LA ZONE -

Rêve : dive / drown

Le 02/06/2004
par nihil
[illustration] Tout a commencé comme ça : il y avait cette horloge noire qui sonnait inlassablement, un son aigrelet et désagréable de coucou antique.
Tout de suite après, je me suis retrouvée dans une immense église vide et obscure avec des colonnes bizarres. Juste une double rangée de piliers noirs enracinés dans le sol, à l’infini. J’avais la sensation que mes pas brisaient un silence millénaire, un calme de tombeau. Je remarquais une sorte de végétation morbide qui serpentait autour des colonnes, un lierre gris, minéral, qui enserrait les piliers. Le ciel de la cathédrale-forêt était mort, j’avais l’impression que les nuages refluaient à l’envers.
J’avançais, les mains sur les yeux, je savais que j’étais en train de me perdre. De hautes figures me frôlaient, des masques qui s’effaçaient dès que je les fixais. Je savais que d’une manière ou d’une autre, j’étais morte et que j’effectuais le chemin des âmes vers leur repos dernier.
Alors le vent s’est levé et je me suis mise à paniquer.
Je cherchais je ne sais plus exactement quoi, mais ça m’obsédait et j’avançais de plus en plus vite, ma respiration s’accélérait. L’image était parasitée de scènes incompréhensibles lourdes d’une frénésie larvée. Je m’enfuyais entre des pans de décors de cinéma, perdue. Je m’enfonçais dans des corridors de carton-pâte de plus en plus en plus sombres. Voie sans issue. Au fond, je distingue une présence. Je me retourne, souffle coupé.

Après ça, je me suis réveillée, hors d’haleine et mal à l’aise. Je suis allée boire un verre d’eau à la salle de bains, mes traits dans le miroir étaient tirés. Déjà les images du cauchemar se brouillaient dans ma tête, mais je n’arrivais pas à me défaire de l’impression d’avoir vu un fantôme. Mon cœur battait encore un peu vite. Je suis allée me recoucher avec une certaine forme d’inquiétude bizarre. J’ai lu quelques pages de mon roman, résistant mollement au sommeil, puis j’ai fini par m’abandonner et j’ai à nouveau sombré en quelques minutes.

Retour sur l’horloge dont l’incessante sonnerie était montée d’un ton dans les aigus, avec une fréquence sensiblement accélérée. Mais des accents hystériques cachés derrière la froideur mécanique, le chaos qui germe au cœur de l’ordre, le ver dans le fruit.

Le sol se recouvrait de dalles, et je me retrouvais entourée de statues funéraires. On aurait dit des mannequins de fête foraine, mais je ne sais pas ce qui me faisait penser ça. Et ces formes défigurées tournaient autour de moi, leur socle se déplaçait grâce à des mécanismes grinçants, s’enclenchaient lourdement avec comme des claquements de mâchoires.
J’ai trouvé une robe noire enroulée à terre, toutes les statues se sont brusquement rapprochées de moi et m’ont pressée de l’essayer. J’ai passé la robe noire qui s’est collée à moi comme une seconde peau, mais elle était laide. Je n’aurais su dire pourquoi, mais elle avait quelque chose de détourné, de bizarre qui me faisait peur.
Changement de plan, une image rouge que je ne comprends pas, des murs qui se recouvrent de sang et des monstres flous qui s’agitent, un carrousel de chevaux écorchés.
La robe n’avait ni manches ni trous pour les bras si bien que je devais garder mes poignets croisés sur ma poitrine, elle me serrait comme une camisole de force. C’était comme si le tissu s’était fondu dans ma peau, impossible de l’arracher de moi.
Je me suis mise à déambuler dans ce faux linceul tandis que la nuit tombait par à-coups dans l’église, comme des battements de cœur d’obscurité, et toute la végétation grise vibrait d’un même rythme-panique, chant des sirènes tellurique. Et c’était comme si une tempête éclatait autour de moi mais sans le moindre bruit et sans pluie, la tension qui monte encore et encore.
Et des vrombissements de bulldozer insoutenables montaient des parois.

Je suis dans une grande salle de bains immaculée, il y a des miroirs partout. Je suis torse nu, face à mon reflet, les bras écartés. Je ne distingue pas mon visage, perdu dans une espèce d’ombre granuleuse. Sur mon ventre court une longue cicatrice, verticale. Avec des petits ciseaux je coupe une à une les sutures, mais juste avant de rouvrir la blessure je me regarde dans la glace et je dis à haute voix : « inutile, je sais déjà ce que je vais trouver ». Alors la porte s’ouvre lentement, un jeu de reflets me montre l’espace d’une seconde avec derrière moi une autre moi-même au visage malade et éteint, un vide monstrueux dans le regard.

