Au-delà de nos morts…
Ego The Seum
Mais les coyotes ne sont pas aussi stupides que nous - ils ne s’aventurent pas dans les lieux fréquentés auparavant par les morts. Ils poursuivent leur route et s’en vont faire entendre leur chant ailleurs.
(Le chant du coyote. Colum McCann.)
En hommage à Mister Harry Crew.
Roadtrip à bord de ma caisse, une Buick Roadmaster Blue. Et des kilomètres à n’en plus finir, à en mourir... Le Painted Desert et ses villes trous-du-cul-du-monde, Sundance Desert, Gallup, Bodie et autres bleds plus ou moins paumés. Avec comme destination finale : Neverhope. Gardien ultime du désert, un phare abandonné face à un océan de sable et de roches colorées. La fin de notre voyage pour solde de tout compte comme je l’ai toujours pensé et si on m’avait demandé dès le début comment cela finirait entre nous, Mariana, je l’aurais dit sans hésiter. Je roule sans interruption depuis des jours et des nuits à coups de tequila Don Julio Real, cinq ans d’âge, cinq ans à m’attendre dans un fût en chêne blanc mélangée à du Red Bull histoire de tenir le coup, jamais bourré jamais rassasié et moi qui bois probablement depuis que je suis né et
Mariana je te vois, chambre d’hôtel au lit défait et Mister six-packs auto-proclamé tout bronzé, un sportif, enfin un truc comme ça dans ton dos dénudé, buté dans ton intimité et toi hmmm… et toi et moi, hmmm le Bambino mio ! Et moi qui te regarde, et moi qui me condamne, le Bambino mio à sa Maman - mon surnom - elle qui me trouvait affublé d’un si mauvais caractère déjà tout petit...
et toutes ces femmes que je croise en voiture, pas de klaxon ni de portières qui s’entrouvrent comme une invite à monter, non, ou que je siffle - non non, juste un regard vers elles, seule ou à plusieurs dans le soir qui tombe, elles encore présentes dans la nuit qui s’enfonce, elles à trois ou à deux ou en solitaire, employée station-service, infirmières, étudiantes ou serveuses qui arpentent les rues malgré la nuit, elles encore en vie et au moins une qui s’arrête de parler et vivre, de rire, et son sourire se fige quand elle me regarde passer au ralenti et son visage se meurt, soudain plus grave dans la nuit qui nous enveloppe et la fille me dévisage l’air de se demander : Quoi ? Est-ce que j’existe encore ou est-ce un mort-vivant qu’elle voit passer, la fille seule parmi les autres filles seules - mes proies préférées, moi le déglingo...
Et moi, le Bambino mio, bourreau de femme à l’occasion, je passe et trépasse devant elle, la fille en solitaire, muette devant mon corbillard qui processe vers la fin, vers ma fin et je roule roule roule avec, de temps en temps, flash-back et retour vers le passé…
Mariana, chambre d’hôtel avec un mec derrière elle, le six-packs au bide sculpté impeccable et qui la prend hop hop ! Et qui la martèle hop hop ! Il la gobe, appliqué en elle, buté en elle et elle se marre et le regarde, I’m good ! qu’elle lui dit et elle se retourne vers toi et te dissèque petit mec, yeux dans les yeux, regard bleu minéral posé, figé sur toi pour voir quel effet ça te fait de la voir se faire prendre comme ça, devant toi par Mister six-packs à barre d’acier et elle attend, Quoi ? Qui ? Mais si… Mais si tu sais, mais si tu le sais et tu l’as toujours su, et depuis le début, qu’elle t’attendait. Oui, elle t’attend et te provoque dans tous ses gestes, dans tous ses actes, dans tout son corps, dans ses sourires qu’elle balanstique à son amant de passage, ce mec qui s’active arc-bouté derrière elle comme un percheron assidu sans classe ni génie, et tout te le prouve - sa provoc’ sexuelle - même sa position, elle allongée devant toi sur le lit et une de ses mains soulève ton caleçon et te cherche et te trouve et sa bouche s’enroule autour de toi dans une récompense infinie, une attention douce, humide, liquide et appliquée - anesthésie en lèvres rouges - et tout en elle te suggère ce qu’elle ne peut plus te dire toute occupée qu’elle est à te satisfaire, désormais penchée sur ton bide, yeux relevés vers toi et elle te regarde évoluer vers ta juste et douce colère… Vengeance et Jalousie, un truc comme ça.
Mariana, si près et si loin maintenant... Je n’avais juste pas prévu de ne plus pouvoir vivre sans elle.
