LA ZONE -

Petit Journal d'été

Le 06/05/2025
par Mausel Crine
[illustration] Petit road-journal à vélo dans le terroir pisseux de nos campagnes
Chapitre I
7 jours plutôt réalistes


Jour 1 : 20h06, 23.06.2023

Pourquoi le mec qui fait un malaise à la gare est un excellent présage ? De plus, les croissants surgelés de sept heures sont également excellents. Dans le train, on rit comme si on avait un grain. Ensuite on fait dodo pliés.
A Dijon, le tramway est fuchsia. D’une ville à l’autre, c’est un monde. On cherche de la nourriture longtemps. Je retrouve au sol le parcours de la petite chouette magique de Dijon. On trouve de la bouffe mauvaise et chère. On s’assoit. Je considère les visages féminins autour de nous et je pose une question sexiste à Jade. D’une dent aimable, la serveuse nous offre un rire jaune. On se remet en train pour Valence.
A l’arrivée, une foule folle, fulminante et furieuse fend le fémur de Jade qui essayait de descendre outrageusement. Du coup mon pneu a crevé. On galère un peu. On regonfle. Valence, t’oublies.
Au Auchan, j’érafle nos bonnes résolutions en mangeant 200 G de saucisson. En sortant on se rend compte que mon vélo a recrevé tout seul, de son côté. On médite dessus. Surtout pas de superstition négative. Je m’en remets à la grâce de ma maman.
Du coup je patine dix kilomètres sur gente jusqu’au camping en testant mon mental que j’avais travaillé à la salle. Jade me soutient : « Encore un tout petit peu, je te jure, on s’est peut-être trompé de chemin, le raccourci nous a fait perdre du temps, fais-moi confiance. » Je me mets sur son humeur. Ça va. Je dois crier quand même un peu dans la nature, et dessus, quand l’herbe épaisse dans laquelle je m’enfonce donne trop de mou.
On arrive au super petit camping, au bord d’une guinguette blonde qui retrousse ses fûts en nous regardant dans les yeux. Le couple qui nous accueille nous dit immédiatement qu’il y a pas de place pour les hamacs. Je réponds qu’on peut quand même faire un tour. On raconte nos mésaventures. Il dit qu’il y a des troncs qui feraient l’affaire, mais ils sont occupés. Je propose : « Je peux aller leur parler. » Et paf ! Il trouve une place magique dans une espèce de mangeoire lavoir borne incendie garage à vélo abri anti-tempête sur le côté. Laid.
J’ai pas de corde, il trouve une corde.
On mange.
Un Jean-Michel passe pendant qu’on essaye de curer ma roue folle. Jean-Michel s’assoit avec nous. C’est un cycliste. Il fait ce qu’ils font tous, c’est à dire il outre-passe l’autorité talentueuse de Jade, mais avec tact et prudence, et sans aucune utilité. On regonfle le tout et ça devrait aller. Ce vélo, on s’y attache parce qu’il nous échappe. Au moment où j’écris ces lignes, je le regarde du coin de l’œil. Une nuit a passé. Je me demande si le problème est définitif. Attends. Je vais le tâter. Cette petite roue… Hmmm... Elle m’a l’air très bien ! J’ose pas le dire à voix haute.
Avec Jean-Michel (accident : c’est son prénom) on parle de pédophilie. Hoho putain. On parle de vélo. Il vient de faire deux milles kilomètres, et tranquillement. Il a un bidou. Je perds tout espoir d’être mince sur cette planète, dans cette vie. A vous tous, les Crine, les Crinolin, les tontons Crin-crin qui venez après moi, soyez prudents de bien choisir votre sport et vos drogues.
On va vers Montélimar.



Jour 2 : Montez, limaces !

Au moment où j’écris ces lignes, j’ai les mains croisées derrière la tête. Je regarde l’origami de feuilles sur le ciel qui s’éteint.
Je me lève directement sur un Alsacien qui me parle aussitôt de camping-car. Je lui dis qu’on est tranquilles. Il parle à notre place en disant : « On arrivera quand on arrivera » et ça me fait penser à une phrase que j’ai entendu en Picardie : « A la pêche, quand ça prend ça prend, quand ça prend pas ça prend pas. » Faut laisser fumer la phrase. Aussi improbable que cela puisse paraître, c’est dans ce même bar que j’ai entendu : « Quand il pleut, il pleut. » J’aurais foutu ça à l’entrée du temple de Delphes et envoyé l’Oracle lire des bouquins à poil sur W9.
On se met en route sur ma roue toute neuve, bien regonflée, et le seul truc qui me gêne c’est le bruit de ma gente sur la route parce que ma roue vient de se remettre à plat. Bordel. Un paranoïaque qui crève trois fois, il commence à se vexer. Je reste pas calme.
Après vingt kilomètres sur gente (on s’habitue) je rentre furieusement chez un réparateur de vélo qui m’écoute en souriant sans croire un mot de ce que je dis. Il me fait acheter un super fond de gente. Trois euros. Vu que c’est pas cher, j’oublie ma monnaie sur le comptoir. On repart, le bonheur nous submerge. Je re-crève. On y retourne. Cette fois, il s’intéresse. Après un examen minutieux, il trouve dans le pneu un bébé bout de verre que je suis actuellement en train de fumer parce que je l’ai mis dans mon paquet de tabac en souvenir.
On repart. On passe devant quatre réacteurs nucléaires et deux grands bassins. Tout va bien. Mais il est tard. Il fait chaud. Ça grimpe. Je me sens invertébré. Le soleil nous fesse les bras. Ça grimpe, je dis ! On arrive, liquides, devant le camping bien fermé. Je craque un peu. Jade trouve un autre camping. J’appelle. La dame au téléphone est ravie mais sénile : quand je lui demande si c’est loin, elle répond : « Oui il faudra ramener votre propre nourriture. Et si vous voulez - ». Je raccroche.
Dans une ville dont on saura jamais le nom, caché au dos d’un champ, il y avait une fois un camping magnifique plein d’arbres et de moustiques avec des chèvres invisibles derrière les haies. Des gens tout endimanchés, gras et heureux, avec l’empressement des grandes fêtes, nous sourient distraitement. Ils ont l’air des mariages.
On se pose. On fait la sieste, brûlés. A l’accueil, la dame sénile est pas sénile, c’est juste le réseau qui est pas bon. Intéressant. Elle nous parle de lavande à travers la fente de ces yeux brillants. L’Ardèche, c’est surtout de la lavande et du saucisson. La lavande, c’est sublime, mais je suis sec. J’ai plus une goutte dans le corps. Faut se rafraîchir, mais la piscine du camping c’est une arène de combats de chiens. Jade y va, moi pas.
On repart vers Montélimar, histoire de voir quand même un truc à un moment donné. Sur le chemin, 150 voitures de mariage passent à côté de nous. J’agite mon bob pour me faire croire que je suis l’heureuse élue. On pédale. Mon destin, c'est un CDD : faut arriver à Montélimar.
Et Montélimar. Ah, Montélimar ! Rien d’intéressant. C’est un savant fou, le maire, parce qu’il a mis des panneaux numériques mobiles sur la place principale. On rôde.
Autour d’une grenadine, on entend chanter. La meuf gueule fort, ça donne envie de voir sa tête. L’avantage de Montélimar, c’est le casting de The Voice du 24 juin 2025. La chanteuse a pas une grande voix mais une grande gueule. Elle se tortille : « My heart belongs to daddy. » Un monsieur du jury, rouge, concentré, important, écoute sans la regarder cette femme qui se tort les cordes vocales pour —
On boustifaille. Jade mange dans sa moustiquaire comme une enfant spéciale. Puis on s’endort dans un froid figeant. Quand je suis constipé, j’ai l’impression de faire partie d’un tout.
On va vers Mondragon.