Et des journées vides qui succèdent à des nuits exsangues. L’ennui qui s’abat comme une chape de plomb, l’ombre de vies ruinées… Je me laisse couler dans des océans de blancheur infernale, dégoûtante de pureté. Et je tombe.

Après ça, je ne me suis plus jamais réveillée.

= commentaires =

Lapinchien

tw
Pute : 8
à mort
    le 02/06/2004 à 19:24:06
Je ne sais pas pourquoi mais çà m'a donné currieusement l'idée d'ecouter çà en boucle... merci nihil tu viens de foutre en l'air ma soiree Harry Potter... Bon je suis partageur (il vous faut Real Player)
http://demouy.vanessa.free.fr/revedefille.ram
Bizontin

Pute : 0
    le 02/06/2004 à 20:46:48
Ce texte étonnant d'audace, d'originalité et presque irrévérent connut un succès extraordinaire durant tout le XVIe siècle. On le recopia à la main des centaines de fois au péril de son intégrité, le chanoine Alphoride le gangrené offrit même une petite fortune pour en obtenir un exemplaire à des fins masturbatoires et l'on discuta sans fin dans des salons abstrus de l'auteur présumé et de sa confondante outrecuidance. La prévôté parisienne, alertée, finit même par arrêter sans ménagement les libraires inconscients qui le vendaient sous la gabardine.
Aujourd'hui encore, bien que l'auteur, Nihil, fût attesté sans ambiguité, l'importance de « Dive / drown » ne peut cacher sa modernité et son actualité dans ce siècle qu'assombrissent déjà de nombreux et insondables tourments.
Les questions essentielles, Nihil ? puisqu'il s'agit bien de lui - les pose en gendelettre accompli, dans ce récit qui engendre la plénitude sensuelle de l'existence même... ce qui n'est pas peu dire.
TELERAMA ? 02/06/04 ? page 87

Allez, sérieusement, j'aime beaucoup, même s'il est vrai que la patte nihilasque exsude dès la première ligne droite.
Une seule remarque, dérisoire certes. Une femme aurait-elle écrit « Je suis torse nu... » ?
Le doute me dévaste.
N'aurait-elle pas plutôt balayé l'allégorie d'un « Je nibardise gaillardement... » ou éventuellement d'un «  Je suis nue du collier à l'hypogastre et mes rondeurs avantageusement friponnes et indomptables en profitent pour débouler au pied levé... » ? Le débat reste ouvert.
Kirunaa

Pute : 1
    le 02/06/2004 à 21:40:55
J'ai été surprise par le narrateur féminin. Etonnant chez Nihil. En tout cas, quel bonheur de lire un texte sans faute, avec des vraies phrases et des vrais morceaux de mots dedans !
C'est "tellurique" le petit dernier à caser partout ?
Aka

Pute : 2
    le 03/06/2004 à 14:31:15
Rendons à César ce qui est à César vu que monsieur ne le f
Aka

Pute : 2
    le 03/06/2004 à 14:34:54
ait pas disais-je (c'est rien c'est l'émotion) : y a des bouts d'un de MES cauchemars là dedans bordel ! Ca explique peut-être le personnage féminin. Ok je sais je me crois le centre du monde.

Bref, je l'ai trouvé terrible ce texte, bien construit. L'ambiance est parfaitement recréée. Ca lui fait du bien d'éviter les murs qui pourrissent de temps en temps au grand manitou mine de rien.

(Je tenais à te dire mec, j'adore quand t'es au boulot et moi à la maison : je peux dire ce que je veux. Je crois que je vais me prendre une année sabatique tiens...)
Lapinchien

tw
Pute : 8
à mort
    le 03/06/2004 à 14:45:38
bon ben le fichier real est pourri c'est même pas la peine de l'ecouter... J'ai desespérément tenté de retrouver les paroles de Rêve de fille , la formidable chanson de Vanessa Demouy... Mais sans le moindre succes... a croire que la communauté entière des internautes n'a pas le moindre gout... Elle passe à coté d'un chef d oeuvre...


Je n'ai pu degoter que les paroles de Jam is Black, c'est deja çà . Profitez mes chers amis... profitez...