Je change de station, les infos m’emmerderont toujours et Smiley me raconte que… We’re right, ‘til we weren’t, Built a home and watched it burn. (Nous étions bien, jusqu’à ce que nous ne le soyons plus, Nous avions construit un foyer et nous l’avons regardé brûler)
Mariana voulait s’attacher les services d’un homme tombé si amoureux qu’il accepterait tout d’elle, un homme pour qui elle aurait suffisamment de respect, respect pour sa déchéance annoncée, respect pour sa liberté sacrifiée… Oui, tout sacrifier pour elle, rien que pour elle, et tout ça parce qu’elle l’avait choisi et le voulait, lui, comme exécuteur possible des basses œuvres. Voilà comment elle le souhaitait. Oui. Absolument. Oui. Comme elle le désirait, oui. Tout à fait - ça. Oui.
Femme/enfant, regard fier et belle mâchoire carrée, la jeune chaman Cherokee se dresse seule sur le sommet d’une mesa dans la nuit des Natifs, son tambour dans une main tandis que de l’autre elle rythme... Tam Tam Tam Tam tom tom tom tom Tam Tam Tam Tam… Tu passes devant elle, cette jeune inconnue, juste quand tu t’enfonces dans ce désert improbable, immense et coloré et blanc, immaculé à tour de rôle, un fantôme de plusieurs milliers de mètres carrés où tu as le bon goût et la décence de te perdre, et pour toujours. Alors tu te souviens du grand coyote gris et comment ta Buick Roadmaster Blue tatouée de poussière l’a envoyé bouler dans le fossé - fatigue et alcool, tu ne l’as pas vu surgir sur le bas-côté de la route - et tu es descendu et tu l’as regardé mourir, oué ! Et lui, le grand coyote gris, il se tortillait et gémissait de tout son long de tout son sang, toutes ses tripes à l’air, fumantes et grises et rouges et ainsi de suite, et comment tu l’as achevé avec ta hache dans un grand geste d’amour devant toute sa souffrance, ses yeux rubis hallucinés et tu l’as carrément coupé en deux - yeap ! - en deux, oué, alors il a glapi, oué, glapi une fois, juste une fois, une dernière fois et tu l’as interpellé ‘hey salut grand coyote gris ici c’est ton ami le Bambino mio ! Et t’inquiètes pas, bientôt je serai à tes côtés à la droite du grand sachem - le grand sachant tout - et on ira dans les grandes prairies courir après les lièvres et les chevaux et les bisons et on sera bien, oué, cool mon ami, si bien le coyote gris tu verras ça.’
Alors tu pénètres dans ce désert comme dans une paix immense, une vérité que l’on t’offre et que tu pourchasses et découvres enfin à condition de la mériter et rien, Mariana t’a utilisé, toi son amant préféré, et les autres, les six-packs serviables en tout. Prêts à tout, les moutons de la bèze, du moment que ton cul, oué Mariana, ton merveilleux cul devenait enfin accessible à tous et tu t’en es servi parmi toutes ces fureurs physiques - LE SEXE - pour ce dont tu en avais besoin et non envie. Et pour ça, pour moi, mon credo cette belle phrase tu ne sais plus de qui mais ça dit ça, ‘en amour, l’unicité est un leurre et une douleur’ et tu as toujours voulu croire le contraire, pauvre amoureux des femmes qui croit et espère malgré tout, mais rien, et tu es seul désormais, juste une belle lune ronde immaculée au-dessus de toi comme un cadeau - une belle pièce d’argent - et le désert t’absorbe comme une femme avide aux cuisses éternelles écartelées, et tu l’enlaces et tu t’enfonces, fonces fonces dedans, si loin et si fort que jamais ils ne te retrouveront.
Alertés par Mister six-packs, les flics sont enfin entrés dans la chambre d’hôtel et ils ont découvert Mariana au visage de vaudou ravagé et ses yeux bleus regardent en permanence la même lune à travers la même nuit et depuis si longtemps, elle et son incroyable et beau sourire affiché, yeap ! Réunis à nouveau tous les deux dans ta caisse, ta hache de guerre rouge sang répandue sur le tapis de sol, et Mariana La Bamba vient te serrer dans ses bras, elle derrière toi qui conduis et tu sens son corps à l’odeur de cendre mêlée à ce parfum fade et nostalgique de fleurs fanées et elle t’embrasse dans le cou et te sourit et rien, pas un mot, juste ses baisers de petite fille pour se faire pardonner et l’instant d’après elle n’est plus rien, partie de nouveau dans sa nuit alors tu allumes une clope, une Lucky - chance en anglais - et tu te demandes comment et surtout QUAND tu vas crever et tu entends au loin le tambourin