Jour 3 : Mondragon et l’Esprit de la rivière


La deuxième nuit glaciale se fend d’un jour brûlant. Les paysages deviennent de plus en plus beaux. L’eau court à côté de nous, l’ombre est partout.
Sur le chemin, une bébé chauve-souris se tortille sur la route, au soleil. Elle est intacte. Je la prends dans mes bras. Deux secondes plus tard, je me sens papa. Elle est toute molle. De sa minuscule tête bouffie sortent deux yeux noirs. Quand je la pose, elle suit les vibrations de nos voix et revient vers nous. Elle pose sa toute petite bouche sur la paume de ma main. On pense pas à chercher le nid, seulement à l’assassiner (par gentillesse). Puis on l’abandonne à une mort certaine. On repart troublés, impuissants.
Un peu plus loin, on traverse une rivière. Une brise fraîche me pousse dans le dos.
On s’écrase au camping dans une chaleur obèse. On jette les sacs dans la pinède bouillante et on repart en ville, affamés. Mondragon. Quarante degrés.
Dans un bar, je constate qu’on est arrivé dans le Sud parce qu’un mec fume sa clope sous le zénith comme on boirait du thé dans un volcan. Son mouchodrome renvoie les rayons du soleil.
On a faim. Pas de nourriture possible, tout est fermé. L’avantage du bar, c’est les phrases marrantes : « Je suis entré chez lui, c’était une mafia ! » Mais on peut pas manger une phrase. On mange seulement du pain.
Le soir, au camping, je remarque une petite fille timide et polie qui me dit bonjour chaque fois qu’on se croise. C’est la fille de la proprio. Elle aide sa maman en travaillant avec elle. Elle a les yeux noirs. Humides. Pas chagrins, mais fatals. Au restaurant, la petite malheureuse, elle casse un verre ! Sa mère court dessus et crache du feu : « Je veux plus te voir ici ! » La petite repart en pleurant. Elle tient son petit bras sanglant enroulé dans un bandage. Nos cœurs se brisent. Jade dit : « Ma bébé chauve-souris, c’est elle ».
Cette entrecôte surgelée dans un snack que le chef refuse d’appeler restaurant, ça me fait penser à la texture d’une chatte. Repus et insatisfaits, on prend une douche, on se met de la crème, on se brosse les dents. Je m’allonge dans mon hamac et c’est le moment où je regarde l’origami de feuilles sur le ciel qui s’éteint.
Je m’endors.
Je me réveille. Je sors du hamac. Les aiguilles de pin s’écartent autour de mes pieds. Je respire. Quand j’inspire les aiguilles se lèvent. Quand j’expire, elles retombent. Chaque objet que je regarde est expulsé au loin. Je suis au ralenti. En dessous des aiguilles, il y a un truc blanc. La terre est ouverte et fait un bruit de chair. Je vois tout du coin de l’œil. Les bungalows sont écrasés sous leur propre poids. Ils s’enfoncent dans le sol. J’entends les sanitaires s’effondrer. Je regarde douloureusement vers Jade dans son hamac. Son visage est tourné vers le sol. Elle a des yeux différents. Des trous noirs bordés d’eau. Ses pommettes sont grises, gonflées, lisses. C’est pas Jade. Il tourne la tête vers moi. Son visage défile et saute comme une rivière. Sous sa peau translucide, ça bouge et ça brille. Des reflets courent sous l’eau de ses yeux. Sa bouche s’ouvre silencieusement et j’entends le bruit de l’eau dans ma tête. Ses dents grincent lentement. Je peux pas cacher ma terreur. Je hurle : ma bouche s’ouvre silencieusement et je crache de l’air. Un demi-cercle d’aiguilles est soufflé jusqu’à lui. Il fait un mouvement vers moi. La lune remue dans le ciel flou. Je suis trempé. Quand il bouge, ça me donne le vertige. Tout le sol bouge avec lui. Les insectes sous terre suivent ses mouvements. Les branches au-dessus de lui miment les gestes de ses bras. Je sais que je dors. Il va s’approcher, c’est sûr. Je peux pas me réveiller. Je bouge très lentement. Il bondit hors du hamac en hurlant. Un bras humide jaillit vers moi ! Je me penche en arrière au ralenti, comme sous l’eau... Ses doigts visqueux viennent sur mes yeux ! Ils sont proches ! Je peux sentir l’odeur de vase ! Pouah ! Son ongle s’approche de ma rétine... Son index se tend ! De la vase sort de son doigt ! Je vois flou. Goût de sel dans la bouche. Perds connaissance.

Je me réveille, la bouche en sang. Je dois arrêter d’abandonner des bébés vivants.

















Jour 4 : Avignon et le papier toilette

Au petit déj', contre une fontaine, un pigeon prend une branche dans son bec et réfléchit deux minutes. Il la repose. C’est un théoricien. Un mec sort d’un camion, et s’exprime comme ceci : « ,ù!:^*$, ;,⁼ ;%/?£%$ !,£§£?§.£ù !: ! » La plupart du temps, il s’est sûrement fait comprendre comme ça. On admire. On repart.
Quand on arrive vers Avignon, c’est des grosses routes. Des grosses limaces brillantes. Il fait chaud. Le sol brille. Les oies chantent. On fond. Le visage de Jade est en train de glisser par terre.
Sur le chemin, on croise un couple à l’arrêt. La meuf a crevé. Le mec se la pète. Quand on la dépasse, elle nous dit : « De toute manière on va vous rattraper. »
On arrive lentement à Avignon, derrière trop de kilomètres.
Sur la place Saint Didier (Sant Deidié) on se pose en terrasse. Adorable. On regarde la serveuse. Elle fout rien. On bouillonne. Elle parle cinq minutes à des clients. On bave de rage. On a soif. « Je l’enverrais en service place Vendôme, ça lui remonterait l’angoisse propre à un travail correct. » On attend encore. On a l’insulte fertile. J’ai envie de la naturaliser Parisienne. Cette serveuse fait tout, sauf un truc. On commence à prendre chaud. Pour lui montrer qu’on s’évapore d’indignation, je pars chercher moi-même deux verres d’eau. Jade remarque un panneau « Service au bar ».
On veut aller au camping Bagatelles. Quand on arrive, on annonce « Deux hamacs ». La meuf nous regarde. Elle dit : « Ah non, pas possible. Y’a une loi. Interdiction de faire dormir les gens sans rien au-dessus de leur tête ». Dans la mienne, je lui suggère de déposer la sienne dans une débroussailleuse. Mais on répond « Ah bon. Très bien. Merci. » Je repars en m’éventant avec une carte postale chatons que je suis en train de voler sans faire exprès. Elle le remarque et dit seulement : « Quarante centimes ». Je soupire.
On arrive pleins de splendeur au camping à côté.
La personne à l’accueil est belle. Elle a les cheveux châtain comme mes doigts et la peau rose comme mes ongles. Quand on arrive à l’accueil on dit : « Deux hamacs. — C’est quoi un hamac ? »
Sinon le camping, c’est **** donc le luxe : du PQ dans les toilettes. Le paradis des campeurs, c’est pouvoir se torcher le cul. Un campeur avec des fesses propres, c’est un roi. Il marche pas en canard. Il sent aucune crotte trottiner dans la vallée de son pantacourt. Si toutefois vous ne disposiez pas de PQ à portée de main, je vous recommanderais une technique torcheculative inventée il n’y a pas moins d’un demi-millénaire.
C’est simple. Il suffit de se torcher successivement avec une saucisse de Strasbourg, un hamster nain, une plante carnivore, une truffe de belette, un tigre du Bengale, une porte de voiture électrique, plein de petites bites, un panier promotionnel Bio C Bon, un costume d’animateur de soirée, n’importe quel livre, une joue bien fraîche, un tajine de poisson, un compte rendu du conseil municipal de la ville de Montrouge (préférez ceux ultérieurs à 2018), les draps d’une personne que t’aimes un peu moins ces derniers temps, les cheveux d’un mec qui utilise un super shampoing, une porte de commode Maison du Monde, un tissu brodé aux initiales de jeunes mariés, du parquet bien ciré, et enfin, votre propre main (si elle est propre).
Dans Avignon, on cherche un saucisson. C’est une question de vie ou de mort par infarctus. Après avoir traversé l’Ardèche construite entièrement sur un saucisson, on se retrouve en zone sèche. Y’a bien un saucisson d’Ardèche au Monoprix de l’avenue principale, mais c’est le même qu’à Denfert-Rochereau. D’une ville à l’autre, c’est pas un monde. On cherche un boucher. On trouve un boucher. Il est hallal. J’essaye d’éviter d’être islamophobe. J’essaye aussi d’éviter le saucisson hallal. Les yeux fermés, on attrape un saucisson laïque et on se pose près de la piscine.
Pour justifier notre craquage alimentaire, on parle de l’obésité à travers le monde. Les pays les plus obèses sont les plus riches ou ceux avec des habitudes alimentaires de merde. Les moins obèses sont les plus pauvres ou ceux qui mangent bien. Quand je mange un saucisson, ça me rassure d’imaginer des gens obèses. Quand je prends une trace, j’essaye de me rappeler la tête de Patrick Sébastien.
On est fatigués. On revient dans nos hamacs.
Je m’endors.
Je me réveille vers minuit. J’essaye de penser à la journée qui vient de passer mais je me rappelle de rien. Jade me décrit tout en détails et chasse l’image de l’esprit de la rivière qui émergeait toute la journée.
Je m’envole dans le ciel sans écrire une ligne.



