:44:55
Alors sac à merde ?
Une diarrhée wagnérienne à ce que je vois.
A l'image du PQ, ton style : chaque feuille ressemble à la précédente et se laisse choir avec un dégoût à peine agacé.
Le genre San-Antonio lourdingue des confitures Bonne Maman.
Jefferson
    le 22/02/2008 à 09:01:19
Waw. Un putain de texte.
Mentaltrash

Pute : 0
    le 22/02/2008 à 11:51:20
Le debut est cool et pas chiant, mais je sais pas pourquoi, a partir de l'episode avec le taxidermiste j'ai pas eu le courage de continuer... Le style commence a stagner... Bref chiant.
J'ai tout skippe po urlire le dernier paragraphe qui, ma foi, est interessant egalement, prouvant que ce texte n'est certainement pas de la merde... si seulement il etait lisible plus loin que le debut :p
Omega-17

Pute : 0
    le 22/02/2008 à 16:33:20
C'est con, mental, t'as arrêté quand ça commençait à être vraiment drôle. Sans parler de la scène mythique de l'avion et de l'ambassade entre autres.
Dommage.
Caboche à kirsch
    le 22/02/2008 à 19:53:11

Vraiment drôle ? tout de même !
Mythique ? rien que ça ?
Mentaltrash

Pute : 0
    le 23/02/2008 à 06:42:12
>C'est con, mental, t'as arrêté quand ça commençait à être vraiment drôle. Sans parler de la scène mythique de l'avion et de l'ambassade entre autres.
Dommage.

bon je vais faire un effort
Dourak Smerdiakov

site
Pute : 0
ma non troppo
    le 23/02/2008 à 14:34:19
Ça y est, je viens de le lire, je savais qu'il faudrait prendre le temps, j'attendais de l'avoir, j'avais l'équivalent de 2 ou 3 verres de vin dans la tronche, bref, que des bonnes dispositions.

Et pas déçu du tout. Ça m'a fait marrer, c'est drôle, c'est bien écrit, on retrouve les qualités des autres textes d'omega-17 sans les défauts qui peuvent agacer. C'est excellent et franchement un des textes les plus drôles que j'ai pu lire sur la zone. Très bonne lecture.
Dourak Smerdiakov

site
Pute : 0
ma non troppo
    le 23/02/2008 à 14:38:57
Bien sûr, il faut déplorer que la Marine nationale soit dénigrée d'un bout à l'autre de ce texte, mais il est bon de savoir que la capitale des Gaules veille en secret à ce que les affaires du monde ne tourne pas trop mal et limite la population de ragondins.
nihil

Pute : 1
void
    le 10/03/2008 à 16:26:14
J'ai terminé ma lecture avec un bon mois de retard, et je suis vraiment pas déçu. Un vrai régal. Manque qu'une chute un peu plus explosive en fait. Genre le héros qui fait l'amour averc le cadavre de Ragondin l'autiste et qui tombe enceinte d'une écrevisse, enfin je sais pas moi.
400asa
    le 10/03/2008 à 17:33:43
no spoiler ffs
nihil

Pute : 1
void
    le 10/03/2008 à 17:37:40
Ah désolé. Mettons que Ragondin est toujours vivant.
maxilio
    le 23/10/2008 à 14:34:20
joie! joie! pleurs de joie! rachète les 99 daubes abstruses et/ou gothiques et/ou Ellisiaque que je viens de me taper et que je me garderais bien de critiquer par soucis d'intégration.
je suce, j'avale je vomis et je ravale.
Narak

Pute : 2
    le 09/12/2008 à 22:24:06
Merveilleux.
Yogh
    le 13/09/2009 à 17:29:15
Si, si, j'aime, ce genre de tachypsychie avec des enchainement assez absurdes de situations gaguesques (ouais, j'ai osé le mot "gaguesque"), de jeux de mots à la con d'hypomane, de bouts de trucs qui forment un tout, pas tout lu non plus, le style fluide me plait, l'ensemble (ou le semi ensemble) donne une impression d'elephantiasis, de graphorrhée, de n'importe quoi avec comme un fil conducteur lui même absurde. C'est le style, je dirais haletant et avec un côté "écriture automatique sous speed ou accès maniaque" qui rend la lecture difficile sur la durée, ça pense plus vite que le cerveau.
Narak

Pute : 2
    le 14/09/2009 à 17:27:17
Ouais trop, et pachycéphalosaure aussi.
Tractopelle
    le 20/09/2012 à 16:23:10
Je suis là.

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