de la fillette/chaman qui t’accompagne et te guide jusqu’à la fin des temps - toute ton histoire - et tu revois tous ces bleds que tu as traversés, surtout la nuit afin que personne ne se souvienne de toi, et deux jours que tu conduis non-stop, boire et conduire, yeap ! conduire et boire, oué... Hallucinations et fantômes se mêlent au réel, présent et passé confondus et qui plus est dans un décor de fin du monde alors, qui est qui ? Tu ne sais plus trop bien, hein, en fait tu ne sais plus rien du tout et tu souris soudain à la voix du vieux Tom Waits qui vient s’époumoner et mourir dans l’habitacle de la Buick et il se lamente et pleure comme tous les mecs en amour… Tonight I’m gonna take that ride, Cross the river to the Jersey side, Take my baby to the carnival, And i’ll take her on all the rides… (Ce soir je vais faire ce trajet, Traverser la rivière du côté de Jersey, Emmener mon bébé au carnaval, Et je prendrai soin d’elle durant toutes ces sorties… )
Je n’ai jamais aimé que toi, Mariana, et Toi, tu n’as jamais aimé personne... Et surtout pas ta vie au point de vouloir en finir, t’avais à peine 27 ans et plus rien ne te rattachait à la vie et tu avais enfin trouvé ce qu’il te fallait, ce qui te plaisait le plus : le Sexe au point de t’en servir jusqu’à en crever et moi, je t’ai suivie. Pour l’odeur de ton corps, pour ta peau, tes formes fluides à jamais figées dans le temps et tu reviens me prendre dans tes bras et c’est toi qui a eu l’idée du threesome, deux hommes - moi et mister six-packs - qui s’empoignent et s’étreignent comme des brutes dans la boue, chorégraphie sauvage de nos deux corps cramponnés à toi afin d’assouvir ta fureur et ton dégoût de vivre et je n’y pouvais rien, mais alors rien du tout si ce n’est que je me doutais à l’avance comment tout ça finirait - mal - et tu le savais si bien toi aussi. Pire, tu le désirais. Plus que tout.
Le sourire de la délivrance et la bèze comme ultime salut, et Fuck !
Je me souviens de la traversée de la ville de Gallup un peu plus tôt, et comment je suis passé au ralenti devant le Roxy, le cinéma du centre, sa façade clignotait de partout, néons éblouissants aux lumières roses dorées et ça éclaboussait le trottoir et le bitume, et là, sur la route, quelques bagnoles se croisent en fin de soirée. Sortie de séance au cinoche et je vois les jeunes, les mêmes qu’il y a 20 ans - New kid in town, nous serinent les Eagles à la radio - les coupes de cheveux ont changé, les jupes en jeans et les sweats aussi mais au fond, rien ne change vraiment... Nan. Trois jeunes filles descendent les marches du cinéma comme des stars d’avant sous une pluie de lumières confettis, elles discutent, rigolent en buvant du coca et de l’alcool, fument des joints et quand je suis passé au ralenti devant leur groupe, l’une d’elles, cheveux courts et sweat orange, s’est détournée de ses copines et son visage s’est affaissé tandis qu’elle me regardait passer dans ma Roadmaster et je la regardais moi aussi, comme ça, l’air de rien, juste une vie qui s’écroule et je me demandais, je me souvenais de Clint Eastwood dans l’inspecteur Harry et d’une de ses répliques, « It’s not your lucky day, today... » (Ce n’est pas ton jour de chance, aujourd’hui) et je me suis dit tandis que je voyais la fille s’éloigner dans mon rétro, son regard de poisson mort noyé sur moi et sur ma caisse, oué, je me suis dit : Ça n’a JAMAIS été mon jour de chance. Nan. Jamais.
Et la nuit m’a repris. Et les regrets aussi. A la radio Eagles nous les brisait encore et toujours, Night after night you’re willing to hold her, Just hold her tears on your shoulder… (Nuit après nuit tu veux la prendre dans tes bras, Juste retenir ses larmes sur tes épaules)