Jour 5 : Tarascon, poliment

Réveil soudain. C’est la nuit. Mon hamac est accroché à un petit arbre mort. Le vent se lève. Mon petit arbre fait la révérence. Derrière lui, un arbre décapité balance ses deux énormes bras. J’ai peur de tomber dans le ciel. Je me rappelle d’une phrase : « Nous ne tomberons pas hors de ce monde. » Je me blottis dans un rêve.
Le réveil me ressuscite. Jade aussi a bien dormi. On est en retard.
Les têtes dans les fesses, on parle de mon journal. Jade dit que dans le journal, elle existe pas. Je suis d’accord. Mais quel bout d’une personne on peut coller dans un journal sans l’abîmer ? Je la connais assez. Je pourrais parler d’elle assez longtemps. Exemples. Jade déteste : le vent contraire en vélo, être réveillée par un soleil brûlant, essuyer une attaque de moustiques. Jade aime surtout : le vent dans le dos, être réveillée par autre chose qu’un soleil brûlant, détruire de l’intérieur une communauté de moustiques.
On saute sur nos vélos.
On arrive à Tarascon, ville du cousin mystique de Don Quichotte : Tartarin ! Je suis à plat, mais j’arrête d’en parler. Considérez qu’un chapitre sur deux, je suis à plat. Un dessin d’enfant en forme de château-fort surplombe la ville. On visite. C’est entièrement magnifique, intact. Grâce à Pétain haha. Je sais pas écrire un rire gêné. Comment on écrit un rire gêné ? Je connais d’autres rires. Rire plat : haha. Mimi : hihi. Allié : héhé. Mesquin : hin hin. Idiot : hoho. Scélérat : mouahaha. Un rire gêné ? Puisqu’il existe pas, je vais l’inventer. Je dirais que ça s’écrit : faîtes vos propositions.
Au cas où vous l’auriez pas remarqué, j’arrive pas parler du jour 5. Pourtant je suis dedans. Par exemple, au moment où j’écris ces lignes, on est à Arles. Je suis moitié dérangé, moitié légèrement à bout, moitié je vais les buter par une télénovela allemande qu’un couple adorable regarde juste à côté de moi. Ils boivent du rosé. La femme sourit. Le mari est captivé. Quand je passe, il me fait un sourire et se débarrasse du mien d’un geste impatient.
Mais ce Jour 5 ! Je reviens vers vous après le résumé de Jade. Mais Jade n’est pas disponible pour le moment.
Elle passe du temps au téléphone avec son amoureux, dans un nuage de prouts. Ça fait une heure. Nos prouts, ces jours-ci, c’est les Médiévales de Provins : joutes de chevaliers, tortures traditionnelles, catapultes (une portée d’au moins 1,50m) et petit concert de flûte. Au téléphone, elle parle, elle rit. J’avais oublié « le couple ». Je me rappelle de ces insignifiances, ces choses qu’on se dit juste pour que l’autre entende notre voix, et nous la sienne. Coller sa joue au téléphone pour sentir un corps amoureux.
On fait sauter le Jour 5, j’y arrive pas. Je me suis pourtant relevé dans une bourrasque de moustiques pour le faire remonter. Ça vient pas. Il est dans ma tête, il descend pas dans les doigts. C’est pas que je m’en souviens pas, c’est qu’il me paraît plat. A la place, je peux raconter ce qui se passe en temps réel.
Donc je suis assis dans la lumière de mon ordi. C’est le soir. En écrivant la nuit, je fais un don du sang. Trop de moustiques. Je vais arriver à Marseille avec la varicelle. Une chauve-souris vient d’arriver à la rescousse. J’ai l’impression qu’elle sait pour le bébé chauve-souris qu’on a abandonné. Mon bébé abandonné, j’ai décidé de l’appeler Monsieur Propre. Je me suis réconcilié avec l’esprit de la rivière : je dois juste honorer la mémoire de Monsieur Propre.
Autour de nous, le soir tombe, c’est joli. La lune imite à demi un lampadaire à boule blanche.




Jour 6 presque réaliste : Nulle part

Arrivée à Marseille ! Enfin !
A la gare, un petit mec agresse des gens. On est invités quelques jours chez Pierre et Clara. On arrive chez eux. Gênés, parce qu’on a oublié de prendre un cadeau pour les remercier. Ils ont l’air heureux de nous voir. Vent frais du nord. Mais ça me gêne quand même de pas avoir ramené de cadeau.
On mange une glorieuse salade riz melon. Clara est contente et excitée. Moi-même qui suis pas mal fatigué, je suis aussi pas mal heureux. On rit beaucoup. Clara, c’est une dure à rire. Ça fait monter la blague. NIVEAU 2 ! Bof.
Après le repas, Clara nous demande de l’aider à porter une table. On est fatigué mais c’est rien. Puis déplacer une armoire. J’ai des courbatures mais ça va le faire. Monter un frigo. C’est trop. Je commence à regretter d’avoir regretté d’avoir pas pris de cadeau. Faire un emménagement après quarante kilomètres, c’est un don d’organes. On commençait à suer, à froncer des sourcils, mais Clara nous dit : « C’est bon ! On a fini ! Pour vous remercier... » Elle nous sort la chose qui me plaît le plus au monde.
Le soir, je peux pas m’empêcher de passer la soirée à boire vite et je me mets une caisse ultimator. Personne n’en parle. C’est un peu honteux. Clara pourtant m’avait prévenu que le lendemain on devait faire des trucs.
On va chez Clémence et Anne-Laure pour faire des jeux. Surtout un jeu de rapidité. Je suis nul, je le vis mal. Je perds tout. Je suis gêné. Presque ça me gâche la soirée.
Sur le chemin du retour, en vélo, on essaye de deviner les notes des klaxons. Clara trouve. Pierre trouve. Jade trouve. Je me sens nul de rien trouver. Je dis rien.
J’ai l’impression d’être une version alternative de moi-même, un premier jet raté. Mais je m’en fous complètement parce qu’au moment où j’écris ces lignes je suis encore à Arles, un jour plus tôt, c’est le



Jour 5

- parce que le Jour 6 existe pas. Je l’ai inventé (insérez le rire gêné). Je compense le manque d’infos du Jour 5 en racontant n'importe quoi. Mais j’ai plus besoin de l’inventer.