Les Caraïbes au cœur
On voit la vie bien plus sucrée quand même
Mélangées les odeurs
Le fruit sucré d'amour au sel de mer
Chanter pour les couleurs de l'Afrique
Ces rythmes qui vous collent à la peau

[Refrain:]
Jam is black
C'est dire qu'on aime
C'est l'espoir qui vient d'en haut
Jam is black
Comme un emblème
C'est leur vrai drapeau

Là-bas, la nuit s'allume
Pour un voyage saoulé par la musique
Allongés sous la lune
Corps sur des plages aux airs de Pacifique
Des Caraïbes au cœur de l'Afrique
C'est l'âme des hommes qui s'élève un peu

[au Refrain]

Collés tissus fleuris
sur la peau noire et mouillée de soleil
La mer s'y met aussi
Tout est reggae dans cette île aux merveilles

Commentaire édité par Lapinchien.
El Defoncer
    le 03/06/2004 à 21:03:11
écoute plutot Java lc ... tu sais pas où sont les bonnes choses toi ..
Lapinchien

tw
Pute : 8
à mort
    le 03/06/2004 à 21:21:22
putain ou est le rapport avec le reve de fille de nihil ?
El Defoncer
    le 05/06/2004 à 16:48:01
bein écoute et tu verra LA PINE DE CHIENNE DE PUTE A LA CON DE CALAMAR EN BOIS

(edit par nihil : ah nan merde c'était pas un smiley ça, c'était trois petits points... je deviens trop sensible)

Commentaire édité par nihil.
El Defoncer
    le 05/06/2004 à 17:49:58
SALOPE TOUCHE ENCORE A MON TEXTE ET JE TE PULVERISE LES COUILLE A COUP DE MARTEAU PIQUEUR !! ENFOIRé DE MELON TRANSGENIQUE
Narak

Pute : 2
    le 06/06/2004 à 16:21:05
Qui à dit qu'internet rend déphasé?

Ah oui!C'est moi en voyant se qu'ecrit El Defoncer...
nihil

Pute : 1
void
    le 06/06/2004 à 20:16:43
Bon bah c'est cool tout ça... Et sinon, vous auriez pas lu mon texte par le plus grand des hasards ?
Narak

Pute : 2
    le 07/06/2004 à 18:35:05
Lequel?
Narak

Pute : 2
    le 07/06/2004 à 18:36:34
Ah ! c'est de ça que tu parle,si si moi je l'ai lu.
El Defoncer
    le 10/06/2004 à 14:30:42
ton texte, pas mal, je comprend pas comment ta eu l'idée de te metre au feminin. Sinon j'aime bien les passages ou elle est dans l'église avec la robe camisole et aussi celui ou elle se bistourite, je trouve que sa fais vraiment cauchemard c'est bien trouvé .. remerci aka quand même.
Lapinchien

tw
Pute : 8
à mort
    le 10/06/2004 à 15:21:29
note pour plus tard: penser à divorser et à me dégoter une petite amie schizophrène. C'est carrément mieux que la drogue pour l'inspiration... ouais une bien atteinte qui fasse pas chier avec les droits d'auteur.

Aka

Pute : 2
    le 11/06/2004 à 01:58:20
Hey je suis pas schizo hein. Me mettez pas toutes les tares non plus !
nihil

Pute : 1
void
    le 13/06/2004 à 22:50:48
Et moi je comprends vraiment pas pourquoi ça surprend tout le monde, le narrateur féminin ? Outre le fait que je suis en liste d'attente pour un rajout de sexe (non, pas un changement, j'ai bien dit un rajout), c'est pas comme si c'était la première fois que je fais ça... A titre d'exemple Hypocondria...
Nagash

Pute : -2
    le 14/06/2004 à 23:05:35
Oui et c'est encore moins surprenant pour celui qui connait tes talents nocturnes au bois de Boulogne.
nihil

Pute : 1
void
    le 15/06/2004 à 00:11:45
Voilà, c'est d'ailleurs en quelque sorte la vanne que je venais de faire dans mon message précédent
Nagash

Pute : -2
    le 15/06/2004 à 02:48:32
Tu sais bien que le recyclage est ma spécialité.
nihil

Pute : 1
void
    le 10/08/2004 à 07:52:32
En même toi moi aussi je peux faire des rêves drôlement agréables : là j'ai rêvé que j'avais le SIDA, qu'il me restait plus qu'un mois à vivre et que j'en profitais pour inventer une nouvelle méthode de prélèvement sanguin avec un couteau de cuisine pour refiler le virus à des gamins. C'est par où le service lobotomie, siouplait ?
Aka

Pute : 2
    le 10/08/2004 à 08:56:34
Ouais puis la schizo a l'air bien avancé avec des phrases comme 'en même toi moi'...
nihil

Pute : 1
void
    le 10/08/2004 à 16:20:04
Faut vraiment que je recommence à regarder mes doigts quand je tape et aussi je passe mon cerveau en update 1.2XP
hub
    le 02/11/2007 à 19:54:45
vo ist das blut?
Judas
    le 03/11/2007 à 01:49:54
In deinem Arsch ?

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