Plus loin, encore et toujours plus loin j’ai rejoint Bodie, enfin Body pour les intimes. J’ai atteint cette ville après des heures de cagnard, de sueur brûlante et salée, de soleil qui te hurle dans les yeux et rien, juste un immense bourdonnement et moi qui picole et le désert se rapproche, et je le sais, et le désert est là, bientôt, et je le sens. Bon, j’arrive à Body la nuit tombée et je me gare dans une de ces rues désertes, abandonnées aux rares touristes la journée. Quelques habitants vivent en bordure de ville dans un groupement de baraques aux allures effacées. Derrière les fenêtres les flammes des bougies s’essoufflent en discrets soupirs de fumée, timides gardiennes à jamais de l’immobile et je suis là et la voiture respire, expire, respire et expire encore, exténuée, elle se repose et moi, je regarde les maisons abandonnées et : Body, ville fantôme. La fièvre de l’or, le métal qui rend fou, toute l’histoire est passée par là, de 0 à dix mille habitants en si peu de temps et aujourd’hui Body n’est plus une ville mais juste l’expression des âmes perverties, celles des chercheurs d’or, de ceux qui y ont cru jusqu’à ce qu’un de leurs enfants, le joueur de flûte de Hamelin, ce sale môme leur joue un sale tour et les rendent tous fous après avoir mis le feu aux baraques en bois... Une fois, deux fois et tous les rats sont partis et tous l’ont suivi, le bel ange blond, et Body n’existe plus, non, rien, juste le désir d’un passé dépassé et rien d’autre que des âmes perdues qui errent de baraques calcinées en restes de repas pourris dans des assiettes figées sur les tables, et les fringues sales et vides, flasques des corps disparus, hommes et femmes mélangés et rien, je regarde ça sans bouger, un goût de carton dans la bouche et je descends de ma caisse pour aller pisser dans la ville fantôme. Les points de lumière des rares maisons occupées, les habitants qui gèrent ces ruines à touristes, tous dévisagent, étonnés, l’arche effrangée de mon urine rouge sang me brûler la peau sous un clair de lune de couleur identique. Puis, rien, douleurs et souvenirs s’effacent un à un et dernière supplique : surtout ne rien emmener avec soi de Body la funeste, non, rien, pas de morceaux de tôle rouillée comme uniques souvenirs - les carrosseries en dentelle des Buick et antiques Ford - pas de planches de baraquement non plus, non, rien et surtout pas le pire : s’introduire dans les maisons encore valides et piquer, quoi, un bout de truc, un bout de machin... Un reste du passé. Non, Body ville hantée vous a tout pris - votre vie - et ne vous donnera plus jamais rien de bon. Juste le vent du désert qui s’engouffre en hurlant dans les ruelles désertes pleines de poussière et d’ennui. Je remonte dans ma caisse, les points lumineux me guident et me regardent, affligés, et je pense à Mariana, à sa silhouette de rêve, son odeur et son goût, le goût tranquille et doux des femmes qui se font souvent lécher. Je ferme les yeux tandis que je sens ses mains s’enrouler autour de mon cou, mains douces et fraîches presque froides tandis qu’elle me susurre, Bambino mio, tu viens me rejoindre quand dans le désert désert ? Hein, quand ? Qu’on reprenne notre vie commune sous d’autres cieux. Et je dis rien, nan, rien, tout autour de moi un monde s’écroule, un monde que l’on voudrait TOUJOURS meilleur alors je tête une dernière rasade de Tequila La Bamba et je ferme les yeux, ok, et je m’endors, ok, et j’emmène avec moi dans un sommeil sans fond des visions de rats, de haches ensanglantées, de yeux bleus de biche qui me fixent et m’exécutent, un flash de blonde décapitée et le Bambino mio qui n’y peut oh ! mais alors rien du tout…
Oui, Mariana, tout est en-fin à toi
Je sombre jusqu’au matin. Bon, je me réveille cassé de partout avec un goût de fer et d’excréments dans la bouche. Pourrir, est-ce que je suis en train de pourrir, moi le Bambino mio à sa maman ? Je me frotte le visage, se laver on verra ça plus tard, une dernière gorgée de Tequila mon amie à moi et le Red Bull me donne un coup de fouet et je démarre. La caisse renâcle mais obéit et je sais que tout a une fin et celle de mon roadtrip n’est plus très loin. Je m’arrache des fantômes et de leurs cendres, de celles qu’une très mauvaise connaissance à moi avait jugé sales quand il avait fallu les disperser à la mort de sa mater - Alors je m’tire.
L’asphalte étire son ruban gris de poussière loin devant moi et rien à dire, si ce n’est que je suis au bout de la route. Au bout de nulle part. Au bout de mon monde. Bon. Je me mets en mode automatique et je roule si fort et si loin - si longtemps - qu’il n’y a plus rien à dire et espérer sinon que je deviens mécanique. Tout vibre dans mon corps et quand je m’arrête pour manger un sandwich au thon dans une station service, rien à faire, je vomis tout ce que j’avale. Et je pisse. Rouge. De nouveau. Yeap ! Mariana, ton rouge est désormais en moi.