Jour 6 plutôt réel : Presque Marseille

Le Jour 6, c’était efficace. Dernière étape. C’est de plus en plus facile, sans me vanter. Vous remarquerez que toutes les phrases qui commencent par « sans me vanter » sont prétentieuses. Comme « Je suis pas raciste » ou « Je n’ai fait qu’exécuter les ordres du Führer ».
On part le matin. On croise deux mecs en vélos qui viennent de là où on va. Un des mecs crie en passant : « C’est bon, on a vu la mer, vous pouvez y aller. ».
On arrive au bout de notre trajet. C’est presque la fin. Au bord d’un marché, je demande à une dame qui fait de la pâte : « Bonjour, excusez-moi ! — Bonjour... — On cherche l’endroit de la ville où il y a beaucoup de restaurants et tout ? » Vexée, elle répond : « Mais vous y êtes ! » Je la félicite.
On traverse un bras de fleuve sur le bac et on arrive au super camping : Les Bois Flottés de Camargue. Jade explose la porte en entrant. A l’accueil, un mec et une meuf. La jeune femme a les yeux écartés, un accent fort et des cheveux incroyables. Elle nous dit que ce soir y’a l’apéro de Thomas, ou Nico, ou Hugo. Je sais plus. « Ok on viendra ! A ce soir ! » J’explose la porte en sortant. Le mec est obligé de nous expliquer comment on ouvre une porte. En partant, je dis : « Désolé pour la porte. » La femme-otarie répond : « Quoi ? Désolé pour l’attente ? » L’apéro ça va être cool. J’ai hâte de réduire cette distance, si c’est possible.
Au moment où j’écris ces lignes, il est 19h. On est sûrement déterminés à pas visiter les marais salants. J’espère que Jade est en train de prendre cette décision dans la douche. Elle veut faire du vélo parce qu’elle a mangé du poulpe. Le lien apparaît pas tout de suite mais je vous assure qu’il existe. Moi je préfère rien foutre jusqu’au boire.
Je suis convaincu que l’ai mérité. Six jours que j’ai pas bu, ni fumé de spliffs, ni masturbé. Pourquoi ? Les causes et les effets de ces abstinences, je les capte peu. De toute manière, l’alcool, ça clapote une semaine. En général, au bout ça explose. Rien que ça m’excite, de l’écrire. Bientôt l’apéro. Hâte de les rencontrer tous, de leur parler. Hâte qu’ils sachent qui je crois être.
Ma vie, c’est un stade géant avec mille joueurs et des présentateurs professionnels, des sponsors et plein de caméras ; et dans les gradins, y’a juste un tout petit papi qui s’est perdu. Hâte de voir aussi Clara et Pierre, que mon faux Jour 6 soit pas prémonitoire.
Putain, mais Jade a raison : ici les mouches piquent.
Je vais dans les sanitaires pour écrire « J’ai plus de batterie ». Sur le mur, il y a une affiche : « C’est pas la force qui compte, c’est toi ! #TOUSPOMPIERS » Et c’est vrai que j’ai remarqué qu’ici, tout le monde est pompier. Il y a deux raisons pour lesquelles une région où vivent beaucoup de pompiers est plus sujette aux incendies.
Quand Jade sortira de la douche, on saura si on pédale ou si on boit. Elle sort. On pédale.
On va pas très loin. Les marais salants, c’est des étangs carrés, violets, brillants. On s’accroupit près d’une flaque bordée de glace acide. On trempe nos doigts dans l’eau rose. Cinquante degrés. Je prends un petit cristal de sel brut et je le mets dans ma bouche, qui prend feu. Je pousse un cri. Au loin, il y a des montagnes de sel avec des camions posés dessus.
On parle à un couple. On discute du tourisme en Camargue. On parle de prix, de visites. Sans faire exprès, je prends l’accent méridional : un « Aigueu-Mortes » s’échappe. J’éternue. C’est une technique un peu con.
On repart au camping après quatre minutes de vélo. La soirée va commencer : Les Apéros d’Ugo. Avec Jade, on se pose dans le restau à côté, boire du courage. Le DJ assassine Barry White avec David Guetta. Au bout de deux pintes, on s’approche prudemment. Jade prend une assiette de palourdes légères et fraîches.
Ma première bière est savoureuse. Je la bois en une minute. J’avais même pas encore commandé que j’avais déjà perdu le contrôle. Une deuxième. Je suis heureux de pouvoir parler avec passion de choses normales. On est trop intelligents, sobres. Et puis, il y a pas assez de vie sur Terre pour rendre les textes vivants. Le seul moyen, c’est de pas tout dire. Ou de boire. Je vais m’éclater la schneck.
Au bout de quelques pintes, Jade me dit qu’elle va rentrer. Demain on roule. Mais. Comment je vais faire tout seul ? Parce que j’ai besoin de rencontrer Femme-otarie et l’Homme qui explique comment on ouvre des portes. Jade part ! Je vais chercher une pinte au restau et je reviens.
Dans la panique, je fonce droit sur les gens. « Salut. Ma pote est partie, je peux rester avec vous ? — Question de merde. Assieds-toi. C’est quoi ton prénom ? — Sam, et toi ? — Thomas. — Honneur. » Femme-otarie s’appelle Jade. Pour plus de clarté je vais l’appeler Pas-Jade. Contrairement à ce que j’avais imaginé, Pas-Jade est sensible et Thomas peu sensible. Il y a un autre mec, Jules, surexcité et sympa. Il a 23 ans et fait le contraire. Il me présente tout le monde, dont le fameux Ugo des Apéros d’Ugo. Monsieur sympa qui explose mon verre en trinquant. Je hurle : « Fouette-moi ce verre galantement ! »
Au bout de trois secondes, on parle de drogues. Thomas dit : « Dans vingt minutes. » On va à sa roulotte avec Pas-Jade, qui est sa meuf. Ils sortent ensemble depuis un mois. En pleine conversation, il sort son téléphone et le met devant mes yeux. Il y a marqué : « Si tu veux prendre une trace, c’est dans les toilettes à côté du meuble. Ma meuf aime pas trop ça donc sois discret. » J’y vais. Je trouve pas. Je reviens en disant : « Je trouve pas le PQ. » On rediscute. Tout ça se repasse encore une fois. Thomas me remontre son tel, et cette fois il a pris une photo de l’endroit, entouré en rouge. J’y retourne. Je trouve pas. J’ai l’impression que je veux pas trouver.
Je suis préoccupé par cette cachotterie envers Pas-Jade. On parle de couple. Pas-Jade s’imagine bien rester avec Thomas pour un moment. Je regarde Thomas et je parle à Pas-Jade de mesurer l’engagement réciproque de chacun. Thomas me fait des grimaces. Je manque de tact. Je trouve enfin la C dans les toilettes. Je tape une trace. J’essaye de me rappeler la tête de Patrick Sébastien. Aucun effet. On continue à discuter. Je continue à manquer de tact. Thomas est intrigué par ce que je suis en train de faire.
Super ivre, je décide de les quitter. Je vais me coucher.
Ce qui va suivre, c’est Jade qui me l’a raconté. J’arrive droit sur le hamac de Jade et j’essaye de jeter mon duvet sur sa moustiquaire. Jade se réveille et m’explique que je me trompe de hamac. Je grogne. Je fais le tour. Je recommence exactement la même chose. Jade reste patiente. Elle a quand même un doctorat en Basile Picard. Et puis Jade, c’est jamais le genre à grogner, grommeler, râler, tous ces trucs que font les gens. Son caractère est optimal. J’arrive dans mon hamac. Mon duvet est tombé par terre. Je le rejoins.




Jour 7 : A Marseille on s’améliore

Dernier jour de vélo. On démarre à huit heures. Je suis encore ivre. Je sue. Je bois nos bouteilles d’eau. Au petit déj', on partage notre jambon avec des chiens sympas, et je recroise Thomas dans son camion qui me fait un grand sourire : « A la prochaine ! » On trouve des petits cadeaux sympatochiiiiinnnnn pour Clara et Pierre. On repart. Je suis mou. C’est dur. Quand on arrive à la gare, je suis pas trop vivant. Je mange du riz et je bois de l’eau. Ça va mieux.
On saute dans le train. Une dame, avec un visage dur et plissé mais qui s’illumine quand elle sourit, nous propose sa place pour qu’on puisse être à côté. On la remercie. La dame se moque de moi quand je me réveille « Putain ! » chaque fois que le train saute sur les rails.
On dort.
Arrivée à Marseille ! Enfin !
A la gare, un grand mec agresse les gars de la sécurité. Déjà-pas-vu. On va chez Clara et Pierre. Je suis content qu’on ait pensé à prendre des petits cadeaux. Quand on arrive, Clara est super contente et excitée de nous voir. Moi aussi. On mange une glorieuse salade tomates melons burrata. Ensuite on fait des jeux. Ça me fait plaisir, la vivacité de Pierre et Clara. De toutes mes amies, Clara est une des personnes que je connais le moins. Mais quand je la vois, je comprends que je l’aime. Et je suis heureux de la voir. Pierre est drôle et inconnu.
Le soir, on va voir un spectacle de drags dans une ancienne manufacture de tabac (et d’allumettes). Les lumières sont belles. Les gens sont beaux, éclairés.
Je rembobine.
Comme on boit du vin le midi et que j’en prends qu’un tout petit fond, je dois expliquer mon problème à l’assemblée : « Si je commence à boire, je dois rouler par terre. Je sais pas m’arrêter. » Avec un peu de lecture en tête j’aurais pu ajouter : « Je mouille, je humecte, je boy, et tout de peur de mourir. » Clara dit : « C’est bien de se connaître. » et elle sort plusieurs bouteilles d’alcool exceptionnelles en parlant de chacune drôlement. On goûte tout. Je passe la soirée à boire tranquillement, sans me mettre de caisse ultime.
On fait un Trivial Pursuit avec les amis du troisième étage, Anor et Clément. Je vis assez mal de perdre et de pas savoir grand-chose. Finalement je gagne, mais je suis triste. Quand elle voit que je suis en compétition avec moi-même, Clara me dit que j’ai gagné, que tout va bien, qu’elle a joué avec Pierre en voiture en faisant défiler les cartes du jeu sans faire attention aux choses qu’elle ignorait. Alors on se lit plein de cartes et ça me détend. « Tout va bien. »
Un peu plus tard, en vélo, on se demande quelles notes font les sonnettes de Clara et Pierre.
Je pense avoir trouvé, mais j’écrase le débat en me vautrant dans ma gloire. Clara, qui s’amusait à comparer les notes sur le petit piano de son téléphone, le range.
On a une conversation. « Tu devrais pas avoir d’excuse pour justifier ton comportement dominant, tes déclarations sentencieuses. » (je paraphrase) Au début, je m’excite. Je me défends. Je parle. Puis j’écoute... Elle parle de trucs précis. Des choses sur lesquelles elle est vulnérable. « Tout le monde est sensible. Personne n'est sûr de soi. » J’apprends. On est avec des amies. Mes amies m’aiment. J’ai pas besoin d’être en panique. J’ai pas besoin de leur prouver que je suis incroyable. Tout va bien.
A la toute fin de soirée, juste avant de se coucher, Jade et Clara me font marrer de ouf. Je suis heureux d’être ici. Intérieurement, je les remercie d’être comme ça, et je me remercie d’être arrivé jusque là, parmi elles.
On reste quelques jours à Marseille. Puis Jade s’en va.



Chapitre II
5 jours absolument pas réels



L’opéra secret

L’avantage quand t’es tout seul en vélo, c’est que si tu veux faire trois pauses dans la demi-heure, tu peux. Le désavantage, c’est que si tu veux faire trois pauses dans la demi-heure, tu peux. Après les montagnes de Marseille (280 merdes de chien de dénivelé) je m’effondre à Aix-en-Provence et je fais le mort. Je me fige presque une semaine.
J’ai pu prendre des détails sur les gens et faire le deuxième chapitre juste dans cette ville. Chaque matin, j’allais à l’accueil du camping pour régler la nuit suivante. Pendant cinq jours, j’étais convaincu de repartir le lendemain.

Je m’infiltre dans la vieille ville. Je cherche un resto. J’ai les moyens d’un repas.
J’en trouve un bien propre. Je glisse mes cheveux derrière mes oreilles. C’est raisonnablement hors de prix. J’ai pas le choix : l’entrecôte de 300 G interpelle mon jambon. Je le sens qui remue derrière moi. J’installe mon air souverain dans ce resto financièrement au pôle et je me repose dans l’ennui de mon personnage.
La meuf à côté de moi est un peu demandée en mariage quand je lui demande si ma clope la gêne. Elle répond « Ça va. » comme on dirait « Je le veux. » et je réponds « Merci. » comme on dirait « Savonnez ce chat qui pue. »
Je suis tellement sympa, je me félicite de manger. Je laisse pas une miette. La serveuse se fout de ma gueule. Je mange pour les jours de faim.
Frappé par le gras, je repars zigzaguer dans les petites rues.
J’entre au hasard dans une belle cour. Une porte. J’allais renoncer mais elle s’ouvre. Une dame s’engouffre et m’embarque avec elle. Le gardien se fige. Il me dévisage. La dame montre sa carte : Ministère de la Culture. La toute-puissance du gouvernement ! Le mec panique. « Calmez-vous madame. » Il trouve pas comment me faire passer. Il invente un truc. La dame me dit : « C’est pratique, ce genre de carte ».
Je fais caca dans le bâtiment royal. Une personne à tête d’autruche me dit de laisser mon sac avec elle. Je la considère. Je vais devenir ornithologue. Elle dit : « Je bouge pas, faîtes-moi confiance. »
Je visite. Il y a quelques tapisseries de Don Quichotte.
Y’a aussi des costumes d’opéra, depuis 1971. Tous de Cosi Fan Tutte. En fait, présentement, je suis dans l’Opéra. Je regarde les costumes et j’apprends les termes parements, culottes, colletin, pourpoints, chaperon, crêpe, manchette et motif cachemire. Aujourd’hui, je les ai oubliés.
En fait, c’est le Festival d’Aix. Je vois un fantôme passer à côté de moi. Il porte un dossier. Il fait partie du festival. J’ai envie de le suivre. De lui parler. On a cette chose en commun. Tout ce monde qui chante, pleure et s’arrache les cheveux en tendant les bras vers des amants larmoyants qui ouvrent des gueules béantes, la main sur la bite. Puissance grandiose de l’opéra qui pousse des cris de douleurs en se moquant de ses pantins. Au moment où j’écris ces lignes, on aime toujours les aphrodisiaques et les poisons.
Quand je reviens vers mon sac, l’autruche m’attrape le coude et me parle d’opéra. Elle voit que je m’ennuie. Elle se donne. Elle gesticule. Elle caquette. Sa voix devient aiguë. Je me demande si elle est pas bourrée. Elle dit : « Je pourrais parler de ça toute la nuit. — Ça me dérangerait pas. — Ah oui mais moi faut que je mette l’alarme. »
Ses bras sautent en l’air. Quand ses sourcils retombent de là où son histoire les a envoyés, ses paupières s’écrasent en accordéon. Je l’aime bien. « Quand la Révolution s’est terminée on a retrouvé les tapisseries de Don Quichotte enroulées au deuxième comme des tapis ! »
Je viens de lire un truc de Mérimée qui s’indigne qu’un marchand ait utilisé des tapisseries pour couvrir des charrettes. Mérimée devait voyager en avion. Personnellement, je clouerais la Joconde sur ma voiturette de golf pour épater Tamim ben Hamad Al Thani.
Le gardien me propose d’attendre la dame du ministère pour aller dans un autre endroit. Je vais pas non plus me faire adopter.