Bon, j’vais pas en faire des caisses alors j’arrive enfin au bout de la plus longue ligne droite du monde, plus de 100 bornes sans virage. J’suis plus en vie, même plus envie, à moitié mort, Neverhope est là, et la ville me tend ses bras silencieux. Je ralentis parmi les maisons encore debout, un peu branlantes, et je vois la femme. Je stoppe la caisse, elle s’immobilise en douceur, son moteur cliquette et c’est bien tout. Devant moi, les rives de la Little Colorado et entre nous deux : la femme. Je descends de ma caisse. Assise entre un auvent en bois bleu délavé et une terrasse aux reflets gris-argent, la femme se tient de profil sur un rocking-chair. Face au fleuve. A cet endroit ça fait comme face à la mer, une anse tellement large qu’on ne voit pas la rive de l’autre côté des eaux turquoise. Je m’approche de la femme, cette inconnue. Je sens plus rien. Nan, nulle sensation comme si j’allais crever d’indifférence. Je m’arrête près d’elle, la femme au rocking-chair. Pas de barrière, à ses pieds une corbeille de donuts au chocolat plus une cafetière remplie d’un max’ de café fumant ; je me prostituerais rien que pour une tasse. De la femme je vois rien qu’un profil, plutôt agréable d’ailleurs, un profil de quadra qui ose enfin dire son âge, un visage doux et calme, sans artifice. La femme fixe cette mer miniature puis, son profil toujours tendu vers la Little Colorado, elle me dit, vous savez que le poisson natif d’ici, le Humpback chub, est en train de mourir, de disparaître à jamais ? Vous le saviez, ça ? Elle me parle, même pas surprise de ma présence. Tout ça à cause de leurs barrages, toutes ces constructions artificielles qui abîment leur habitat naturel à ces Gila Cypha, leur nom latin vous savez. C’est pénible, vraiment. Elle baisse la tête, cherche ses mots. Ça n’a pas de sens. Non... Vraiment pas. Et puis il y a tous ces nouveaux poissons qui viennent d’arriver, d’où, on ne sait pas et ils mangent tout. Tout. On dirait des tueurs à gage, des espèces de cannibales qui bouffent tout ce qui vit, en priorité les femelles. Parfois, ça change tellement vite ici. Gestes ronds de ses mains et le regard de la femme m’englobe, maintenant complètement, et je ne sais pas comment ils sont arrivés là, ces poissons-tueurs... Vraiment, je ne sais pas. C’est un mystère.
Je ne réponds rien, pas tout de suite, je regarde les gâteaux au chocolat, je crève d’envie d’une tasse de café et à genoux s’il le faut, et la femme me regarde toujours, silencieuse au léger sourire, et je réponds, oui, enfin nous sommes tous en train de disparaître…
Ah, elle me regarde bien en face, amusée, un philosophe... Vous êtes auteur ?
Non, juste quelqu’un qui a faim. Et soif de caféine.
Elle me sourit, toujours tranquille, étend ses jambes gainées de coton couleur crème, un jogging dans lequel elle semble à l’aise puis elle dit, tenez, servez-vous... Ne vous gênez surtout pas. Je craque de partout quand je me penche pour saisir une tasse de café. Au passage je prends un donut, pas sûr de le digérer plutôt le gerber sauf si j’y vais doucement... Peut-être… Je bois une gorgée de café, la femme me regarde toujours, son sourire disparaît et elle dit, l’air soudain inquiète, vous n’avez pas l’air en forme, ça ne va pas…? Je bois une gorgée de café bien chaud, j’y vais prudemment mais bon, ça a l’air de passer. Je regarde les eaux turquoise face à moi et je me dis que bientôt, cette couleur là, je la verrais plus jamais. Ou peut-être bien tout le temps.
C’est la couleur que vous regardez, reprend la femme en plissant les yeux, c’est beau, non ? Oui, magnifique, je réponds tout en trempant mon donut dans le café. La femme sourit de nouveau, acquiesce d’un hochement de tête puis elle dit, le regard de nouveau perdu devant ces eaux si bleues, cette couleur, c’est due à une source perpétuelle, la Blue Spring. C’est plein de vie, là-bas, vous savez, l’eau jaillit tout le temps de cette source remplie de minéraux et ça donne... Ça, oui, ça, juste ça, elle hoche la tête, sûre d’elle-même et de ce qu’elle voit, de tout ce qu’elle aime, cette couleur bleue turquoise. C’est juste... Incroyable. Sauf quand il a plu. Elle se tourne à nouveau vers moi et ses yeux me reprennent en douceur, oui, enfin vous savez, cette odeur de pluie, métallique et froide, ça devient... Autre chose. Comme un passage. Elle cligne des yeux, me regarde bien au fond puis elle rit. Rire enfantin, rire léger, et puis ses mots en douceur, bon, il faut vraiment que j’arrête de dire ça : Vous savez… Bref. Quand il a plu, la Blue Spring se remplit de boue et elle devient de la même couleur que les eaux boueuses du Colorado. D’un doigt elle désigne un point à l’horizon. Là-bas, vous voyez, elles se mélangent toutes les deux, la Little Colorado et le Colorado. Le bleu et la boue. La vie et la mort. Je ne sais pas trop si ça va bien ensemble... Elle esquisse une petite moue incertaine puis se tait, le visage soudain fermé et le débit de sa voix diminue, et puis s’arrête.
Je réponds pas tout de suite, nan, je pense à Mariana, à ses yeux bleus si purs et à ce que j’ai du leur faire. Je me bagarre avec mon estomac mais ça a l’air de passer alors je dis, merci pour le café. La femme fronce les sourcils. Elle me regarde, me fixe, et dit à voix basse, vous avez vraiment l’air de quelqu’un qui va s’écrouler d’ici peu, vous ne voulez pas vous arrêtez ici un moment, je m’occuperai de vous... Ça n’a pas l’air d’aller, vraiment…
Nan, je secoue lentement la tête, nan, je suis juste un peu fatigué. C’est tout. Ne vous dérangez pas.