Trois femmes

Un monsieur est assis.
Ses mains sont croisées sur son ventre.
Il me regarde.
Son visage dégringole. Il a la bouche ouverte. Parfois il tire la langue.
Il me parle : « Ça fait du bien d’être à l’ombre hein ! — Ça dépend. — Vous travaillez ? - J’écris ce qui me passe par la tête. — Vous êtes étudiant ? — Je me promène. »
Il interpelle un gars en chemise blanche : « Oh la mairie ! — Bonjour.  — Vous êtes de la mairie ? »
Sans attendre la réponse, il appelle le serveur : « Ow ! — Qu’est-ce tu veux ? — Un jus d’orange, je suis pas pressé. T’as du monde ? — Aujourd’hui un peu plus calme. — Tu pars pas ? — Je voulais partir deux jours mais j’ai pas pu : quatre cents euros par tête. - Quoi ? — Quatre cents euros par tête ! »
Pendant ce temps-là, une maman trempe les pattes de son bébé dans l’eau de la fontaine. Je l’imite. C’est frais. Quelques mains nagent dans l’eau fraîche.
Une dame dit à son papa : « Trempe tes mains comme ça. Voilà. » Le vieux monsieur brasse l’eau en souriant. Je remarque : « Tiens, on brûle en Enfer. »
Pendant ce temps-là, trois femmes discutent.
La première a des cheveux blancs-blonds séparés en deux, surplombés d’une paire de lunettes rondes. Ses bras sont tannés de cet orange sombre tacheté de rousseur. Elle a des yeux bleus, des cernes gonflées et du mascara bleu. A son oreille, une goutte d’or enferme trois feuilles de jade. A son bras droit, une quinzaine de bracelets dorés, verts et roses. Un pompon à filets multicolores au coin de son sac rose. Elle a des sandales à bandes croisées blanches et dorées autour de pieds ridés qui finissent en longs ongles orange fluo. Son collier en or tressé pend sur la peau molle d’un menton favorable.
La deuxième a des cheveux blonds très fins pris dans une pince chocolat, et une petite fleur d’émail blanche qui court un peu plus bas. Des lunettes larges carrées à monture dorée et une grande bague rubis qui surmonte ses doigts fins et courts couleur or. A l’autre main une grosse bague en toc os et trois bracelets dorés identiques. Sa chemise bleu ciel ample et transparente pend légère sur son torse maigre, presque entièrement ouverte. Elle porte un collier doré très fin au ras du cou. Ses sandales sont blanches et dorées avec des semelles en liège et des lacets blancs qui s’entrecroisent assez haut sur sa jambe coupée par un pantalon large en lin.
La troisième est mince avec des rides fines sur les joues. Elle a des yeux noirs presque rectangulaires et des joues légèrement creuses. Sac en cuir noir et dent argentée au bout d’un collier. Plus bas, on voit une bande de chevilles blanches au dessus de baskets blanc pur soigneusement lacées en double boucles d’enfant. Des boucles d’oreilles ovales bleu océan se balancent quand elle bouge la tête. Sa main toute fine est éclairée par deux bagues en or blanc, une large et une petite.
Elles disent ça :
« Tu vois très bien qu’ils sont incapables de laisser leur gosse… deux jours quoi. Toi ta sœur c’est vraiment pire parce que, le jour où ils vont le laisser - Elle a quelle âge ta sœur ? — 148. — Et le gamin a quel âge ? — blablabla. — Ah d’accord. Nous on est jeunes par rapport à leur âge. Moi je suis contente de pas avoir blablabla. — Elle est pas moche hein. — Ouais c’est clair. Mais ça la rend moche. Regarde Gaétan, il est pas très beau et pourtant il est très gentil. Bah ça le rend appétissant je suis désolé ça lui rend un charme. Sa mère elle l’appelle, moi j’ai envie de lui taper dessus. — Ah merde, j’ai oublié de lui acheter un collier. — Au pire on peut prendre une chemise avec un T-shirt. — Vous voulez aller par où les gars ? — Je sais pas. — Est-ce que vous voulez qu’on passe par là, on trouve un truc pour se boire un coup ? — Une glace. — Bah une glace avec de l’eau. ».



Chantecler !

Au camping, il y a les papillons noirs, les papillons blancs, et les papillons noirs et vert-pâle. Il y a une galaxie de moustiques féroces accompagnés de toutes sortes de mouches, moucherons et autres bestioles qui floutent dans l’œil. Les cigales chantent. Parfois elles se mettent ensemble. Ça roule un bruit blanc d’écume télé. Il y a les grosses fourmis noires qui patrouillent et les petites rouges au bord des lavabos. Un petit cloporte de ça de là. La nuit, on peut entendre des sangliers hoqueter dans les sacs plastique, et le jour, des écureuils bondir partout. Il y a beaucoup de pies chiantes et quelques chats craintifs qui te regardent leur parler comme un imbécile.
Tous les pins sont dressés dans le sens de la pente. Ils lèchent des bouts de soleil. Sans eux, j’aurais flambé dans le jus de cuisson. Recette : soleil, sommeil, une noisette de crème hydratante, un peu de lecture et du savon à la fraise. Pour une cuisse tendre et savoureuse ! Des arbustes caressent mon genoux avec leurs grandes feuilles à blason médiéval. Des petits ronds de soleil pépitent sur les cailloux blancs. Les plantes basses habillent de leurs jupes à feuilles d’as les arbres les plus fins. Et de ces arbres des sosies de cerises tendent leurs petits bouts roses juste à portée de main.
A l’accueil, Rachida est un peu encombrée. Il y a une meuf pâle qui est presque de Perpignan. Une autre blonde avec des jambes fines et des seins émouvants. Asma, c’est une Parisienne aux yeux qui pétillent avec la peau mate et pâle d’excitation. Il y a un chef cuistot qui ressemble à Adam Driver et qui s’agite quand il dit qu’il est fatigué. Et le directeur, Lucas, qui veut que tout le monde boive des mojitos.
Au départ, je mange un burger cuit et cru. Quand je casse un verre Lucas crie : « Ça vaut bien un mojito ! » Je décline. On échange quelques blagues mais je reste client.
Le lendemain, je reviens avec cinquante balles et l’intention de lui faire honneur. Je prends un mojito. Je le congratule. Le directeur m’offre un shot de Pec citron. Je roule sur les bières en refoulant la famine de demain que ce détour va déclencher. Ils font un baby-foot. Le cuistot gonfle ses muscles et parodie la pression qu’il se met pour bien jouer. S’il gagne, faudra donner la coupe à la veine du front :
« La veine du front, émue, monte sur scène pour recevoir son trophée. C’est une chance énorme pour cette veine de pouvoir figurer parmi les plus grandes. La main sur le cœur, elle se tourne vers le public, une larme perle à son œil. ‘’Je n’aurais jamais cru ça possible. Ce qui m’arrive, c’est comme l’achèvement d’un chemin compliqué et, je ne sais pas où je serai demain mais, ce soir, c’est ce soir qui importe ! ‘’ On espère qu’elle tiendra ses promesses. »
On parle, on parle. On parle de trucs. Asma s’intéresse beaucoup. Elle enquête. Lucas fait des blagues excellentes d’un humour fermé qui cherche pas le compliment. De temps en temps, je trouve le tact de dire un mot. Dans un groupe qui se connaît bien et qui travaille ensemble, faut faire bande-annonce.
Parfois Lucas a des pulsions de conversation sérieuse sur l’argent, la famille et le mérite. « Je me serais contenté d’un studio comme toi. Pas cette grande maison. » Et d’un coup, quand Asma revient, il se tait, comme si c’était tabou, ou sacré.
On finit juste avec Lucas et Asma à parler de bisexualité. On me fait remarquer que depuis le début, j’utilise les chiottes des meufs. Je réponds : « Pas grave, je suis bi ». Je ris tout seul.
Cette nuit, il pleut. J’allonge la cape de pluie. Je touche pas une goutte mais ça sonne bien. Je dors bien.
Le lendemain matin, on dirait le soir. La lune est jaune. Les cigales chantent.
Les pins frottent leurs cheveux noirs sur des nuages de pompons dorés - Ohé ! — Les nuages de pompons dorés - Ého ! — Les nuages de pompons — Tu vas fermer ta gueule ? Y’a des gens qui essaient de dormir ! — Les nuages dorés ? - Eh con ! C’est pas un concours de poésie ! Ici c’est camping ! Tes nuages tu peux te les mettre — Ouais, va te coucher ! A nous casser les couilles avec tes conneries là !
Je me rendors.