Vous ne me dérangez pas du tout, voilà tout ce qu’elle dit. Et elle rajoute en murmurant, Je vous attendais. Ses yeux bleus sont fixés sur moi. Si perçants. A mon tour je lui souris. A l’horizon, le bleu de la rivière scintille comme des guirlandes de Noël ; un chien, un truc à longs poils blancs, joue au bord de l’eau, là-bas dans le soleil ; et l’odeur du café frais, des donuts au chocolat et la femme et sa présence sereine. Femme douce. D’apparence si douce. Je ferme les yeux. Je crois que je vais mourir ici, dans l’air tiède, et puis non, je meurs pas. Pas encore. Je me sens mieux, de nouveau j’ouvre les yeux et la femme me regarde toujours.
Vous allez où comme ça ? demande-t-elle, si je ne suis pas trop curieuse...
Pas de souci, vous avez le droit de savoir. Haussement d’épaules, la fatigue a chassé la colère alors je continue à voix lasse, je me rends au Painted Desert. Enfin... Si je le trouve.
Le Painted Desert… Qu’est-ce que… enfin, bon ça ne me regarde pas mais c’est isolé là-bas et vous n’avez pas l’air d’être vraiment en forme. Vous êtes sûr de vouloir…?
Je ne réponds rien, y’a des choses sur lesquelles on ne revient pas et Mariana, et ce que j’ai du lui faire, c’est mort et c’est comme ça. Oui, je suis sûr, je réponds enfin en tremblant, et je vous remercie, mais on m’attend. Bien, elle a pas l’air convaincue, d’accord, mais si vous voulez vous reposer encore un peu... Ici, mouvements de ses mains, amples et accueillants, ici, tout ça c’est chez moi. Je la remercie encore, du regard je caresse son visage net et carré, sa belle chevelure blonde de Nordique et puis son corps, ses longues jambes étendues sur la table basse devant elle et ses yeux bleus couleur cristal et je dis, il faut que j’y aille, réellement, on m’attend.
Je sais je sais, vous me l’avez déjà dit. Je vous ai entendu. Devant ce visage si net et si pur, cette beauté qui me regarde bien en face et me retient, je me demande si elle existe vraiment… Et si elle existait, ne serait-elle pas la Mort elle-même ?
Silence puis elle dit, regard au loin, si au retour vous voulez encore du café ou un gâteau, arrêtez-vous et passez-nous voir, le chien et moi.
D’un doigt elle désigne le machin aux longs poils blancs qui patauge en bordure de rivière. Puis elle hésite et dit enfin :
Vous savez - soupir et petite grimace de sa part - depuis que je vis ici, face au fleuve, je fais ce rêve. Oui, ce rêve, toujours le même d’ailleurs et dans ce rêve je suis dans l’eau, mon corps nu, oui, complètement nu, elle sourit comme pour s’excuser. Silence puis elle reprend d’une voix étouffée, comme ailleurs, son regard figé sur moi comme un avertissement… Donc je suis nue avec de l’eau jusqu’à la taille et il y a des hommes, toute une file d’hommes qui vient vers moi, nus eux aussi, et ils s’arrêtent l’un après l’autre, là, juste devant moi. Et ils me regardent. Et ils attendent. Alors je plonge mes mains dans l’eau de la Blue Spring et quand je les retire, elles sont devenues toutes bleues. Et doucement, tout doucement, en faisant bien attention comme lorsqu’on lave un enfant, je passe mes mains sur le visage de l’homme inconnu face à moi, le premier de la file, en faisant des petits 8, là, comme ça, vous voyez - elle fait des petits gestes avec ses mains - et sa peau devient toute bleue. Oui, bleu turquoise. Et l’homme inconnu me sourit, l’air heureux, enfin heureux il me semble et il me remercie pour tout ce que je lui ai fait. Puis il fait demi-tour et s’en va, le visage et la peau bleu turquoise. Et il y en a un autre qui arrive, puis encore un autre et ainsi de suite... Certains hommes font demi-tour et rejoignent la rive, d’autres viennent derrière moi et je les aide à passer la Little Colorado. Voilà, c’est ça ma tâche : les aider à passer la rivière et c’est comme ça depuis longtemps. Depuis toujours. La femme me regarde, tente un sourire. Je ne sais pas pourquoi je vous dis tout ça mais… Je l’aime bien ce rêve et les hommes du rêve, eux aussi. Apparemment. La femme au rêve bleu, au rêve ultime, elle me regarde puis attend - moment sans réaction de ma part - et devant mon silence elle conclut dans un sourire un peu triste, alors surtout n’hésitez pas et revenez me voir. Je m’occuperai de vous, du mieux que je pourrai... Dès que vous serez prêt.