L’église du Saint Esprit

[Quelques passantes]
Grande robe ronde courte étincelante d’argent avec fond vert eau et fleurs effacées violettes dessus, sandales de soldat à lanières de cuir, cheveux courts dorés et grosse poussette bleue.
Robe à fleurs rouges, Converses à fleurs, panier d’osier et cheveux platine.
Jupe en jean, chapeau de velours sorcière, sandales noires à semelles épaisses et haut en velours.
Robe courte violet clair avec des minifleurs peintes blanches à cœur noir, cheveux châtains bouclés mi-longs, gourde rose, sac blanc-beige et téléphone saumon.
A la question, pourquoi décrire que des femmes, je réponds : c’est elles qui sont les plus détaillées. Si je décrivais un mec, la plupart du temps ce serait T-shirt blanc, short beige, chaussures blanches.
A la question, pourquoi décrire que les vêtements, je dirais : « Pose pas trop de questions et continue à lire. »
J’ai besoin de reposer mes yeux. De l’ombre. Je m’éloigne. Je bouge dans l’air boisé qui devient frais. Je pousse une porte. Silence.
Je suis dans l’église du Saint Esprit. Je respire. Quand j’avance, le soleil déplace des flammes à travers les vitraux et fend les tableaux de lumières roses, violettes, oranges. L’ombre transparente de petits lustres éteints tombe des voûtes. Le fond de l’autel est drapé de soie rouge et les grandes bougies qui le parsèment montent vers une croix sombre, dont la dorure ternie absorbe les flammes. Les voûtes sont profondes, immobiles. Devant l’orgue suspendu un balcon tend son ombre sur les bancs dont le dossier est un trait de bois. Les bandes de marbre tirées le long de la pierre sont percées de morceaux de métal saturés de soleil. Le soleil qui descend fait monter une lumière rouge vers l’autel. Des lumières floues dérivent, tâches bleu marine, rouge-rose.
Un détail m’attire. Les piliers de la nef sont gardés par des statues armées d’épées avec des grands boucliers posés à leurs pieds. Une des statues brandit une épée de flammes, et de la main qu’elle lève pour se protéger, les doigts sont tranchés.
La statue remue... Je comprends pas. Je plisse les yeux... Elle bouge ! La statue bouge. Elle tourne ses yeux creux vers sa voisine. Elle lui dit :
« Alors là du coup t’es en vacances. — Je suis revenu hier, ça faisait 15 jours j’étais chez ma mère. — A Saint Raf ? — Nan ça c’est la famille de ma belle-mère. Là c’est vers Nîmes. Du coup y’a une copine à moi qui bossait au black — Tu voulais pas bosser au mois d’août ? — Tu me le dis maintenant ? — J’ai droit à un CDD de deux semaines ou trois semaines. — Je serais passée hier tu m’aurais dit oui. Parce que en gros je lui ai passé mon C.V. J’étais pas trop dans l’optique de bosser (attends j’allume ma clope, hmm) elle m’a dit tu serais dispo quand ? Parce que j’ai une semaine avec mon mec jusqu’au 20 août. Elle m’a dit qu’à partir du 18 c’est bon. Je pensais que j’allais bosser avec vous. — Bah Laure m’avait dit nan cet été t’as pas le droit et en fait si. Mais laisse tomber c’était carton meuf y’a personne. En plus ç’aurait été pendant les vacances de Loane. T’aurais pas bossé avec Maéva par contre. — Et fin août ? — Une semaine, je vais demander ça. — Je suis pas dispo encore mais ça m’arrange. Après je me suis pas encore vraiment organisée avec mon mec parce qu’on est en organisation pour les dates, mais si tu veux que je bosse une semaine, genre du 21 au 28. — Ouais, en plus c’est Marion qui est en vacances. Ça t’arrange. — Ça l’arrange elle, je pense. — Elle m’a dit qu’elle avait bossé avec une pote à elle, elle a dit c’était horrible. Comme quoi y’a des statues avec qui ça matche et d’autres avec qui ça matche pas. — Et du coup toi ? T’es parti en vacances. — Ouais ça fait genre un mois. — T’es toujours avec euuuh. — Nan. Pour l’instant je me prends pas la tête. — Si ça se passe bien — Après parfois quand t’enlèves les copains. Là je suis rentrée aujourd’hui je savais pas trop quoi faire, je suis allé boire un café avec lui comme on s’était dit qu’on devait boire un verre, et au final après - Attends ! — Hein. — Chhhhhhht. — Qu’est-ce qui se passe ? — Bouge pas ! — Mais quoi ? (chuchotant) Qu’est ce qu’il y a ? — (chuchotant) Je crois qu’on nous écoute. »
J’ai tout noté en temps réel. Heureusement que j’ai une trace. Parce que quand j’essaye de repenser aux statues il y a une espèce de bruit blanc qui m’envahit le cerveau.




Retour à Paris

A la gare d’Aix, j’arrive avec mon vélo. Le chauffeur me dit : « Non. — Non quoi ? — Pas de vélo. — … (je déballe la langue) — Fallait regarder sur le site, si tu peux pas mettre vélo, c’est pas possible. — Mais j’ai payé un supplément Special Luggage. — Faudrait qu’il soit démonté et mis dans un sac. — Ah lala. » Je laisse passer tout le monde en me mordant les lèvres (je dirai pas ‘’jusqu’au sang’’ même si on est dans une gare).
Quand tout le monde est monté, il revient vers moi : « Bon, on va le prendre, mais c’est parce que j’ai pas de monde. — Ouah ! » J’ouvre la soute : pleine. Deuxième soute : « Oui ! »
On roule jusqu’à Grenoble.
C’est pas moche. C’est pas beau non plus. Je cherche le centre-ville en espérant que j’y suis pas. Je trouve la Place Victor Hugo qui est à son image. Les chiottes publiques, c’est plus Baudelaire mais je vais pas faire caca dans le bus. Je remonte en selle et je trouve enfin la Grand’ Rue qui presque la plus petite du centre-ville. La rue Jean-Jacques Rousseau bifurque pas mal. Mais c’est un peu mort. Faut pas oublier qu’il fait feu : dimanche caniculaire y’a pas un caniche. La plus belle du centre, pour moi, c’est la rue Chenoise : petite et mystérieuse.
On dirait que personne s’occupe de la ville. Le contraste avec Aix me rend... bourgeois. Aix, c’est l’orgie de paillettes.
En attendant le nouveau bus, je me prépare à refaire la scène du vélo sur un chauffeur vierge. Mais je suis prêt à l’abandonner. Le chauffeur précédent m’a dit : « Pour la suite, c’est vous et votre chance. » Je renonce un peu. Je m’habitue à l’idée de m’en séparer. Mon petit vélo. Je lui dis quelques mots. J’enlève la petite attache du GPS comme on enlève le collier d’une vache malade. Je m’approche du chauffeur. Il enfante un visage : « Désolé monsieur, on prend pas les vélos. — Mais j’ai payé gnagnagna Special Luggage. — Fallait regarder sur le site. — Oh là là mais kloduc poulu grolu boudur. — Bon, vous avez de la chance. Ma fille a pété le TPE, je peux rien noter. On va le mettre de l’autre côté. » Sa générosité, le hasard et ma fourberie font équipe nette.
Le chauffeur prend la parole. Il s’appelle Frédéric, sa collègue Nathalie, on peut acheter du Coca pour 1 euro, les chiottes marchent pas, on fera une pause de 20 minutes à Mâcon. « N’hésitez pas à venir nous voir si vous avez des problèmes. » Je suis déjà en train de me lever.
En partant, on traverse des grosses montagnes qui suent de la neige agonisante dans les plaies supérieures. C’est ça qui est beau à Grenoble. Le fleuve aussi, qui remue ses eaux.
On va vers le Nord. Juste au moment où je commençais à m’habituer au soleil. Chaque jour, c’était rond jaune sur ciel plat. Moi je faisais bacon. Mais je suis pas un enfant du soleil, ni de la lune. On rentre dans des nuages froids. J’ai des frissons de joie. Ça me fait peur. Voilà la raison de l’orage. Voilà Zeus, qu’on appelle aussi temps de merde. Ça y est, il pleut. Ça m’excite.
A celui qui écrit « Il pleut sur mon cœur comme il pleut sur la ville. » je réponds : « Quand il pleut sur ma tête, ma chatte est mouillée. » Je ferme la fenêtre.


FIN

= commentaires =

Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 06/05/2025 à 06:58:27
1ere nouvelle de l'appel à textes hommage à Hunter S Thompson mais en fait non puisqu'il y avait le dossier "Trop bizarre pour vivre, trop rare pour mourir" et qu'in fine les textes de cet appel collent parfaitement à cette catégorie.

On publie à présent une contribution Hunter S Thompson un jour sur deux en espérant que ça fasse un appel d'air et qu'il y aura d'autres contributions avant la date limite du 1er Juin.

N'oubliez pas d'ajouter un hashtag #HST ou #IA pour l'autre appel en cours, par exemple, pour faciliter la vie des admins.
Cuddle

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Pute : -6
    le 06/05/2025 à 12:19:58
"une entrecôte surgelée[...], ça me fait penser à la texture d’une chatte."

WOW, O_O j'étais pas prête.
Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 06/05/2025 à 12:21:52
Peut-être qu'il rêve de baiser la mère Noël ?
Mausel Crine

Pute : 2
baiser la mère Noël    le 06/05/2025 à 15:05:53
C'est fait. Quatorze ans que je suis en TIG sur le traîneau
Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 06/05/2025 à 15:15:46
Et ta langue ne reste pas collée à cause du gel ?
Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 06/05/2025 à 15:20:47
Sinon j'ai bien aimé le traitement des effets de la drogue dans ce texte car on ne s'attarde pas sur la prise et le pathos qui pourrait en découler mais que, au contraire, l'auteur switche d'un état de conscience à un autre sans prévenir le lecteur la plupart du temps. C'est originale, j'ai jamais lu ça ailleurs. C'est quelque part entre du Philip K. Dick et du Marcel Pagnol.
Mausel Crine

Pute : 2
    le 06/05/2025 à 15:23:57
A vrai dire, il n'y a qu'une seule prise de drogue, la pauvre coke au camping des Bois Flottés.
Dans le prochain texte (si vous me tolérez), je suis défoncé du début à la fin, copieusement, mais la drogue n'apparaît pas.
Mausel Crine

Pute : 2
    le 06/05/2025 à 15:24:07
(merci !)
Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 06/05/2025 à 15:27:21
Pour illustrer la story instagram j'ai mis un extrait de "Bicycle Race" de Queen mais j'ai longtemps hésité avec "à bicyclette" de Yves Montand que je trouvais bien plus LSD-compatible que la chanson du groupe de Freddie Mercury. Cependant, j'ai tranché en me disant que du Queen c'est quand même plus cool que du Yves Montand tout en sachant que les deux sont hasbeen.
Mill

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Pute : 14
    le 06/05/2025 à 15:27:59
Beaucoup apprécié. Au début, je me disais, wow, ça va être loooooong.

Certes un peu oui, mais pas dans le mauvais sens du terme, en fin de compte. C'est un texte qui prend son temps, comme son narrateur/personnage. Il y a une placidité là-dedans qui t'emporte tranquillement. Rien n'étonne mais tout surprend. Moi, ce n'est pas la prise de produits qui m'a marqué, mais le gars qui fait un malaise à la gare, super leitmotiv.
Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 06/05/2025 à 15:36:04
5eme texte du dossier "Trop bizarre pour vivre, trop rare pour mourir" qui reprend pour rendre hommage à Hunter S. Thompson et les 20 ans de sa mort et on en a quelques autres qui seront postés tous les 2 jours en alternance avec des nouvelles de l'appel à texte permanent. Si vous voulez être publiés plus rapidement n'hésitez pas à répondre à cet appel en indiquant #HST à coté de votre titre, vous bénéficierez de l'effet coup de put... heu, effet coupe-file, je voulais dire, bien entendu.
Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 06/05/2025 à 15:40:41
*début du disclaimer*
@Mausel Crine : on est d'accord, tu es une grande personne qui fait ses choix et possède un libre arbitre. Personne ne t'a forcé à te défoncer pour écrire ton texte... J'ai même mis un warning quelque part pour vous implorer tous de ne pas prendre d'adrénochrome et autres saloperies. Seul le coca zéro est toléré.
*fin du disclaimer*
Mausel Crine

Pute : 2
    le 06/05/2025 à 15:43:11
Nope, j'ai écrit sobre
Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 06/05/2025 à 16:07:09
Quand tu dis "je suis défoncé du début à la fin, copieusement" et que t'ajoutes "j'ai écrit sobre" excuse moi, mais ce sont des propos de drogué. Mais c'est pas grave. Faut de tout pour faire un monde.
Mausel Crine

Pute : 2
    le 06/05/2025 à 16:10:14
hahaaaaaa j'étais foncedé au moment des faits que je relate, mais je n'ai pas pris de drogue pour écrire, il se trouve que parfois il pleut de la drogue et qu'à la redescente il faut témoigner sobre, déjà que c'est pas hyper transparent un récit de trip, autant essayer de le mettre à plat avec le peu de cerveau qu'il reste à la sortie
Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 06/05/2025 à 16:10:46
Quand j'ai lancé l'appel à textes "hommage à Hunter S. Thompson", j'ai cru faire du pied à de bons auteurs pas à des camés. Je suis innocent votre honneur, c'était un malentendu.

Je déconne bien sûr, chacun sa drogue. Moi je gobe de la Play-Doh.
Mausel Crine

Pute : 2
    le 06/05/2025 à 16:24:42
après si tu veux que je me justifie comme le pauvre camé insecure et tremblotant que je suis (mais une trace sur 9000 mots c'est pas l'apocalypse), bon auteur et camé ne sont pas exclusifs, vieux bouffeur de pâte à modeler (ce qui, indirectement, est une forme de pédophilie culinaire)
Magicien Pampers

yt
Pute : 10
Mais    le 06/05/2025 à 17:17:08
Alors?
C’est sans doute toi qui m’a volé mon vélo vert ?
Cuddle

fb
Pute : -6
    le 07/05/2025 à 14:58:44
J'ai bien aimé le passage sur les marais salants, très poétique. Le texte est certes un peu long.
Je me suis demandée tout du long si la prise de C était constante, car peu exprimée. Prometteur pour la suite.
Mausel Crine

Pute : 2
    le 07/05/2025 à 16:18:06
Pas du tout, faut pas bloquer sur la drogue, le protagoniste en prend une seule fois, le Jour 6, et c'est tout. Une ligne (de texte) sur 9000 mots.
Ce n'est pas un texte sur la drogue.
Merci pour les compliments !
Mausel Crine

Pute : 2
un peu long    le 07/05/2025 à 16:20:00
Ouais y'a un gros ralentissement au chapitre 2, ça correspond à la stagnation du narrateur qui arrête enfin de bouger, mais c'est un peu cassant j'avoue
Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 07/05/2025 à 20:27:07
En même temps, t'es pas obligé de tout raconter. Les personnages, eux aussi, ont le droit à une vie privée. Par exemple, ils ne font caca que quand ça sert l'intrigue comme Vincent Vega dans Pulp fiction.
Mausel Crine

Pute : 2
    le 07/05/2025 à 20:33:35
Heureusement pour nous, ma mémoire de chimpanzé ne me permet pas d'être exhaustif
Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 08/05/2025 à 20:39:35
comment le sais-tu ?
Mausel Crine

Pute : 2
    le 09/05/2025 à 11:40:45
Parce que j’ai le rapport de Jade qui me confirme que j’ai oublié la moitié de l’aventure
Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 09/05/2025 à 11:46:49
de quoi on parlait déjà ?
Mausel Crine

Pute : 2
    le 09/05/2025 à 11:50:19
Poutine
Lapinchien

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Pute : 13
à mort
    le 09/05/2025 à 12:07:09
ah ouais et mon point de vue était :

La Poutine typique Québécoise
La recette originale de la poutine québécoise
Pour 4 personnes
Préparation : 30mn

Vous n'avez pas encore goûté à la délicieuse poutine québécoise ? C'est le moment idéal pour vous lancer et la préparer chez vous. Avec ses frites croustillantes, sa sauce brûne chaude et goûteuse et sa couche de fromage en grains fondant, cette recette est un véritable délice pour les papilles. Vous pouvez personnaliser votre poutine en ajoutant différents ingrédients tels que de la viande de boeuf hachée, des champignons, des oignons et bien plus encore. Alors, sortez vos casseroles et préparez-vous à vivre une expérience culinaire unique et délicieuse avec la fameuse poutine québécoise.

Ingrédients :
5 pommes de terre (ou plus selon leurs tailles)
1 sachet de mélange à sauce poutine
1 sachet de véritable cheddar en grains Québécois, le fameux fromage à poutine "couic-couic"

Préparation des frites :
Peler les pommes de terre et les couper en bâton
Mélanger les frites dans l’huile puis les déposer sur une plaque de cuisson
Enfourner pendant 20mn à 160° pour la cuisson puis à 190° pendant quelques minutes supplémentaire pour le croustillant

Préparation de la sauce :
Verser le contenu d'un sachet de sauce dans une casserole avec 600 ml d’eau froide
Porter à ébullition en mélangeant avec un fouet constamment
Réduire le feu et laisser mijoter quelques minutes en remuant régulièrement

Dressage de la véritable poutine du Québec
Dans une assiette creuse, déposer les frites puis verser la sauce sur celles-ci et enfin ajouter le fromage en grain.
Si vous aimez le fromage fondu, vous pouvez mettre les frites avant la sauce.

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