Je la regarde, de nouveau l’esprit en fusion, de la sueur partout sur le corps. Dans une poche de mon pantalon je sens deux pièces de monnaie rouler sous mes doigts et la femme me regarde une dernière fois… Deux pièces, voilà tout ce qu’il nous faut parfois pour changer de vie. La femme du Nord se détourne vers la Little Colorado et je fais demi-tour. On m’attend. Au loin j’entends le tambour de la jeune chaman et l’odeur du Painted Desert est de plus en plus présente et je me doute qu’ils sont là, à m’attendre, à m’espérer : les coyotes. Je monte dans ma caisse et j’allume la radio, l’intro de The Last Resort, Eagles for ever, résonne dans ma caisse et quand je passe devant elle, la femme de profil sur le rocking-chair, j’ai peur que ça soit ça, ma dernière image du monde civilisé : une femme immobile et blonde devant les eaux turquoise de la Little Colorado ; un chien blanc qui s’amuse dans la rivière ; et une tasse de café bien chaud au soleil. Mais quand je dépasse l’auvent et la terrasse en bleu, dans mon rétroviseur, rien, tout est redevenu vide… Auvent et terrasse au bois sans âge, je ne vois que ça : un rocking-chair sans personne dessus et pas de trace de cafetière fumante ni de donuts au chocolat ni de chien aux longs poils blancs en train de jouer dans l’eau, nan, rien de rien, juste une vieille peau de bête inconnue en train de pourrir sur la rive. Alors j’accélère, direction le Painted Desert. Dans mon rétro, l’image du rocking-chair s’éloigne puis soudain le siège en bois se balance tout seul. Oui, il se balance, inutile et nu dans la clarté éblouissante d’un soleil qui se lève pour les morts. Un soleil blanc. Rien. J’accélère encore.
On crève toujours trop tôt.
Je roule encore quelques kilomètres. Je délaisse le fleuve et sa gardienne intemporelle et je pense au bleu turquoise qui se mélange avec la boue. Mariana la Bamba vient se nicher dans mon cou, elle m’effleure du bout des doigts, du bout des lèvres et me souffle à l’oreille, jamais le bleu et la boue ne se sont bien mariés ensemble, non, jamais, tu le sais bien et je divague maintenant et je brûle de partout alors je m’arrête et ça tombe bien, je suis enfin arrivé. Je stoppe en haut d’une mesa bleue, Tawa Point comme indiqué sur un panneau en bois, et le désert est là, devant moi. Ça respire la terre sauvage et brûlée, les végétaux aux senteurs de curry, l’odeur animale du bestiaire encore invisible mais omniprésente et forte, et je tremble de partout alors je coupe le moteur. J’ouvre la portière et il est temps que je me souvienne et que j’avoue tout, là, devant le silence absolu…
Oh ! Bambino mio, tu prends ta hache planquée sous le lit de la chambre d’hôtel que tu as réservée à l’avance, et tu te diriges vers elle, Mariana la Bamba, toi le bourreau, et elle, ta douce victime supposée. Tu la regardes et elle ne te quitte pas des yeux, non, toute son attention rien qu’à toi dédiée, tout en contrôle face à sa vérité qui enfin fait jour, Yeap !, et elle te regarde la rejoindre, un sourire éblouissant aux lèvres tandis que Mister six-packs se débine de la chambre, le slip de travers et la gueule et les idées confuses, lui apeuré, et tu la rejoins sur le lit, Mariana La-proie, elle adossée au mur, les jambes allongées sur le drap et jamais tu ne l’as désirée aussi fort qu’à ce moment là, cette nuit là - c’était il y a deux jours, une éternité - son corps mince et souple, ses hanches de poupée, son visage de Madone aux yeux bleus immenses écarquillés et elle ne bouge plus, Mariana, oh non ! rien, attentive et douce et tout et tout, et ce sourire qu’elle arbore et ce mot qu’elle prononce quand tu lèves ta hache, ta putain de hache au manche en bois anonyme et poli et le coupant en métal fend l’air tandis qu’elle te regarde et te sourit, et murmure : Enfin... Quand la lame lui tranche le visage en deux, un œil de chaque côté, son sourire, t’arrives même pas à l’effacer, nan, et son corps de sirène se répand là, sur le lit, et apparaît sur le papier peint derrière elle une tache de Rorschach - le test le test ! - accompagnée d’une énorme giclée rouge Tomato Heinz Ketchup et Mariana La-proie te sourit encore et toujours, le visage divisé en deux. Et depuis, Rouge, tout est rouge autour de toi…
Voilà, tu respires à peine tandis que tu t’éloignes en trébuchant de la Buick Roadmaster Blue, ta hache lourde du sang des autres à la main. Tu avances, survis plutôt dans ce désert aux allures de grand nul part, alternance de vallées blanches inhabitées - terre et sable mélangés - et de mesas où toutes les variations de l’arc-en-ciel se déclinent à l’envie sur la roche surchauffée. Dans un silence assourdissant, du bleu lavande à l’ocre ténébreux, des monts en forme de seins t’accompagnent ; ils te montrent le chemin à suivre.
Painted Desert, tu fais sa connaissance pour la première et dernière fois à ce qu’il te semble. Tu marches encore un peu, tu craches du sang encore un peu, le sable absorbe tes pas et tes fluides avec une avidité toute féminine - Mariana, tu le faisais si bien, avant, ton regard bleu grave fixé sur moi et ta bouche enfin comblée - et tu t’arrêtes au creux d’une vallée. Tout autour de toi des monts aux remparts couleur vieil or. Des ombres de condors planent, fantomatiques, au-dessus des collines recouvertes de suaires de sable et tu les vois... Tu les attendais alors ils sont là, eux aussi à t’attendre : les Coyotes. Canis Latrans, un chien sauvage de 20 kilos et gris et roux.
Ils sont une bonne dizaine à m’entourer comme des sentinelles en haut d’un fort. Tous me regardent mais surtout lui, le grand coyote gris, le chef de meute, son corps de nouveau intact et les ouafs ! qu’il éructe me disent tant de choses, et pas que du bien. Les coyotos tournent en rond au sommet du cratère creusé d’ombre et de lumière et dans le soleil qui se couche, je la vois, Elle, Ma Mariana à moi. Elle marche, croise plusieurs fois la meute des cotoyes.
Vêtue d’une longue robe blanche toute simple, elle tourne en sens inverse des coyloups et autres coyotes réunis et elle me regarde et me sourit l’air de dire, nous serons bientôt réunis et n’aie pas peur, ce n’est rien, un martyr ne souffre jamais... Brefs coups d’œil de droite à gauche, le grand coyote gris descend prudemment vers moi. Ses pattes ne laissent pas de trace dans le sable. Épuisé mort au-delà de tout, je laisse tomber ma hache sur le sol et rien, je lève les mains devant moi en signe de tout, en signe de rien. Et ma fin, je la cueille à bras grands ouverts. Mariana me regarde et me sourit, tendre, l’air de dire, laisse-toi, laisse-toi faire, laisse-toi aller, je suis là, alors je me couche - le mieux que j’ai à faire - et les coyotes descendent tous vers moi. Moi, leur victime désignée. Leur chef de bande, le grand gris s’arrête au-dessus de mon visage. Nu et pétrifié de peur je sens son souffle, son odeur sauvage. Il me renifle et semble me reconnaître, hé oui, mais c’est bien lui, le Bambino Mio, tueur de femme et de grand coyote gris à l’occasion. Au sommet du cratère Mariana m’attend et juste comme les coyotes m’entourent et commencent à m’écarteler entre leurs gueules affamées, j’entends les dernières paroles d’Eagles mon ami, The Last Resort mélangées au Tam-Tam de la jeune chaman amérindienne, elle, la fille cherokee aux côtés de Mariana - toutes ces femmes venues ici pour me voir mourir. Et le dernier recours se fait attendre, mais rien, pas de dernière chance, nan, il ne me sera rien pardonné alors je ferme les yeux et comme dans un rêve aux dents brûlantes, aux haleines de charogne, les coyotes me submergent. Et je vois la femme au rocking-chair esquisser un vague sourire, tendre elle aussi, des larmes dans les yeux et elle me chuchote, ce n’est rien, ce n’est rien, ça va aller, ça va aller, bientôt on va se retrouver face à face dans la file, oui, bientôt…
Et toutes ces splendides images de corps féminins disparaissent, elles se fondent dans la Blue Spring. Ses eaux turquoises pleines de vie me tentent et m’apaisent, ses flots bouillonnants m’appellent à venir les rejoindre, murmures tentateurs, allez, quoi, allez, c’est ton jour de chance, le Bambino mio, hein, aujourd’hui tu peux enfin tirer ta révérence, et on t’attend là-bas au sein de la source bleue et tandis que mes os craquent sous des dents remplies de fureur et de bruit, gueules arides toutes fiévreuses, juste ça, pour le final…
The last resort, They call it paradise, I don’t know why, You call someplace paradise, Kiss it goodbye… Oué, quand tu commences à appeler un endroit le paradis tu peux tout de suite lui dire au-revoir… Rien que ça...
Oué oué et pourquoi pas après tout, oué, et pourquoi pas, et combien de temps avant de crever, SEUL et PERDU, de faim et de soif, de maladie dans ce désert immense, oué, combien de temps…
Mariana La Bamba, je
![[illustration]](/data/img/images/2025-05-24-donut-big.jpg)
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Déjà j'ai fait une recherche sur "Harry Crew" et je n'ai trouvé qu'un "Harry Crews" alors j'imagine que c'est à lui que ce texte est dédié.
Fais chier. Je pensais que ça allait le faire mais au bout de trente lignes, je m’emmerde. J’ai pas la vérité que l’auteur me pardonne, c’est peut-être moi